Lunes de fiel
de Pascal Bruckner

critiqué par Monde imaginaire, le 28 septembre 2012
(Bourg La Reine - 51 ans)


La note:  étoiles
Réflexion troublante et sulfureuse sur les limites de l’amour …
Ce que dit la 4ème de couverture :

Peut-on échapper à la monotonie du couple ? Esquiver l'ennui par l'adoration, la lassitude par l'érotisme ? Telle est la question implicite que se posent les personnages de ce roman à bord du paquebot qui, dans les derniers jours de l'année 1979, les mène de Marseille à Istanbul. Le récit que l'un d'entre eux, Franz, fait à un autre voyageur, Didier, de ses amours avec une certaine Rebecca, également présente, sert de fil conducteur à leurs interrogations. Récit dont l'enjeu caché ne manquera pas d'infléchir à son tour les relations du voyageur et de sa compagne, avec laquelle il part en Inde pour s'évader d'une existence d'enseignant trop bien réglée.
Double histoire et d'une déchéance amoureuse et d'un huis clos à l'intérieur d'un navire, Lunes de fiel est avant tout un roman de la cruauté. Des êtres en proie au désemploi de soi y cèdent à la fascination du bonheur dans la haine. Lunes de fiel, on l'aura compris, c'est l'autre face de notre rêve contemporain d'euphorie obligatoire, c'est la mise en scène des impasses de la vie privée dès lors qu'elle se replie sur elle-même et succombe sous le poids de sa propre frivolité.

Mon avis :
Un livre extrêmement dérangeant, peut-être même celui qui m’a le plus choqué depuis que je lis … (avec American Psycho …) mais on est pris au piège par l’histoire. Pascal Bruckner tisse sa toile et nous met très rapidement dans le rôle du voyeur, tout comme Didier qui chaque nuit va écouter les confidences de plus en plus sulfureuses de Franz.
Cependant c’est un livre à ne pas mettre entre toutes les mains car il s’adresse vraiment à un public très averti.
Pascal Bruckner manie les mots comme un virtuose et nous assistons, impuissants, à la longue descente aux enfers des deux héros.
A noter qu’il existe également un film réalisé par Roman Polanski, magnifiquement interprété par Emmanuelle Seigner, qui semble tellement à fleur de peau. Roman Polanski a très bien réussi à rendre l’ambiguïté des personnages et à retranscrire l’ambiance glauque et troublante du livre.
Je trouve étrange que ce livre n’ait jamais fait l’objet de critique sur votre site car il offre une réflexion incontournable au lecteur. L’amour passion conduit-il de manière inexorable à la haine et à la destruction ? Vous avez 4 heures (non je plaisante !!!)
Je mets donc ma petite pierre à l’édifice en contribuant à vous faire connaître ce roman qui ne peut laisser personne indifférent et dans lequel on alterne entre fascination et dégoût car il va extrêmement loin dans l’exploration des sentiments amoureux.
De Marseille à Istambul 9 étoiles

Quel livre extraordinaire que celui-ci. Choquant à souhait (et pourtant je ne suis pas bégueule).
Ici les amateurs de "salasse" trouveront leur compte.
Je suis aussi très surpris de voir le peu d'engouement pour ce roman (et pour l'auteur qui est à mon avis l'objet d'un boycott voilé dans les bibliothèques).
Il est vrai que Bruckner est un homme qui s'affiche comme étant de "droite" alors que le monde de l'art est traditionnellement de "gauche". Il est aussi à noter que le Manifeste des 343 salauds qu'il a co-signé lui colle à la peau comme un bouton sur le nez.
Par deux fois, dans le texte il s'attardera à décrire la gauche cachemire.

En écrivant Lunes de fiel, il est bien évident qu'il devait s'attendre à une levée de boucliers car même les plus hardis doivent éprouver une certaine gêne à certains passages. Comme pour se justifier de telles scènes aussi osées Bruckner dira simplement : "On n'aime rien si on n'aime pas tout" mais aussi "En l’absence de tout art d'aimer en occident, l'acte amoureux devient la somme de toutes les façons licites ou illicites de s'étreindre. Puisque en amour, rien n'est sale, comme disent les bonnes âmes.

Bruckner va loin, très loin... trop diront certains.
Ils sont quatre : Didier et sa blonde amie Béatrice. Frantz, paraplégique, amer, infatigable bavard et sa très belle épouse Rebecca, provocatrice à souhait. Ils s'apprêtent à vivre un huis-clos étouffant à bord du Truva, un paquebot modeste qui ne sait pas encore qu'il effectue son dernier voyage. il sera désarmé pour raisons financières. Cela n'a aucun rapport avec l'histoire... mais il ne pouvait en être autrement.

L'intrigue et le final sont à couper le souffle.
Merci à Monde Imaginaire pour sa critique. Je lui dois un grand moment de lecture.

Monocle - tournai - 64 ans - 3 juin 2015