Le bleu est une couleur chaude
de Julie Maroh

critiqué par Dirlandaise, le 18 juillet 2011
(Québec - 69 ans)


La note:  étoiles
Lorsqu'une femme en aime une autre...
Julie Maroh nous offre ici un très bel album sur le thème de l’homosexualité féminine. La jeune Clémentine, fraîche adolescente, voit sa vie basculer lorsqu’elle tombe amoureuse d’Emma. Elle combat de toutes ses forces ce sentiment qu’elle juge anormal. Son meilleur ami Valentin, lui-même homosexuel, tente de la convaincre d’accepter sa différence et d’assumer sa sexualité sans culpabilité ni honte. Mais Clémentine a bien du mal à vivre cette relation avec Emma qui est déjà en couple avec une autre femme. De plus, comment avouer à ses parents que cette nouvelle amie qui l’aide si souvent dans ses études est en réalité son amante ?

Les dessins de Julie Maroh sont fort intéressants et expressifs. Les couleurs sont pratiquement absentes sauf le bleu des cheveux d’Emma qui ressort sur la totalité des pages de l’album. Le côté psychologique prend une large place. Les personnages sont tourmentés, rongés par la culpabilité et le remords mais ne peuvent vivre loin l’une de l’autre très longtemps. Les retrouvailles sont une véritable fête. Le bonheur d’être dans les bras de la personne aimée fait plaisir à voir même si cette personne est du même sexe. Le rejet, les moqueries et l’ostracisme font partie de la vie de ces femmes vivant hors des conventions mais l’amour efface tout et leur redonne le courage de tout affronter.

C’est une très belle histoire, très émouvante. Certaines pages sont de toute beauté surtout celles sur la plage. Je n’ai pu m’empêcher de penser à « Lulu femme nue » pour la force dont font preuve ces femmes qui désirent de toutes leurs forces vivre leur bonheur jusqu’au bout malgré la société qui les rejette et les méprise. Les scènes d’amour sont très belles, nullement choquantes.

J’aurai toujours du mal à comprendre comment une femme peut en arriver à en aimer une autre mais j’ai été touchée par la douceur et l’amour dont elles font preuve l’une envers l’autre. À lire si le sujet vous intéresse.

Toujours à relire... 9 étoiles

Il y a quelques années, le film La vie d’Adèle d’Abdel Kechiche obtenait la palme d’or. Ce film était fortement inspiré de la bande dessinée de Julie Maroh – Le bleu est une couleur chaude – et j’ai relu cette bande dessinée ce matin. Après tout, on est pendant le festival de Cannes et c’est toujours le moment de pointer du doigt les liens entre septième et neuvième art… Non ?

On a beaucoup écrit et dit sur cette bande dessinée mais je voulais prendre le temps de dire qu’elle était surtout et avant tout une histoire d’amour entre deux personnes. Pourquoi toujours vouloir cataloguer les amours – légitimes/illégitimes, moraux/amoraux, hétérosexuels/homosexuels, normaux/anormaux, naturels/contre nature – alors que le mot-clef est bien « amour » ?

Deux êtres se croisent, deux êtres se rencontrent et finissent par s’aimer. Je dis « finissent » car tout ne va pas si vite que cela, les deux êtres ne réagissent pas à la même vitesse… et chacun sait bien que les amours ne sont jamais simples au départ, ni après, ni à la fin…

Dans un deuxième temps, les amoureux – ici les amoureuses – doivent faire avec une société, une famille, un milieu social… Là encore, que l’on n’imagine pas que c’est la spécificité des amours homosexuelles. On sait bien que notre société renferme une belle dose d’homophobie au fond de ses veines, mais pour autant les milieux sociaux, professionnels et familiaux peuvent générer autant de blocages, de freins, d’obstacles parfois insurmontables ou presque !

