Je ne veux pas mourir seul
de Gil Courtemanche

critiqué par Ddh, le 22 mars 2011
(Mouscron - 83 ans)


La note:  étoiles
Autofiction sur une mort annoncée
Je ne veux pas mourir seul... Titre ambigu… Non, il ne s’agit pas d’un polar, mais plutôt d’une introspection de l’auteur : risque de mourir deux fois ! mort pour son amour enfui, mort annoncée par son cancer.
Le même jour, l’auteur reçoit un courriel de son épouse Violaine qui lui annonce qu’elle le quitte et son médecin lui révèle qu’il a le cancer… Evidemment, ces deux nouvelles le bousculent. Il revoit sa vie avec son amour et ses maladresses. Il souffre en son corps ravagé par la maladie. Lente agonie qui dissout ses certitudes : il veut mourir mais d’autres fils ténus le retiennent. Il y a le regard des autres, il y a le personnel hospitalier, il y a le Cyclope, cet appareillage monstrueux. Mais au bout du tunnel, une éclaircie ?
Le découpage du roman est particulier, de courtes séquences avec un titre unique : la vie ou la mort. Une mort en épée de Damoclès avec la maladie, une vie perdue avec des souvenirs, des remords d’un amour que l’auteur a laissé mourir sans qu’il ne s’en aperçoive.
Mourir sans avoir su aimer 7 étoiles

Gil Courtemanche, auteur de Un Dimanche à la piscine à Kigali, est mort d’un cancer du larynx il y a peu de temps. Mais de quoi la mort triomphera-t-elle ? C'est la question à laquelle il répond avant de rendre son lectorat orphelin. Il tenait à préciser les enjeux importants pour les hommes, qui, comme lui, n'accordent pas à l'amour un intérêt de premier plan.

Il a choisi d'analyser comment file la vie ou, plutôt, comment il l'a laissé filer. « J'aime vivre, mais je n'aime pas la vie. » Ce n'est pas un paradoxe. Il s'est offensé de voir que l'humanité a tourné le dos à ce qui devrait l'animer. Il se le reproche au premier chef. Sans aucune pudeur, il reconnaît ses lâchetés, surtout celle qui le retenait de s'approcher d'autrui. En regardant une photo de son mariage, il s'est rappelé la distance qu'il avait créée entre sa femme et lui-même. Jamais il ne lui aurait pris la main en public. Et pourtant, il l'aimait comme aucun homme n'a aimé. Fidèle, malgré des conduites ambiguës, il enseigne que la vie, c'est l'amour.

En fait, ce n'est pas un roman sur la mort. C'est un roman sur la vie. Comme « des cons », écrit-il, on se tue soi-même avec des milliers de petites morts. Mourir à des milliers de gestes altruistes, comme le propose pourtant, Schopenhauer. « L'enfer, c'est nous-mêmes », aurait écrit Gil Courtemanche.

Il laisse ce bel héritage : se donner à la femme, en ce qui le concerne, parce qu'elle enfante un nouvel homme en s'alliant avec lui. Bref, c'est le plus beau roman sur l'amour, même s'il est fort redondant, l'amour qui triomphe de la mort comme il en est d'un arbre, qui vit au-delà du trépas de celui qui l'a planté.

Libris québécis - Montréal - 82 ans - 30 décembre 2011


Un roman peut-il ressembler plus à un testament? 7 étoiles

L’auteur a écrit cet ouvrage, au titre fracassant, un an seulement avant sa propre mort, du cancer. D’ailleurs, il n’est pas clair jusqu’où le texte puise dans la fiction et dans l’autobiographie. Car on sait que l’auteur s’était isolé en fin de carrière et qu’il considérait souvent qu’il avait raté sa vie, même s’il avait connu le succès.

«J’aime vivre, mais je n’aime pas la vie», admet l’auteur. Surtout que cette vie se déroule maintenant dans l’absence de Violaine, la femme qu’il a temps aimé, mais jamais autant qu’aujourd’hui. Cette dernière l’a quitté le jour même où il a appris qu’il était atteint d’un cancer. Double mort, alors que l’auteur nous a prévenu que Violaine «était mon système immunitaire». La maladie le force à réfléchir sur son existence, sur le temps qu’il a perdu à ne pas aimer suffisamment, à noyer ses pensées sombres dans l’alcool.

Presque toutes les parties du livre sont intitulées «La vie» ou «La mort». C’est selon les états d’âme de l’auteur. Gil Courtemanche explore le chemin qui mène vers la mort. Une route qui bifurque toutefois alors qu’on ne s’y attendait pas. Mais une route qui mène toujours à bon port. Chemin faisait, il incite le lecteur à se questionner sur sa manière de vivre, d’aimer. Il lance des avertissements : «une caresse retenue est une forme d’avarice médiocre». Des consignes que l’auteur regrette de ne pas avoir lui-même respectées.

Leroymarko - Toronto - 51 ans - 29 décembre 2011