Milady: Suivi de Monsieur Zéro
de Paul Morand

critiqué par Jules, le 6 septembre 2002
(Bruxelles - 79 ans)


La note:  étoiles
Une très belle écriture, une histoire agréable à lire
Le commandant Gardefort est un de ces officiers de garnisons qui ne dépassent pas un certain grade indépendamment de leurs qualités. La guerre 14 ne lui a pas permis quelques actions d’éclats et il ne fait pas partie du cercle de ceux qui ont les relations qu'il faut. Il est cependant connu pour sa très grande capacité à reconnaître au premier coup d’Ïil les qualités d'un cheval.
Gardefort a fait toute sa carrière à Saumur mais, lassé de ne pas être reconnu, donne sa démission. Il ne quitte pas la ville pour autant. Il ne pourrait se passer du rythme de la garnison, ni de l'odeur du cheval qui n'abandonne jamais certains quartiers. Sa femme, plus jeune que lui, l’a quitté.
Surprenant ?… Pas tellement quand on apprend qu'en pleine nuit il lui arrivait de la réveiller en lui courbant la tête en arrière, la tenant violemment par les cheveux et lui hurlant à l’oreille : « Pourquoi ton cheval a-t-il levé le cou ?. Réponds !… Dis-moi pourquoi ?… »
Gardefort s’est acheté une superbe jument au joli nom de « Milady » Il est immédiatement flagrant que ses rapports avec ce cheval n’ont strictement rien à voir avec ceux qu'il pouvait entretenir avec sa femme !
Jugez-en : «
Les relations affectives qui s'étaient établies entre le commandant et son cheval n’avaient rien de ces effusions dévoyées, de ces léchages de museau, de ces caricatures d’amour, de tous ces résidus pervers de sentiments humains qui président aux rapports des vieilles filles et de leur pékinois. C'était d'abord un combat, où la jument savait qu'elle succomberait, où elle désirait d'ailleurs succomber, une lutte qui commençait dans l'espièglerie, dans la ruse et se continuait dans la rage, pour se terminer dans une sorte de pâmoison soumise, de détente complète, où l'un et l'autre trouvaient leur plaisir. »
Tous les jours Gardefort monte sa jument et le plaisir, que dis-je, l'obsession de sa vie est là ! Mais voilà, le divorce d'avec Madame coûte cher et le commandant pourra-t-il se permettre le luxe de garder sa « Milady » ?
Paul Morand a une écriture éblouissante et nous donne ici un très bon exemple d'une étude psychologique poussée.
Une histoire qui se lit très facilement, très agréablement. Un très bon moment.
Je n’en dirai pas autant de la seconde nouvelle contenue dans ce livre.
« Monsieur Zéro » est l’histoire, un peu lassante et sans charme, d’un très riche banquier américain qui fait faillite dans les années trente. Celle-ci entraîne d'autres grosses entreprises dans son sillage et comme, en plus, elle est frauduleuse, Monsieur Zéro préfère tenter de disparaître.
Mais l'Amérique ne l'entend pas ainsi et use de tout son poids pour obtenir son extradition partout où il se réfugie. Echappera-t-il ?. Echappera-t-il pas ?. Je m'en fous !. Ce Monsieur Zéro n'a pas beaucoup d’intérêt et il finit par me bassiner à geindre comme un sale gamin qui n’admet pas qu'il a triché.