Cigogne et porc-épic
de Robert Walser

critiqué par Perlimplim, le 14 août 2011
(Paris - 48 ans)


La note:  étoiles
Discret chef d'oeuvre
En refermant ces deux petits volumes qui contiennent l'ensemble des "scènes dialoguées" de Robert Walser, la première question qui vient à l'esprit est: "Comment se fait-il que ces oeuvres soient si peu connues?". Certes, certaines n'ont pas été publiées par leur auteur qui les a laissées à l'état de microgrammes. Il faut à ce sujet saluer le travail des éditions Zoé qui publient là ces textes, de façon rigoureuse et soignée.
Ces scènes dialoguées, publiées sous forme de deux petits volumes ("Cigogne et Porc-Epic", "Porcelaine"), sont des oeuvres indépendantes les unes des autres, de longueur variable. Robert Walser excellait dans ce genre de miniatures littéraires, et a écrit là des petits chefs d'oeuvre dramatiques. En quelques répliques, il croque ses personnages, et surtout leur offre une subtilité psychologique rare. Il annonce tout un pan de la littérature dramatique à venir: Ionesco, Genet, et parfois même Beckett. Car l'art de Walser tient de l'épure, et allie souplesse de la plume à une finesse extrême. Il accorde de l'importance même à ce que l'oeil nu ne verrait pas. Le monde de Robert Walser est un monde fragile, au bord du précipice, et qui a conscience de ne tenir qu'à un fil. Les personnages entre eux sont toujours sans concession, et leurs répliques justes. L'auteur manie aussi bien l'humour le plus féroce que l'émotion la plus tendre. Oeuvres inclassables (ont-elles réellement été écrites pour être jouées?) mais néanmoins essentielles.