Mémoire morte
de Donald Westlake

critiqué par Isad, le 30 juillet 2012
( - - ans)


La note:  étoiles
Le sens de la vie
Ceci n’est, à proprement parler, ni un policier ni un thriller. Certes il y a une enquête et un suspense, mais il concerne le fait de savoir si le personnage principal va ou non retrouver la mémoire qu’il a perdu suite au coup sur la tête portés par un mari jaloux dans une chambre d’hôtel alors qu’il était en tournée. Le livre montre une volonté solitaire, tournée vers un but dont il attend une solution, qui invente de petits stratagèmes afin de ne pas dévier du cap qu’il s’est fixé sans savoir exactement à quoi il correspond.

Cet acteur, abandonné à l’hôpital par la troupe dans une petite ville, ne plus se rappeler est un handicap important, d’autant plus qu’il n’arrive pas non plus à fixer ses souvenirs récents qu’il qu’il doit noter au fur et à mesure. Tenace, il écrit aussi les quelques bribes de son ancien passé afin de ne pas oublier qu’il doit retourner à New-York. Comme il n’a pas d’argent et qu’il n’avait aucun document ou numéro de téléphone à contacter, il travaille dans une tannerie au service expédition et s’accoutume à l’engourdissement du travail physique. Il loge chez un collègue qui lui dit, alors qu’il a réuni assez d’argent pour partir, qu’il n’y a qu’un seul but dans la vie : se marier et avoir des enfants. Peu importe où, peu importe avec qui, la finalité de l’être humain est partout la même et il ne sert à rien de vouloir changer de lieu ou de partenaire.

La justesse de ces idées sera démontrée par la suite car lorsque l’objectif est atteint à grand peine, il apporte souvent moins de satisfaction qu’espéré et celle-ci n’est que de courte durée. En somme, pour être heureux, il faut se contenter de ce que l’on a. Tel est le message principal du livre qui dit qu’il ne sert à rien de vouloir aller dans un autre endroit ou changer le monde ! Heureusement quand même que tout le monde ne réagit pas comme cela et qu’il y a des innovateurs pour améliorer les choses.

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… Publié après sa mort 8 étoiles

« Mémoire morte » aurait été écrit dans les années 60 et publié en 2010, œuvre posthume donc, et aussi un des premiers romans de Donald Westlake, écrivain prolifique s’il en fut (plus d’une centaine d’ouvrages, sous de nombreux pseudos !).
« Œuvre au noir », est-il précisé dans la quatrième de couverture. C’est le moins qu’on puisse dire ! Noire de chez noire, l’œuvre ! Il ne s’agit pas d’un roman policier.
Paul Edwin Cole est un comédien, new-yorkais (chez Donald Westlake, New York est souvent un élément fondamental), d’une trentaine d’années. Mais le lecteur ne le découvre réellement dans le corps du roman, en même temps que Paul. C’est qu’en effet, au démarrage du roman, Paul, en galante compagnie, en compagnie surtout d’une femme mariée, se fait surprendre par le mari d’icelle, qui lui assène un magistral coup de chaise sur la tête le plongeant ainsi dans le coma.
Au réveil du coma, la mémoire … est morte. Rien de rien. Qui il est ? Ce qui l’a mis dans cet état ? Que se passe-t-il ? Il n’en a nulle idée. Problème : ceci s’est déroulé durant une tournée de la troupe à laquelle il appartenait. Qui ne l’a pas attendu et qui a continué son périple.
Paul se retrouve inconnu en territoire inconnu avec une mémoire qui ne franchit pas les bornes du sommeil. C’est un véritable « reset » qu’il subit chaque jour en se réveillant (c’est curieux mais sans le faire exprès j’avais lu juste avant « Avant d’aller dormir », de S.J. Watson sur un thème similaire) …
« Mémoire morte » est donc l’histoire de cette tentative de reconquête de son histoire, de son « moi » profond de la part d’un amnésique ou assimilé. Et ce n’est pas une partie de plaisir. La reconquête ! Parce que sa lecture, si ! Donald Westlake avait beau écrire à tours de bras, c’était quand même sacrément bien fait …
Cela dit, « Mémoire morte » fait partie de son « œuvre au noir » …

Tistou - - 68 ans - 12 mai 2014