Trudeau et ses mesures de guerre vus du Canada anglais
de Guy Bouthillier, Édouard Cloutier

critiqué par Dirlandaise, le 26 décembre 2011
(Québec - 69 ans)


La note:  étoiles
"Si un homme sort un couteau..."
Le 16 octobre 1970, le premier ministre du Canada Pierre Elliott Trudeau décrète la Loi des mesures de guerre à la grandeur du pays. Il justifie une telle mesure d’exception par la crainte d’une insurrection armée de la part des membres du FLQ au Québec suite à l’enlèvement du diplomate britannique James Richard Cross et du ministre du travail Pierre Laporte. Cette décision prive alors tous les citoyens canadiens de leurs libertés civiles et donne les pleins pouvoirs au gouvernement fédéral d’arrêter, d’incarcérer et de détenir toutes personnes soupçonnées de représenter une quelconque menace pour la sécurité d’État. Trudeau ne se prive donc pas d’user de ces pouvoirs illimités pour faire arrêter et emprisonner près de 500 personnes sans leur donner la possibilité de faire valoir le moindre droit et de profiter de la moindre assistance juridique. La grande majorité des Canadiens anglophones approuve la décision de Trudeau mais une petite minorité s’indigne devant un tel radicalisme. Ce livre est une anthologie d’articles et de textes d’historiens, de ministres, de députés, de journalistes, d’écrivains, d’universitaires et de chercheurs qui se sont tous insurgés devant le fait que Trudeau ait choisi de s’attaquer aux droits et libertés fondamentales des citoyens canadiens afin d’intimider et surtout, d’assouvir sa soif d’asséner une bonne raclée aux indépendantistes québécois qu’il exècre depuis fort longtemps.

Ce livre revient sur cette période très sombre du régime Trudeau en mettant en lumière, par le biais des différents témoignages présentés, le fait que le premier ministre et ses conseillers n’ont jamais dit la vérité à la population mais se sont retranchés derrière de faux prétextes et de fausses rumeurs afin de justifier une telle mesure en laissant croire à la population que le FLQ (Front de libération du Québec) disposait d’un arsenal impressionnant et de plusieurs milliers de membres prêts à renverser le gouvernement par la force et la violence.

Lecture passionnante mais les articles racontent presque tous la même chose et cela devient redondant à la longue. Pourtant, comment ne pas être captivée devant tant de fausseté et d’hypocrisie de la part des dirigeants fédéraux et surtout devant le courage dont ont fait preuve ces différentes personnalités appartenant au Canada anglophone qui ont refusé de suivre le gouvernement Trudeau dans son délire et son radicalisme tyrannique. Tous dénoncent la violence et la brutalité dont a fait preuve Pierre Elliott Trudeau en promulguant une loi aussi lourde de conséquences et dont la population n’a jamais bien réalisé toute la portée.

Afin de ne pas oublier et surtout, afin de pouvoir un jour faire la lumière sur toute cette période de troubles et de terreur qui a secoué le Québec et tout le Canada, il faut lire ce livre. Il faut aussi le lire afin de constater combien les libertés individuelles sont fragiles dans ce pays habité par deux entités distinctes autant par la langue, la mentalité et la culture. Il faut lire les textes de Nick Auf Der Maur, Robert Fulford, Jack Granatstein, John Conway, Hugh Segal, Thomas Berger et Tommy Douglas pour pleinement réaliser toute l’ampleur du désastre humain et social de cette période, l’une des plus sombres de notre histoire.

« À Montréal, en cette terrible première semaine de la Loi des mesures de guerre, des centaines de Canadiens ont été privés arbitrairement de leurs droits – leur droit à la liberté, leur droit à un avocat, leur droit de savoir pourquoi ils étaient emprisonnés, leur droit de communiquer avec leur famille et leurs amis. Ils furent dépouillés par décret du Cabinet fédéral, de tous les droits personnels que des centaines d'années d’histoire leur avaient conférés. » Jack Granatstein

« Octobre a été l’occasion d’un affrontement entre deux entités historiques, le Canada et le Québec, et, en tant que citoyens de ces entités, les Québécois et les Canadiens, chacun pour eux-mêmes, devront mener un travail de mémoire et de réflexion. Cette exigence s’applique en particulier aux indépendantistes québécois et à leurs chefs : comment continuer à inviter une population à faire confiance à l’avenir, si l’on demeure soi-même timoré vis-à-vis du passé, surtout si l’événement sur lequel on fait ainsi l’impasse est étroitement lié au projet d’avenir que l’on propose au peuple ? »