Les Marana
de Honoré de Balzac

critiqué par Exarkun1979, le 26 juin 2012
(Montréal - 45 ans)


La note:  étoiles
Les Marana
L'histoire de ce roman débute avec la prise d'une ville espagnole par l'armée impériale française. Un des soldats italiens tombe amoureux d'une jeune femme dont la mère a fait élever par une bonne famille italienne pour lui éviter le destin de ses ancêtres. Le problème est que le jeune soldat a un passé qui l’empêche de se marier Juana. Elle est donc obligée de se marier avec le capitaine Diard. Diard, qui avait un bel avenir dans l'armée, voit son service interrompu après une blessure. Tous les rêves de Juana d'une vie dans les hautes sphères de la société s'éteignent à ce moment. C'est ainsi que leur couple commence à s'effondrer.

C'est une histoire plutôt ordinaire de Balzac. Il est difficile de s'attacher aux personnages de ce roman. Juana est vraiment désagréable et Diard, pour qui on peut avoir de la sympathie, détruit tout son avenir lui même. Je n'ai donc pas vraiment accroché à ce roman de la Comédie Humaine.
Echapper à son destin 8 étoiles

« Les Marana » est une nouvelle construite en deux parties, la première fait un peu conte fantastique, où de mère en fille, le destin des Marana est d’être courtisanes, toujours dotées d’une extraordinaire beauté et de mettre à leurs pieds les hommes qui dépensent des fortunes pour elles. Aucune des femmes Marana n’a su ou pu échapper à ce destin jugé infamant. Pourtant, à la fin de la décennie 1790, la dernière des Marana décide que sa fille brisera cette chaîne infernale et dégradante et sera la première de la race des Marana à être vertueuse.

Lorsque sa fille Juana eut ses 7 ans, elle la confia aux soins d’une famille espagnole à Tarragone, en qui elle avait toute confiance en leur droiture et probité. Juana grandit donc en sein de cette famille isolée de tout, dans les préceptes de la pureté et de la religion. Mais il arriva que Tarragone fut prise par les troupes de Napoléon en 1811. Les français se rendirent maîtres de la ville. Les habitants durent chacun héberger un ou plusieurs soldats. Et la famille d’accueil de Juana dut loger chez eux un capitaine, Montfieri, un italien engagé dans les troupes françaises.

De la s’ensuivit toute une série d’événements qui aboutirent à ce que la jeune et pure et vertueuse Juana dut épouser non pas Montfieri, dont elle était tombée amoureuse mais qui fut trahie, mais un autre soldat français, Diard. Ici se termine cette première partie, mi-aventureuse mi-fantastique, plutôt amusante dans la forme et plaisante à lire sans qu’on la prenne au sérieux.

Diard emmène son épouse à Paris. Ici commence la seconde partie du récit. Elle devient étude de mœurs, plus intéressante, et qui se finit tragiquement. Juana et Diard, nouvellement installés à Paris, riches de la dot de Juana, s’essaient, avec leur richesse, d’intégrer la haute société parisienne. Mais la richesse ne fait pas tout. Diard n’est pas naturellement un être rompu aux usages et aux codes de cette société et commet faute sur faute, ce qui le fait mépriser de cette société qu’il souhaitait tant se faire adopter. Juana le voit et le comprend et en souffre. Elle seule conserve le respect des riches bourgeois, nobles, parvenus et autres aristocrates. Mais étant vertueuse et désirant continuer de l’être, elle ne fraie pas avec ce milieu. Balzac raconte très bien les orientations psychologiques différentes des deux époux, qui les amènent peu à peu, confrontés aux déceptions continuelles qu’ils subissaient de la part de la haute société, à prendre des chemins différents, quoique restants toujours mariés. Diard se tournera vers le jeu où il gagnera et perdra des fortunes et Juana se dévouant exclusivement à l’éducation de ses deux enfants. La question finale de la nouvelle est : Juana réussira-t-elle à être vertueuse jusqu'au bout ? La fin apportera une réponse qui pourra être oui ou non selon la sensibilité du lecteur.

Une première partie où l’action prime et une seconde partie où l’analyse sociale et psychologique prime. La fin réunira ces deux tendances du récit pour nous offrir une issue tragique.

Une nouvelle donc en deux parties, où j’aurai préféré la seconde, mais l’ensemble est d’une très bonne facture quoique déséquilibrée. Pas forcément indispensable mais on passe un très bon moment de lecture.

Cédelor - Paris - 52 ans - 18 octobre 2024