La nuit sous le pont de pierre
de Leo Perutz

critiqué par Patman, le 31 octobre 2002
(Paris - 62 ans)


La note:  étoiles
Ah ! Si j'avais la fortune de Meisl !
Quel lien mystérieux lie l’empereur Rodolphe et le juif Mordechai Meisl ? Que fait donc le grand rabbin de Prague la nuit sous le pont de pierre ? Voilà tout ce que je vous dirai de la trame de ce roman, déroutant, fascinant, merveilleux et ce dans tous les sens du terme. Vu le peu d’éléments que je vous donne, ma critique sera forcément courte, en sera-t-elle meilleure pour autant ? Ceux qui comme moi aiment Adamek adoreront sans nul doute possible cet extraordinaire roman de Leo Perutz. Est-ce vraiment un roman d’ailleurs ?
Il ressemble plutôt à une succession de nouvelles, toutes plus savoureuses les unes que les autres. Seul lien apparent entre toutes, la présence, parfois juste en filigrane, de l'empereur ou de Mordechai Meisl, prêteur sur gage juif de la vieille ville de Prague au début du XVIIème siècle. Et puis, soudain, dans les dernières lignes du livre, tout s’éclaire ! Bien sûr c'est un roman ! Malgré l'apparente anarchie de la construction, tout se tient… Chapeau monsieur Perutz, vous nous avez bien eu ! Après le Cavalier Suédois qui m'avait emballé, La Troisième Balle, très baroque et qui m’avait un peu déçu (j'ai d’ailleurs renoncé à le critiquer), mon troisième Perutz m’a donc littéralement transporté ! Essayez-le, vous ne le regretterez pas !
Un bonheur de finesse 8 étoiles

Amours irréelles, société enchanteresse. Leo Perutz met en scène la Prague du XVIIe siècle.
Un bonheur de finesse et d'intelligence.

Ravenbac - Reims - 59 ans - 7 décembre 2019


Prague magique 8 étoiles

Rodolphe II, archiduc d’Autriche, roi de Bohème et de Hongrie, est amoureux. Amoureux des œuvres d’art, amoureux de la belle Esther. Il rêve et néglige la gestion de son royaume... Sur cette toile de fond historique Léo Perutz brode une série de récits, entre magie et ironie, onirisme et réalité (Mordechai Meisl a bien existé et financé la construction de synagogue, hôtel de ville et maisons).
Quatorze contes, tels les pièces d’un puzzle, qui s’enchainent de façon un peu imprécise façon nouveau roman avant l’heure. Et si vous n’avez pas compris l’histoire de la rose et du romarin, patience ! Laissez-vous porter par la poésie en attendant la suite. Découvrez ce monde peuplé d’artisans, marchands, nobliaux, courtisans, serviteurs, musiciens, astrologues, chiens et revenants... La construction géniale de ce roman va se dessiner, comme émergeant de l’obscurité des ruelles du quartier juif.

Romur - Viroflay - 51 ans - 18 août 2018


Un roman onirique et enchanteur 10 étoiles

Ce livre comporte quatorze tableaux étincelants qui nous entraînent dans la vieille cité de Prague, vers 1600. Voici Koppel-Bär et Jäckele-Narr, deux misérables musiciens qui à la nuit tombée assistent à une danse macabre. Voici Pierre Zaruba, un tchèque indépendantiste, qui sans le savoir va dîner à la table de l’Empereur. Sans oublier Berl Landfahrer, l’homme le plus malchanceux de Prague, à qui des chiens font d'intéressantes confessions. Mais pourquoi le grand rabbin a-t-il planté une rose et un romarin sur la berge de la Moldau ? Comment Esther, la belle juive, parvient-elle à retrouver chaque nuit Sa Majesté impériale? Et que deviendra l’or de Mordechai Meisl ?

Publié en 1952, ce roman de Leo Perutz est l’un des plus magnifiques qu’il m’a été donné de lire ! Car contrairement aux apparences il s’agit bien d’un roman. Si les petits récits semblent d’abord indépendants, on s’aperçoit par la suite qu’ils forment un puzzle dont on doit patiemment assembler les bords avant de parvenir au cœur de l’histoire : les amours secrètes d’Esther et de l’Empereur. Les tableaux ne sont donc pas nécessairement présentés dans un ordre chronologique, mais tout se joue au début du XVIIème siècle, à Prague, entre le quartier juif et la cour de Rodolphe II. Au fil des pages, Perutz nous livre des indices et peu à peu le mystère prend forme. La plupart des romans de Perutz ont une dimension historique. Dans « La nuit sous le pont de pierre », le héros est un monarque connu pour ses extravagances : Rodolphe II (1576-1612), Empereur germanique et roi de Bohême. Quant à Mordechai Meisl, il s’est effectivement distingué par ses actions philanthropiques, de sorte que sa tombe est encore visible dans le cimetière juif de Prague.

Pour moi ce livre est une véritable découverte, un chef d’œuvre qui mérite d’être lu et relu ! Sa technique narrative, particulièrement originale, ne gêne en rien la compréhension, mais parvient au contraire à nous intriguer de bout en bout. Et puis il y a l’atmosphère baroque de la vieille Prague, avec ses fantômes, ses bouffons, ses kabbalistes et ses ruelles sombres. Chaque page est une véritable merveille, un mélange de fantaisie et d’histoire, de légende et de magie. Chaque chapitre est un tableau onirique où le ciel nocturne contraste avec l’éclat de l’or, une peinture à la Rembrandt où se détachent dans les ténèbres les costumes scintillants des danseurs de sarabande.

Pierrequiroule - Paris - 43 ans - 6 octobre 2013


Une nuit fabuleuse. 10 étoiles

Oui Patman ! Perutz est l'un des plus grands auteurs tchèques, mais malheureusement par trop méconnu ! Réparons cette injustice, incitons à le lire... personnellement, je les ai tous lus, et je pense même me souvenir que c'est moi qui te l'ai conseillé (me trompe-je ?). Ce roman, en apparence disparate, prend tout son sens dans ses dernières pages. Du grand art... mieux, un CHEF-D'OEUVRE !!!!

Merlin - Bruxelles - 60 ans - 5 juin 2004