La Vierge rouge
de Fernando Arrabal

critiqué par Darius, le 21 juin 2002
(Bruxelles - - ans)


La note:  étoiles
Tel un fait divers .
Si je vous narre cette histoire en termes journalistiques, en mots froids et détachés de tout contexte, vous aurez l’impression qu’il ne s’agit que du rapport d’un fait divers quelconque comme il en existe des centaines dans nos quotidiens sous la rubrique "chiens écrasés".
Et pourtant ! Réduire l'histoire à sa plus simple expression comme le fait la quatrième de couverture, serait assassiner le livre.
Pour ceux qui le connaissent déjà, on peut augurer qu'un auteur comme Arrabal ne peut se contenter de relater de simples faits, alors que son génie, son art, résident dans la poésie, dans le lyrisme qu'il met à les relater.
L 'histoire est simple, une femme décide de donner naissance à une fille – elle sent qu’il s'agira d'une fille – sans tenir compte du procréateur, elle ne le reverra d’ailleurs jamais plus - pour en faire une personne unique, parfaite, surdouée, dont, elle seule, aura la jouissance..
Cette fille, conçue égoïstement, lui donnera entière satisfaction comme prévu mais sera pourtant assassinée par cette mère possessive, de 6 balles de revolver, à l’aube de ses quinze ans..
Dur, dur, de concevoir qu’une mère assassine sa fille chérie parce qu’elle lui échappe. Dur, dur, également de concevoir qu’on puisse élever un enfant sans lui manifester aucun geste de tendresse… Et comment comprendre que le génie de cette enfant doive rester caché au monde, qu’elle soit obligée de passer ses nuits dans une cave sombre pour y accomplir de la recherche pure sur la résistance des matériaux sans qu'aucun des résultats ne soit jamais divulgué, pour le seul plaisir intellectuel d’une mère qui passe sa vie à admirer la beauté, l'intelligence, la dextérité de sa fille..
Pourtant il y avait des signes prémonitoires sous cette cape d'obéissance aveugle à sa mère. Cette fille ne rédigeait-elle pas en secret un journal intime intitulé « Enfer » dans lequel les idées les plus noires, les propos les plus orduriers y figuraient…
Mais tant que les « oui, maman » se succédaient, la mère n'y prêtait aucune attention…. Alors que l’orage grondait déjà sous le ciel bleu…