Que de questions les amoureux entendent-ils, que de souffrances enchainées à ses réticences, que de séparations provoquées par ces doutes… D’où vient-il ? Quel métier fait-il ? Que font ses parents ? Dans quel quartier habite-t-il ? Quelles sont ses origines ? Et je vous épargne les questions sur le salaire, la tenue vestimentaire, l’écart d’âge…

Donc, l’histoire entre Clémentine et Emma est bien une histoire d’amour, un drame entre deux cœurs qui vont se croiser en ville et dont le destin bascule car elles sont toutes les deux emportées dans une passion particulière… Je n’ai pas envie de vous dire ce qui fait passer le récit de l’amour au drame, vous découvrirez cela en lisant l’album, mais je peux vous dire que très nombreux seront ceux qui se reconnaîtront dans au moins un des personnages de cette très belle et très profonde bande dessinée !

Clémentine sera suivie dans ses années lycée, de la seconde à la première, et cette adolescente va passer très vite, trop vite, toutes les étapes de maturation qui font passer du stade de petite fille à citoyenne totalement autonome. Emma est un peu plus âgée mais elle-même n’est pas non plus totalement structurée et c’est ensemble qu’elles doivent franchir une étape… et rien ne sera simple !

Enfin, cette bande dessinée montre que les humains entre eux sont souvent d’une cruauté terrible. Il y a trop souvent du sexisme et de l’homophobie qui blessent, qui tuent… Julie Maroh – s’inspirant probablement de son vécu – pointe du doigt cette bêtise criminelle et gratuitement agressive et on se demande comment notre époque qui se prétend civilisée peut engendrer une telle violence ? Comment les religions du livre où il est tant question de l’amour – de Dieu et des autres – peuvent laisser se développer autant d’agressivité, de mépris et de stupidité ? L’auteur ne donne pas de réponse mais je crois que l’on ne doit pas en rester là…

Pour nous raconter cette belle histoire, cette destinée profondément humaine, Julie Maroh part du journal intime d’une des deux filles… et on avance ainsi progressivement dans l’histoire sans qu’il y ait un gros suspense car finalement on comprend très vite qu’il s’agit bien d’un drame… Un drame de l’amour humain…

Une excellente bande dessinée qui a été récompensée de nombreuses fois depuis sa sortie en 2010, donc à lire ou relire !

Shelton - Chalon-sur-Saône - 68 ans - 24 mai 2017


Emotion... 10 étoiles

J'avais pris ce livre à la bibliothèque sans faire lien avec le film...c'est en voyant la bande annonce du film, les cheveux bleus, que j'ai fait le lien.
J'ai découvert une très belle, sensible et tendre histoire d'amour.
Clémentine adolescente, se découvre irrésistiblement attirée par Emma et ses cheveux bleus et ne comprend pas ce qui lui arrive.
Nous sommes témoins de son questionnement, de ses doutes, de ses atermoiements... nos histoires d'amour ne sont jamais simples à l'adolescence, celle-ci doit braver le regard des pairs, des parents... et cela ne simplifie pas la construction de sa personnalité, sa relation avec Emma...
Julie Maroh a écrit une BD tout en finesse et en sensibilité... où chacune peut revivre ses émois d'adolescente... l'amour est universel... on passe par là sans crier gare et on se retrouve chamboulé à tout jamais.
J'étais passée par hasard dans les rayons de la bibliothèque et je referme cette BD le cœur serré, une boule dans la gorge.
Tiens et si j'essayais de voir le film ?

Bafie - - 63 ans - 28 mars 2014


Elle n'aime pas les garçons. 8 étoiles

Histoire plutôt classique même si elle met en scène deux femmes Clémentine et Emma, qui s'aiment, en dépit des commentaires, souvent négatifs, parfois positifs, de leur entourage.

Les dessins, qui me rappellent vaguement ceux d'Yslaire, sont beaux, surtout l'extase de certaines scènes de tendresse ou de sexualité, notamment dans l'esquisse de sourires, dans le plis de lèvres, dans cette montée du désir amoureux.

Le lecteur aura le plaisir de voir Julie Maroh, l'auteur, prendre le temps de mettre en scène chaque personne principale dans leur contexte, dans leurs contradictions et leurs rêves.

Morale de cette déchirante histoire d'amour entre deux jeunes femmes : Tu dois vivre pleinement cette vie si précieuse qu'il te reste, et être - comme moi aujourd'hui sur mon dernier lit - sans regrets et en paix avec toi-même.

DomPerro - - - ans - 17 juillet 2013