Qui vive : considérations actuelles sur l'inactualité du surréalisme
de Annie Le Brun

critiqué par Donatien, le 31 août 2011
(vilvorde - 81 ans)


La note:  étoiles
Défense du surréalisme
Annie Lebrun (née en 1942), est depuis sa rencontre avec André Breton et le surréalisme sur tous les fronts pour défendre et tenter de réactiver les acquis et moyens surréalistes comme l’écriture automatique, la recherche des images poétiques, nos imaginaires, la critique par le rire, la beauté explosante-fixe, l’amour fou, etc..

Annie Lebrun craint la disparition de la poésie, du singulier dans le nombre, le retour du religieux mais surtout la récupération mercantile des trouvailles surréalistes. Elle rappelle d’abord l’enjeu de la révolte surréaliste après le 1ère guerre mondiale, celui de redonner du sens à une morale qui n’en avait plus. Elle se sent en dette par rapport à André Breton, «d’empêcher, si elle le peut, que retombent tout à fait sur son sillage les lourds rideaux aveugles de la reconnaissance culturelle.»

Elle fustige surtout les récupérations organisées par des «intellectuels» tels G.Steiner, Bernard Henri Levy,Ph. Sollers, participant avec d’autres au camouflage esthétique et au processus d’indifférenciation généralisée!

Elle propose «la conscience poétique comme seul critère intellectuel et moral.».

L’écriture automatique , «ne se confond pas avec le fonctionnement réel de la pensée,mais est un mode de fonctionnement de la pensée rendant compte en surface, d’une infinité de mouvements enfouis à la façon dont les vagues disent et ne disent pas la mer.».

L’importance de la menace nucléaire : «nous assigne à résidence, a complètement bouleversé notre horizon sensible et porté atteinte à notre imaginaire en sapant l’irréalité qui le fonde.».

Le seul argument qui me gêne est la référence au Marquis de Sade parmi les grandes figures de la «négation». ou la «vérification de l’éthique par l’abîme de l’érotique»,soit la subversion sans fin, mais je n'ai qu’une vague connaissance de la portée des écrits du Marquis. Le personnage me déplaît. Annie Lebrun lui a consacré un ouvrage que je lirai peut être un jour.
Je préfère les autres modèles tels Jarry, Swift, Roussel, Rimbaud, Vaché, Lichtenberg, Rigaut,etc..

Par contre, j’admire sa pugnacité et son style. En voici quelques échantillons :

«Mesure-t-on l’ampleur de la résignation qu’on nous prépare en prétendant ne pouvoir dire que la partie sans le tout?».

«C’est à la plus sauvage réévaluation qu’il importe de se livrer.».

«Et pourquoi faudrait-il donc que la morale s’en remette à une transcendance, sinon pour masquer cette inexistence?».
«Qu'avons-nous encore à attendre de l’image poétique quand tout risque de sombrer?».

Annie Lebrun sait que son entêtement pourrait indisposer, faire fuir, mais il est à la mesure de son désespoir! Le Surréalisme serait la seule tentative du XXème siècle de repenser TOUT l’homme!

Je crois partager son analyse quant à l’évolution de l’homme «postmoderne», mais tente de résister comme elle le conseille: « A NOUS DE FAIRE SURGIR LA FORET D’ECHOS DANS LAQUELLE NOUS AVANCONS, IL N’Y EN A PAS D’AUTRES».

Pour tous les résistants.

A+