Est-ce que ce bruit dans ma tête te dérange ?
de Steven Tyler

critiqué par Numanuma, le 13 novembre 2011
(Tours - 51 ans)


La note:  étoiles
Le grand cirque rock n roll
Après Clapton, après Keith Richards, c’est au tour de Steven Tyler, un des plus grands chanteurs de rock qui soit, de s’essayer à l’exercice délicat de l’autobiographie. Je ne sais pas si Tyler a lu les deux bios que je viens de citer mais la sienne prend sa source chez Rousseau : il déballe tout sur lui, c’est normal, il est son sujet préféré, et il ne cache, à priori, pas grand-chose.
Autant le dire, son style d’écriture est à l’image du performer qu’il est sur scène : virevoltant, coloré, magnétique et déroutant : si le déroulement de sa vie est globalement linéaire, les retours et les avances sont nombreux, il s’adresse souvent au lecteur directement, part dans des digressions… On est loin de la sobriété de Clapton ! Il faut dire que l’autobiographie, c’est du pain béni pour un type aussi narcissique. La dernière photo présentée dans le bouquin est celle qu’il préfère entre toutes : c’est lui en gros plan avec tout le reste du groupe derrière et au fond, sur la scène, l’écran géant avec Tyler dessus !

Pour ceux qui ne connaissent pas Aerosmith, ça doit bien exister, et donc son chanteur, Steven Tyler, commencez par vous procurer le coffret Pandora’s Box, histoire d’avoir une idée de quoi on parle. Pour les autres, c’est par là que ça se passe.
Depuis son enfance dans le Bronx jusqu’aux réceptions à la Maison Blanche en passant par toutes les salles de concert du monde, l’histoire de Steven Tyler est celle d’un gamin américain un peu trop grande gueule pour passer inaperçu et un peu trop fan de l’interdit pour finir derrière un bureau. Papa musicien, une maman pas du genre à respecter trop de règles, un milieu social somme toute peu favorisé mais qui lui offrira tout ce dont en enfant a besoin et même un peu plus puisqu’il profitera des connaissances pianistiques de son père pour parfaire son goût pour la musique. Tyler revient souvent sur ce qu’a pu lui apporter son père dans sa carrière. Par exemple, alors qu’il a opté pour la batterie, le chant viendra plus tard, s’est son père qui lui offre l’opportunité de l’accompagner sur scène pour la première fois.
S’il est acquis que le gaillard sait y faire en musique, j’ai eu l’impression que c’était lui le directeur musical du groupe, comme si ses 4 compères ne savaient pas jouer. Il aurait appris à Joey Kramer à jouer de la batterie correctement, c’est lui qui guidait les autres dans l’écriture des morceaux, etc. …

Là, le fan du groupe doit commencer à avoir des sueurs froides. Si vous avez trouvé que Keith Richards a été vachard avec Mick Jagger, ici, c’est carrément la guerre ! Certes, Tyler parles souvent des membres d’Aerosmith comme de ses frères. Ok. Mais tout le monde en prend pour son grade, Joe Perry en tête alors que c’est lui qui balance les riffs qui font la légende du groupe. Tyler se considère comme le feu dans le tandem Toxic Twin qu’il forme avec Perry qui serait, lui, la glace, le cowboy imperturbable sur qui tout glisse. Il l rend responsable de biens des mots qui ont miné le groupe jusqu’à la séparation après l’album, franchement pas terrible, Night in the rust (avec son jeu de mots).
Cependant, Tyler ne s’exempte pas de certaines responsabilités à caractère opiacées… Oui, il en a pris, plein, trop, en poudre, en pilules, en shoots, en cigarette, l’alcool aussi et les filles, on en parle même pas. Mais tout le monde faisait pareil. Rock n’ roll circus or what ?! Sauf que lui en faisait toujours un peu plus et donc à chaque fois trop ! On ne fait pas 6 cures de désintoxication pour le plaisir…
Seulement, il en est sorti. Pas les autres ou du moins pas en même temps. Difficile de rester clean quand tes potes continuent à s’assaisonner en douce et en plus, pensent, à chaque incident, que tu t’es repoudré le nez en douce, ni vu ni connu ! Dans son actualité très récente, j’ai lu qu’il a glissé dans sa salle de bain, résultat, deux dents et une côté cassées. Un, il n’est plus tout jeune le bonhomme mais il bande encore, deux, toute ressemblance avec un guitariste tombé d’un cocotier ou d’un chanteur français blond électricien à ses heures mais pas les bonnes, est fortuite et trois, je ne serais pas étonner que cela remette en cause la reformation du groupe dont il se serait fait jeter sans même le savoir…

Pour trépidante qu’elle soit, cette lecture n’est pas porteuse de beaucoup de nouveautés. Au contraire, il faudrait désormais une bio de chacun des autres membres du groupe pour avoir une idée d’ensemble un peu plus cohérente de l’histoire d’Aerosmith. Cependant, j’ai repéré une perle, page 305 : « Painted on my heart aurait dû être chantée par Johnny Hallyday ». Je me suis bien évidemment étranglé en lisant ça mais heureusement, ça ne s’est pas fait et notre Jojo n’aura pas massacré un morceau de Tyler qui se débrouille très bien tout seul depuis l’album, pourtant excellent, Get a grip. Car oui, selon lui, des morceaux comme Jaded, I don’t want to miss à thing ou Amazing sont des bons morceaux, bien au-dessus de ce qu’on peut entendre à la radio. Sur le dernier point, je suis d’accord mais tous ces titres sont à mille coudées en dessous du niveau des morceaux classiques du groupe, soit ceux enregistrés depuis le premier album jusqu’à l’album Draw the line. Après, ça part complètement en sucette puis ça repart mieux qu’un Mars à partir de l’album Permanent Vacations. Après Get a grip, l’œuvre des Aerodupont de Boston est en dents de scie.

Si le fan du groupe trouvera son beurre là-dedans, je ne suis pas sûr qu’un néophyte sera satisfait cependant, dans ces pages, on trouve beaucoup de passion, principalement quand Tyler raconte la naissance de certains morceaux avec beaucoup de détails et pas mal de folie. Je ne suis pas franchement convaincu que sa bio aura le même succès que celle de Keith alors que leurs trajectoires sont comparables mais elle possède un charme attachant.