La forme d'une ville change plus vite, hélas, que le coeur des humains : Cent cinquante poèmes 1991-1998
de Jacques Roubaud

critiqué par Septularisen, le 8 août 2011
( - - ans)


La note:  étoiles
ODE A PARIS
Dans ce recueil au titre «emprunté» au célèbre poème de Charles BAUDELAIRE, «Le cygne», Jacques ROUBAUD, s’attache à nous faire aimer une ville… sa ville, Paris.

Voici donc cent cinquante poèmes, écrits entre 1991 et 1998 où l’auteur (sur les traces de Raymond QUENEAU) nous emmène, à pied, en voiture, en métro, à la découverte, à sa façon, de cette ville qu’il affectionne tant.

Un Paris sublimé, décrit ici d’une façon très intimiste, parfois étrange mais toujours très surprenante. Comme p. ex. lorsque l’auteur nous propose une «visite » des vingt arrondissements de Paris à sa façon c'est-à-dire avec vingt sonnets…

Nous le suivons volontiers dans ses pérégrinations, et ses poèmes donnent le tournis, mais mieux que tout ce que je pourrais dire sur cette poésie, je vous propose un extrait tiré du «Square des blancs –manteaux» de 1983, Méditation de la mort, en sonnets, selon le protocole de Joseph HALL dont voici le N° I L’entrée (The Entrance) :

A l’entrée de la Mort, où tu entres, désentre,
Décentre de la Mort la démence et le sens,
Du senti de la Mort t’absente, et te ressente,
Consente de la Mort la constance Constance.
Écarté de la Mort, contente-toi, repente
Sur la Pente de Mort, de sa Lampe, sa trempe,
Rampe-toi vers la Mort, et l’accède, et l’accente,
Contemple-toi de Mort l’indécence, le temple.
A l’orée de la Mort qui te porte, déporte,
Emporte-toi la Mort, amphores ou comportes,
Farouche-toi la Mort, la sans-souche, sans-bouche.
A l’Effrai de la Mort, dépêche-toi, dépèle,
Au Décri de la Mort, abaisse-toi, rappelle
Du Tout frayée la Mort qui te touche, te couche.

Il n’est jamais facile de parler d’un livre de poésie… il est encore plus difficile d’en parler quand on se retrouve face à une poésie aussi rare, précieuse, fine, raffinée, où chaque mot est comme sculpté, ciselé… qui plus est par un des plus grands poètes français actuels…

Et sans aucun doute, je ne suis pas à la hauteur de cette tâche, je ne peux dès lors que vous conseiller d’oser… d’oser «entrer» dans la poésie de Jacques ROUBAUD, (d’autant plus que ce volume constitue une excellente introduction à son œuvre!) de lire quelques pages et de se laisser aller, de se laisser emporter par ce tourbillon de mots, tous plus beaux les uns que les autres…le seul risque que l’on prend c’est… d’aimer!