L'alphabet des femmes
de Georgi Gospodinov

critiqué par Débézed, le 10 octobre 2011
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
Histoires caustiques
Dans ce recueil de vingt-deux courts récits burlesques, drôles, comiques, fantastiques, qui parlent d’amour, de train et de gare, et de toutes les petites choses de la vie qui perturbent la gent humaine, Guéorgui Gospodinov qui pourrait placer ces textes dans le sillage de « Les récits de Tcherkaski » de Yordan Radchikov, explore l’espace entre la vie médiocre qu’on mène et la vie dont on rêve en manipulant ses personnages pour qu’ils essaient de vivre leurs rêves malgré la dictature de Jivkov ou pendant la déconfiture qui suivit la chute de ce dictateur.

A travers ces récits, Gospodinov feint une certaine bonne humeur mais son humour est trop grinçant, trop cynique, et son ironie est un peu trop sarcastique, sardonique, tendant vers l’autodérision, pour que finalement ces textes ne sombrent pas dans un certains pathétisme qui évoque l’absurdité de la société aux prises avec tous les petits riens qui conditionnent la vie de tous les jours et dessinent l’avenir. C’est un peu la démonstration de l’effet papillon.

Ces récits, même s’ils sont très caustiques, sont écrits dans un style très alerte à base de phrases courtes, percutantes qui donnent du rythme aux textes qui s’achèvent dans des chutes toujours judicieuses et surprenantes, enchantant le lecteur comme certaines belles pirouettes aussi bien venues que quelques adroites mises en abyme. Ce style, cette écriture très personnelle, servent particulièrement bien le regard acéré que l’auteur jette sur la société Bulgare de son époque mais aussi sur la nature humaine qui tombe infailliblement dans tous les travers, même dans ceux dans lesquels ne sombreraient pas les cochons, c’est sans doute pour cela que « le paradis est réservé aux animaux. Sinon, il y aurait trop de massacres et de sang. »

Vingt-deux jolis textes, drôles, enlevés qui devraient provoquer le rire sans retenue mais qui ressemblent, tout de même, un peu trop à la partition du clown triste pour que le lecteur n’éprouve pas un pincement au cœur.