Les rois et les voleurs
de Muriel Cerf

critiqué par Catinus, le 25 mai 2012
(Liège - 73 ans)


La note:  étoiles
Spécialiste du dérapage sur la réalité

Ce livre, s’il peut être qualifié de para-autobiographique, est sans doute fortement romancé par l’auteur qui se qualifie elle-même : » moi, spécialiste du dérapage sur la réalité ».

Paris début des golden (sixties) pour Lydie, le temps de la classe élémentaire. Paris, 1963, toujours Lydie, 12 ans, la narratrice et sa meilleure amie Polline, 13 ans et demi. Les parents de part et d’autre, un peu dépassés par les évènements à savoir les comportements des deux gamines (pardon jeunes filles). « On avait vendu aux parents une poupée qui boit, mange, marche et parle avec le mode d’emploi mais tout fonctionnait à l’envers. »
La tante Ro qui habite près de la mer, soupçonnée d’avoir empoisonné son mari « connaissez-vous, mademoiselle, le chemin de la mer ? » Les trois sorcières, Baba Yaga, la Russe, Genghivane, la Tibétaine, Marila, la Brésilienne, s’efforçant chacune de séduire Lydie.
Huguette, la pute et Abdel, le mac, rue Richer sans oublier Angelo …

Ce bouquin est truffé de références à la mythologie : grecque, romaine, indoue, sud américaine. Et bien malin celui qui pourra en savourer toutes les subtilités… D’ailleurs, peut-importe, car vous le savez, avec Muriel Cerf, on flirte sans arrêt avec la poésie, de la poésie en prose soit, mais c’est dans de l’éthéré. Toujours.

Tant de péripéties. Même des péripatéticiennes, au « Doux Logis « par exemple en compagnie de la narratrice et un riche polonais, dans un claque donc ? Rôôô ! Et toute une pleine page sur les baisers, plein-plein-plein …Ou encore la description tout en finesse, en minutie du visage de Polline.
Il ya vraiment des pages d’anthologie, là-dedans ! ! !


Extraits :

- (…) on n’avait jamais quitté la France mais, déjà, on se sentait partout chez nous comme les rois, les filles et les voleurs. ( Balzac)

- Faire une passe, c’est le rêve de toutes les femmes, au fond. Si vous saviez ce qu’on rencontre comme bourgeoises mariées dans les hôtels.

- (… ) je décidais de me livrer à mon exercice de concentration favori : celui de fixer mon attention sur une image jusqu’à ce que je rentre dedans et me dissolve complètement derrière la barrière des apparences (…)

- Et la chienlit commença par une visite chez le toubib qui, après m’avoir plongé son spéculum dans le minou avec autant de délicatesse que s’il débouchait une bouteille avec un décapsuleur, conclut qu’il n’aurait pas juré sa tête sur le billot que j’étais encore pucelle.

- Connaissez-vous, mademoiselle, le chemin de la mer ?