Bienvenue sur Deliciosa
de Bernard Viallet

critiqué par Tony, le 19 avril 2012
( - 59 ans)


La note:  étoiles
Suis-je moi aussi le bienvenu sur Déliciosa ?
Un adage dit qu’il faut toujours se méfier de ce qu’on demande car on risque de l’obtenir !
Je ne me rendais pas bien compte de ce que j’écrivais, lorsque, après avoir vu l’annonce de parution du dernier Viallet, j’ai posé cette question à l’auteur : « Suis-je moi aussi le bienvenu sur Déliciosa ? ».
Chaque roman de Bernard Viallet aborde des sujets différents. Celui-ci est un roman d’anticipation. Leurs dénominateurs communs sont l’amour de la liberté, le sens du devoir, la méfiance de l’encadrement étatique, la place de l’individu face au système.
Bernard Viallet écrit bien ! Pas d’exhibitionnisme littéraire pour surévaluer la qualité de sa plume mais lucidité et réalisme du langage écrit. J’aime !
Le suspens est rondement mené jusqu'au dénouement que je n'avais sincèrement pas vu venir et qui ne se prive évidemment pas de dresser un portrait de certains maux typiques de notre société et des possibles dérives.
Pile au rendez-vous, ce roman d'anticipation accomplit son devoir d’extrapolation sur l’évolution de la nature humaine avec ses inexorables dualités bien/mal, courage/lâcheté, abnégation/cupidité, domination/soumission et bien entendu, l'évolution des mœurs!
Oui, l’italo-belge que je suis reprochera ce vice quasi unanime des contemporains d’outre-Quiévrain d’ajouter des abréviations pour désigner (ou officialiser) des « organismes » franco-français que vous seuls, amis de l’hexagone, ne pouvez déchiffrer. Certes, l’auteur prend la précaution de les décoder, prévoyant qu’il sera lu au-delà des frontières...
Si j’insiste sur ce qui semble un détail pour vous Français, c’est par amour pour votre littérature, souhaitant qu’elle tienne un peu plus compte du reste du lectorat francophone hors France.
Autre petit reproche : par son essence, l’histoire nous plonge dans un monde imaginaire qui ne manque pas de crédibilité. Les noms des protagonistes sont quelques fois inventés avec ce que j’appellerai des clins d’œil aux réalités contemporaines. Dès la première phrase : « (…) le spatioport de Boissy Charlton Easton…». Vous me direz que, dans le même style, juste après la seconde guerre mondiale avec « 1984 » ce n’est pas par hasard qu’Orwell crée un personnage prénommé Winston… Considérons donc avec bonne humeur que c’est une petite manie compréhensible chez les « anticipateurs » dont la fantaisie fait d’incessants appels du pied à la réalité sociopolitique contemporaine.
Bon, il est temps de cesser de chercher des poux à « Bienvenue sur Déliciosa » !
Je conseille pleinement la lecture ! Les surprises et les trouvailles s’enchaînent, l’exotisme des situations garantit un dépaysement plaisant, cocasse et parfois salace qui tient en haleine. Le tout, promené par une lisibilité au style voluptueux.
Lu avec le même plaisir que « La possibilité d’une île » de Michel Houellebecq ! Quoi ?
Une histoire intrigante et bien construite 8 étoiles

Bienvenue sur Déliciosa ! Son complexe « Paradise Resort » offre à ses joyeux résidents toutes sortes de délices ! John, Eva, Tom et Lilia font partie des « bien chanceux » qui ont réussi chacun à se procurer (ou à se faire offrir) un des rares billets disponibles – et hors prix - pour un voyage vers la planète Déliciosa, un aller simple, pour un séjour inoubliable, placé sous le signe de la détente. Mais ils s’apercevront rapidement que chez leurs hôtes, l’image de la beauté et du bonheur est une obsession qui se cultive par la goinfrerie… transformant ainsi leur rêve de farniente en une astreignante corvée de bouffe.

Que cache en réalité ce centre de vacances derrière ses aspects paradisiaques ? Pourquoi les touristes y sont-ils gavés et engraissés comme des oies ? Pourquoi les résidents sont-ils observés jour et nuit par des caméras de surveillance ? Pourquoi n’est-il pas possible de sortir du complexe ?

L’auteur Bernard Viallet emmène son lecteur au cœur d’une histoire pour le moins intrigante et très bien construite, tout en maintenant un suspense continu du début à la fin. Tout en suivant le parcours de John, Eva, Tom et Lilia, on ne pourra manquer de s’interroger sur leur sort, et de compatir aux épreuves qu’ils affronteront sur Déliciosa, mais aussi de rire des situations plutôt cocasses et peu ordinaires dans lesquelles ils se trouveront parfois. On appréciera aussi de les voir se rebeller contre un système que trop tyrannique et arbitraire.

La plume de Bernard Viallet est fluide et voluptueuse. Son style est simple, mais efficace, car il va droit au but sans se perdre dans des descriptions ou explications superflues. Dès les premières pages, on est dans le bain. Bernard Viallet dit ce qu’il a à dire, et le fait même avec humour et ironie. J’aime bien ça. De plus, ce récit original porte une réflexion intéressante sur la place de l’être humain au sein du système. Les noms choisis pour les personnages ou les lieux peuvent faire sourire le lecteur, mais pour ma part, j’en ai apprécié leur double-sens, ainsi que les clins d’œil à d’autres références.

Malgré ses nombreuses qualités, ce livre n’est pas parfait : il subsiste encore quelques fautes d’orthographe. Et à mon goût, il y a un peu trop d’anglicismes, ce qui m’a parfois fait grincer des dents. Du point de vue de la narration, le seul petit reproche que j’aurais à faire, concerne la présentation des quatre personnages principaux. Au lieu d’avoir à lire en bloc le curriculum vitae de chacun, j’aurais préféré découvrir leur vécu au gré de l’histoire, pas à pas.

En conclusion, j’ai bien apprécié cette lecture, très exotique, originale et pour le moins intrigante. De bout en bout, je n’ai cessé de m’interroger sur le rôle de Déliciosa, allant jusqu’à échafauder toutes sortes de théories. Le dénouement n’est pas celui auquel j’avais pensé, mais il m’a beaucoup plu ! « Bienvenue sur Déliciosa » est un ouvrage que je recommande chaudement aux amateurs du genre « science-fiction ».

Koyolite Tseila - - 14 ans - 16 février 2013