Chroniques du 87e district : Faites-moi confiance - Victime au choix - Crédit illimité - Souffler n'est pas tuer - Soupe aux poulets - Pas d'avenir ... -
de Ed McBain

critiqué par Noir de Polars, le 5 septembre 2011
(PARIS - 56 ans)


La note:  étoiles
Soupe aux poulets... et quelques autres
Cette édition regroupe quelques ouvrages d'Ed Mac Bain, dont Killers'Wedge, littéralement "la cale du tueur". Le traducteur a bizarrement transformé ce titre finalement explicite (explicite quand on connait la fin...) en "Soupe aux poulets": il aurait pu être mieux inspiré!
Ed Mac Bain, c'est le papa de Steve Carella, un inspecteur au grand coeur et à l'épouse sourde et muette qui bosse pour le 87ème district de New York.
Ce recueil de très courts romans regroupe donc les enquêtes les plus connues de notre inspecteur.: il s'agit de romans dits "de gare", sans prétention aucune, qu'on lit rapidement et qui ne laissent aucun souvenir particulier, à part... A part l'atmosphère new-yorkaise particulièrement bien rendue, à part la langue, brute, sans aucune fioriture.
Mais en lire un, c'est les lire tous tant ils sont construits sur le même modèle.

"Soupe aux poulets" est un peu différent (juste un peu, hein, n'allez pas imaginer le graal) car il conte deux histoires en une: une enquête (bête à pleurer) et une prise d'otages (beaucoup mieux réussie): on passe ainsi, au fil des pages, d'un conte à un autre, les deux finissant par se rejoindre dans les trois dernières feuilles.
Le style peut plaire ou non, c'est selon...

Extrait d'un dialogue:
- 87ème, inspecteur Kling.
- Salut.Carella est là?
- De la part de qui?
- Atchison, du labo. Où est Carella?
- Au-dehors. Je peux prendre la commission?
- Ouais, probable. Comment c'est votre nom, déjà?
- Bert Kling.
- Je vous connais pas.
- Qu'est-ce que ça peut bien foutre?

Vous avez compris l'ambiance? Et ce dialogue est très représentatif du bouquin...
Gros avantages d'Ed Mac Bain:
- ne pas nécessiter d'effort de réflexion;
- permettre un relâchement des neuronnes après une dure journée;
- peut se lire (c'est d'ailleurs recommandé) en bus, métro, R.E.R
Victime au choixou, être dans le bain, jusqu’au cou… 7 étoiles

Avec cet opus je retrouve le genre d’enquête qui me plait, avec son intrigue qui n’est pas évidente à deviner et ses multiples personnages hétéroclites. Et puis un raccourci de la vie citadine très bien imagée… comme dans cet extrait !

Les ascenseurs étaient divisés en sections. Il dépassa les Omnibus 1 à 12, et prit un des Express 14 à 22 en s’amusant du fait qu’un immeuble ultramoderne comme celui-ci au cœur d’une métropole géante, ait eu la superstition d’éliminer le treizième étage.
-Dix-huitième, dit-il au liftier.
Le garçon se retourna vers lui ;
-Quel temps dehors ?
-Il fait beau.
-Je sors jamais. Je suis prisonnier de cette maison ; prisonnier, de huit heures du matin à cinq du soir. Je ne vois jamais le jour. Je déjeune ici dans l’immeuble. J’apporte ma gamelle et je la mange dans une petite pièce qu’on a au sous-sol. Je suis une taupe.
Kling eut un mouvement de tête compatissant.
C’est une ville de taupes. Les gens prennent le métro, ils traversent par les passages souterrains, ils reviennent de même. Moi, au moins, je fais deux cent mètres à pied tous les matins et tous les soirs. Eux, ils ont rien. Ils prennent les passages souterrains pour aller à leurs bureaux parce que ça va plus vite. Qu’il pleuve ou qu’il fasse beau. Ils mangent dans la galerie du sous-sol. Ils rentrent par le métro. Ils ne voient jamais la ville. Moi, j’en vois deux cent mètres tous les matins et tous les soirs. Comment vous dites qu’il fait dehors ?
-Fait beau.
Dix-huitième hein ?
-Exact.
- En haut, en bas, je monte, je descends. Toute la sainte journée. Mais je ne vais nulle part. Je suis comme qui dirait une taupe verticale. Les autres, c’est des taupes horizontales …

Pierrot - Villeurbanne - 73 ans - 3 novembre 2015