L'oubli que nous serons
de Héctor Abad Faciolince

critiqué par Pucksimberg, le 30 juillet 2012
(Toulon - 44 ans)


La note:  étoiles
"L'amour gratuit d'un père pour son fils"
Avec « L’oubli que nous serons », Héctor Abad rédige un roman troublant et captivant. Le personnage principal est son véritable père, Héctor Abad Gomez, professeur humaniste admirable par ses prises de position. Le problème réside dans le fait que cet homme bienveillant et engagé vit avec sa famille en Colombie, pays diabolique où l’on tue toutes les personnes qui vont à l’encontre du régime, les dissidents. C’est le sort qu’il connaitra …

Hector Abad met à mal la célèbre phrase pessimiste de Sartre : « « Il n'y a pas de bon père, c'est la règle ; qu'on n'en tienne pas grief aux hommes mais au lien de paternité qui est pourri. » Le père qu’il décrit est un homme profondément humain, proche de ses enfants, pédagogue et de bon conseil. Il châtie rarement, pardonne facilement et ne pense qu’au bonheur des siens.

Dans ce roman autobiographique, Héctor Abad décrit son enfance, son père, sa mère, ses sœurs, l’entourage et le contexte de la Colombie, pays hostile et d’une extrême violence. Certains épisodes sont emplis d’une infinie tendresse et d’une grande complicité, d’autres sont marqués par la souffrance due à la perte d’un être cher et par l’injustice. Dès le début du roman, le lecteur est averti sur le fait que le père de l’écrivain a été assassiné, et que l’une de ses sœurs décèdera à 16 ans. L’écrivain a eu besoin de vingt ans pour trouver le courage et la force d’écrire ce livre qui permet d’immortaliser durant un certain temps cette famille admirable dont le père œuvre pour la paix. Héctor Abad parle de son père comme la plupart des écrivains parlent généralement de leur mère. Cet être extraordinaire a connu certains auteurs colombiens, a fréquenté certains individus des sphères politiques ou de l’intelligentsia de ce pays.

L’histoire personnelle de l’auteur renseigne le lecteur sur l’Histoire de ce pays et les émotions que ce roman véhicule ne peuvent que toucher, voire bouleverser le lecteur, car universelles. Le roman pourrait être pleinement pessimiste et pourtant une certaine joie de vivre filtre à travers ces exils, assassinats et familles brisées.

Un roman autobiographique d’une beauté rare, touchant, révoltant, qui emporte son lecteur dans les ruelles de Medellin.