L'Etat importé
de Bertrand Badie

critiqué par Paquerette01, le 1 mars 2012
(Chambly - 53 ans)


La note:  étoiles
l'occident: maître du monde?
Depuis les lumières, la domination politique exercée par l'Occident sur les "pays du sud" s'accompagne -quand elle ne la précède pas ou ne la prépare pas- d'une domination culturelle plus forte encore. La décolonisation, loin d'avoir fourni aux sociétés du tiers monde le moyen de trouver une organisation qui corresponde à leurs traditions, a même fortement accentué ce phénomène.
Derrière une rhétorique de rupture, les leaders du Sud se font les importateurs de notre droit, de notre modèle de développement, de notre forme de démocratie représentative. Ces princes, leurs entourages et leurs intellectuels pensent, agissent, construisent largement en fonctions de nos catégories.
Mais hormis peut-être au Japon, cette occidentalisation imposée échoue parce que la greffe est impossible. Cet échec rend largement compte de l'évolution du monde contemporain depuis 1945. Il éclaire l'histoire de l'Inde comme celle du monde arabe et de l'Afrique noire, ou encore de l'Amérique latine et de la Chine, voire les incertitudes propres au Japon d'aujourd'hui. En dépit des espoirs que les élites ont mis en elle, l'occidentalisation, manquée, est cause de multiples traumatismes sociaux et facteur de désordre dans les relations internationales.
La cacophonie d'un monde qui ne parvient ni à unifier ses règles du jeu ni à faire leur place aux différences constitue sans nul doute la plus lourde des menaces qui pèsent sur l'humanité.