Caisses
de Christophe Tarkos

critiqué par Veneziano, le 26 mars 2011
(Paris - 46 ans)


La note:  étoiles
Réflexions sans queue ni tête sans tête ni queue qu'elles sont les réflexions
Ce poète, prématurément disparu en 2004, écrit une suite de textes relatifs, notamment, à une théière, au lait dans l'alimentation, à la place du couffin dans le sofa, l'organisation d'obsèques, la terre, le port du chapeau, le mot "mot", l'arrivée d'un nouveau beau-père, tout cela d'un style volontairement déstructuré, parfois totalement dénué de ponctuation, et truffé de répétitions voulues, parfois lourdes, et pas seulement du nom commun principal du poème en prose, vu que des pans de phrases sont placés sous diverses formes, parfois à la suite.
Les énumérations et inversions de propositions sont nombreuses, et ne sont pas sans rappeler Jacques Prévert, Raymond Queneau, Georges Pérec, notamment.

Le tout est délicat à lire, les idées sont assez souvent intéressantes, bien qu'autant, tour à tour, d'une platitude désarmante, et, de temps en temps, d'une glauque vacuité un peu écoeurante.

L'artiste a le mérite de faire réfléchir sur le langage, et même la linguistique, le sens des mots. Il renoue avec les expérimentations de l'entre-deux-guerres, notamment d'Apollinaire et des surréalistes.
Ces textes sont à analyser formellement, plus qu'à méditer : leur apport au fond reste relativement limité, à mon sens, malgré certains passages qui peuvent émouvoir, dans cet amas de quotidienneté. L'ensemble n'est pas agréable, surtout pour les esprits euclidiens, cartésiens, académiques, ou tout autre adepte de phraséologie. C'est une expérimentation, dont les variations peuvent différemment être appréhendées selon le medium, l'art, d'usage, la littérature, la musique ou les arts plastiques.

Je vais être honnête, tout en essayant de ne pas être abrupt : je n'ai pas accroché. L'expérimentation est toujours intéressante, et me plaît en musique, comme avec Messiaën, Boulez et Xenakis, ou en arts plastiques, comme avec l'Arte povera, l'hyperréalisme, le surréalisme, et même le cubisme, intéressant mais pas plaisant esthétiquement. Ici, c'est un peu pareil. De surcroît, les thèmes choisis ne me tentent pas. La méthode ne permet pas de les sublimer : ils permettent de s'adonner à un exercice formel, d'autant plus que leur proximité, voire leur banalité, offrent d'autant plus facilement d'en cerner l'intérêt pour le lecteur lambda. J'ai trouvé cela, malgré l'apport formel, assez rebutant, et il m'est apparu difficile de lire ce livre de bout en bout.