Du vent, Gatine !
de Jacques Bertin

critiqué par Sissi, le 13 février 2012
(Besançon - 54 ans)


La note:  étoiles
Ma cabane au Canada...
C’est un paquet de lettres, retrouvé dans un grenier à Chalonnes-sur-Loire, qui est à l’origine de ce livre.
René Gatine, chalonnais, a quitté les bords de Loire et le vent de galerne en 1891 pour partir s’installer au Canada, dans les grandes prairies de l’Ouest, en Alberta plus précisément, où il vécut quelques cinquante années dans un ranch, « La Briançais », avec sa femme et ses enfants.
On lui souhaita bon vent. Et pourtant, il ne fit que tourner, ce vent… « Qu’il hurle, le vent ! », il hurle tellement qu’il provoque des incendies dévastateurs. Le sécheresse ruine les récoltes. Les hivers rigoureux et interminables tuent les bêtes.
Tant bien que mal, les Gatine s’essaieront à divers élevages et à l’agriculture. Mais las, ils finiront leur vie en Floride, ruinés et séparés de leurs enfants.
De 1891 à 1944 arriveront des lettres en France, et ce sont ces missives, retrouvées par hasard, qui forment la trame de cet essai.

Mais est-ce un essai ? Jacques Bertin définit son ouvrage comme tel, pourtant rien n’est moins sûr, et c’est peut-être justement cette confusion des genres qui rend la lecture par moments un peu opaque : si les lettres ne constituent aucunement la base d’un roman et sont utilisées dans une perspective réflexive, si la carte, les photos et les données politiques sont introduites judicieusement à des fins informatives et instructives, la dernière partie (moment qui relate le voyage de Jacques Bertin sur place et sa rencontre avec une partie de la descendance des Gatine) relève plus de l’autobiographie que de l’essai.
On aurait aimé que le narrateur s’efface un peu plus derrière l’histoire des ces pionniers, derrière l’Histoire tout court.
Qu’il ne fasse pas d’Anne une héroïne, tout du moins qu’il nous laisse le soin de l’ériger ou non comme telle.
Anne, fille de René et d’Aimée Gatine, farouche et volontaire, cavalière émérite, qui n’est jamais allée à l’école, faute de cours dispensés en français, est effectivement très emblématique dans cette famille de baroudeurs, où le mal du pays se fait malgré tout souvent sentir.

Un beau voyage quand même.