Le désespoir du singe, tome 3 : Le dernier voeu
de Jean-Philippe Peyraud (Scénario), Alfred (Dessin)

critiqué par Shelton, le 3 novembre 2011
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
Le dernier volet d'une trilogie mythique
Nous plongeons de plus en plus vide dans le désespoir, l’absurde et la slavitude. Oui, dans ce monde en pleine révolution, univers dans le quel les auteurs nous ont immergés depuis le départ, plus rien n’est conforme à la logique cartésienne. Explosion, terreur, folie, tout est là pour que nos personnages soient de plus en plus extrêmes dans leurs réactions. D’ailleurs, comment pourraient-ils rester humains et paisibles dans un tel monde ?

Il y a aussi la violence de certaines scènes. Quand je dis violence je ne veux pas parler de cette violence d’aujourd’hui où les coups et le sang sont les seuls aspects factuels de ce qui est imposé aux personnages. Je parle ici d’une violence beaucoup plus forte d’autant plus agressive qu’elle n’est pas dessinée de façon réaliste et qu’elle est accompagnée du point des mots, des sentiments… Quand Josef s’écrie « Je suis désolé », la tête de Joliette porte tout le malheur du monde et le lecteur a envie de fermer l’album et pleurer… Et pourtant nous ne sommes qu’à la moitié de ce dernier volet de l’histoire…

Le lecteur attentif qui a un minimum de culture slave sait qu’il faudra que les affronts, les ruptures et les personnages soient passés et lavés dans le sang. Toute tragédie doit se finir dans la mort, il n’y a pas d’autre issue possible. Mais qui va mourir, qui doit disparaître pour que le monde puisse reprendre son cours ? Accident de train, attentat, assassinat au poignard, chute de l’immeuble par la verrière explosée… tout arrivera pour que la paix puisse s’installer…

Enfin, le calme est là, les survivants se remettent de leurs émotions…

Oui, je ne peux pas, je ne dois pas, vous en dire plus. La fin est terrible, le lecteur va avoir, une fois de plus, le cœur brisé… Depuis le début on savait bien que tous les personnages ne pourraient pas vivre heureux, avoir beaucoup d’enfants et faire prospérer les affaires familiales en développant par ailleurs leur art. Il ne pouvait qu’y avoir de la casse et elle aura bien lieu.

Cette série est vraiment du grand art narratif, un scénario très bien ficelé qui s’insère dans la tragédie slave et que Tchekhov lui-même n’aurait pas renié. Une narration graphique dynamique, efficace et tonitruante qui sait, aussi, laisser passer le sentiment, la tension psychologique… Une bande dessinée qui restera, n’en doutons absolument pas, dans l’histoire du genre…
Du sang sur la neige 9 étoiles

A l’image de ce train illustrant la superbe couverture, cette saga à la fois fiévreuse et ténébreuse connait son apothéose dans ce troisième et dernier tome, après nous avoir embarqués à tombeau ouvert vers des horizons rougeoyants d’aventures périlleuses et de romanesque débridé.

Cette bande dessinée très riche allie avec grand talent l’aventure, la politique, le monde des arts et le romanesque : l’histoire d’un amour passionné entre une pasionaria et un peintre raté, amour menacé par la folie d’un régime tyrannique. Une ode à la vie et à la liberté, tout simplement. Je regretterais seulement le manque d’émotion (sauf à la fin), peut-être dû au caractère un peu simpliste des personnages. Mais que l’on ne s’y trompe pas : cette BD demeure un petit bijou à découvrir absolument, tant par son graphisme que par la qualité de son scénario.

Et encore bravo à Shelton pour ses très bonnes critiques de cette trilogie qui sans aucun doute fera date.

Blue Boy - Saint-Denis - - ans - 22 janvier 2014