Fragments d'un paradis: Les anges
de Jean Giono

critiqué par Tistou, le 25 septembre 2011
( - 68 ans)


La note:  étoiles
“Les Anges”
Ce texte (roman ?) daterait de 1940, dicté par Jean Giono et édité plus tard, en 1948. « Fragments d’un paradis » dénote de la production habituelle de Giono en cela qu’il relate une … expédition marine, celle du voilier « L’Indien », qu’on situera au début du XXème siècle. Plutôt expédition scientifique, encore qu’on ne sache pas précisément ce que vont chercher ces hommes. Quoique ça semble être plutôt la recherche d’une vraie vie, de la poésie, tels ces propos du capitaine à ses officiers :

« - « Tourner sur nous-mêmes, comme des toupies, dit-il, se passionner pour des régimes politiques la plupart du temps constitués par les plus infâmes assassins, les plus infâmes, puisqu’ils se mettent d’eux-mêmes en dehors de tout châtiment et font les lois pour se permettre d’agir sans danger. Epuiser son sentiment de curiosité, cette chose si fraîche et si apéritive, sur les minuscules objets qui sont proposés par le soi-disant progrès de la civilisation. Tourner en rond dans les interminables couloirs déserts de cette petite partie mystérieuse de la terre qui est constituée par les continents habités, et surtout accepter de perdre le contact avec le vrai monde, est-ce que cela ne vous a pas conduit à cette aridité pleine de sarcasmes et de dégoût dans laquelle vous avez dissimulé peut-être (je connais mal vos vies précédentes) vos grands sentiments d’espace et de lumière ?». »
Giono en pleine mer, donc, à la conquête d’océans peu explorés … inattendu, non ? On est aux confins du Jules Verne de « Vingt mille lieues sous la mer », du Conan Doyle de « Le monde perdu », le tout mâtiné d’une sacrée dose de poésie, loin de la Provence et des champs de lavande ! Jean Giono semble maîtriser parfaitement la chose maritime, le langage maritime, en tout cas il fait bien illusion. Mais c’est pour mieux nous emmener dans des délires poétiques et philosophiques.
Cet équipage va véritablement faire des rencontres … d’au moins « du troisième type », entre des oiseaux aux plumages toujours plus éclatants - si pas fluorescents - un calamar géant qui convoque la gent aviaire – des milliers d’oiseaux qui obscurcissent le ciel – pour venir le nettoyer lors de sa remontée en surface, des raies géantes, …
Mais Giono, imperturbable, nous fait dépasser les caps improbables, on ne sait pour où et on ne le saura pas. Seul le capitaine pourrait le savoir et il ne le dit pas. Car « Fragments d’un paradis » n’est manifestement pas terminé. Ces fragments seraient constitués d’un ensemble de notes, d’ébauches, en préparation d’une œuvre poétique ?
Au bilan, une lecture étrange et hors du temps, aux franges de l’onirisme poétique.