Une touche d'amour
de Jonathan Coe

critiqué par Torton, le 22 avril 2002
(Le Vesinet - 61 ans)


La note:  étoiles
Une vraie touche de plaisir
Un nouveau Jonathan Coe constitue toujours pour moi un petit événement. J'ai tellement vibré à la lecture de "Testament à l'anglaise" (Gallimard) et de "La maison du sommeil" (Gallimard) que je ne peux plus désormais passer à côté d’un nouveau roman de cet auteur anglais. Une touche d'amour (Editions du Rocher) sort ce mois-ci en France mais n'est pas, à proprement parler, une nouveauté. Jonathan Coe a sorti ce livre en Angleterre en 1989, c'est-à-dire bien avant le chef-d'œuvre que fut par la suite "Testament à l'anglaise" (1995). Cette fois, nous sommes bien loin du pavé riche en informations et aux différents scénarios croisés. Place à une histoire intimiste avec relativement peu de personnages. L'action principale se passe à Coventry et Jonathan Coe démontre avec une exquise finesse que de simples détails sans grande importance peuvent déclencher une succession de drames. "On se regarde tous avec indifférence" chantait Michel Berger. Jonathan Coe prouve, lui, qu’une touche d'amour peut suffire à se donner bonne conscience mais n’empêche pas de briser des vies. Voilà un beau pamphlet contre l’hypocrisie du monde moderne. Après avoir lu "Une touche d’amour", vous ne regarderez plus les autres comme avant. C'est la magie Jonathan Coe !
Triste 7 étoiles

Une touche d'amour est un roman vraiment particulier, notamment lorsque l'on a l'habitude de lire cet auteur.
L'humour so british est ici pour ainsi dire absent sans pour autant nuire au récit. Nous sommes tout simplement dans un registre différent, celui de la solitude, de la dépression, de l'échec et d'une société individualiste et aveugle.
Les mots sont juste et Coe fait preuve de finesse.
Un roman triste et un peu déprimant, il faut le reconnaître.

Sundernono - Nice - 41 ans - 26 juin 2014


Sur la touche de la vie 6 étoiles

Le titre de ce livre se réfère-t-il à la touche que le peintre ajoute pour mieux nous toucher ? Ou bien cette touche d’amour serait-elle un soupçon d’amour ? En refermant ce roman j’ai plutôt pensé que ces personnages étaient tous sur la touche de la vie.

Et d’abord le personnage principal, Robin, qui ne s’est jamais remis d’un amour malheureux et végète, ne trouvant comme remède à sa dépression que la difficulté de l’écriture et la compagnie d’Aprana. Elle aussi est sur la touche, immigrée, fière de ses origines mais « le racisme n’ayant pas besoin d’être flagrant et s’insinuant partout, on s’est fatigué d’elle ». Sur la touche encore, Emma l’avocate dont les problèmes personnels prennent le pas sur ses obligations professionnelles ce qui la conduit à recommander à Robin un scandaleux « plaider coupable » pour une affaire dont il est innocent. Sur la touche enfin « Un tout petit monde » universitaire dont Coe fait un portrait aussi cruel que ceux écrits en leur temps par David Lodge.

Jonathan Coe décrit cette mise sur la touche avec l’ironie qui « en littérature correspond d’habitude à ce qu’on appelle douleur, malheur et mésentente dans la vie réelle ».Il trouve les mots justes pour dire les choix qui n’en sont pas, raconter la faillite d’un couple, l’incommunicabilité qui nous fait « sacrifier la sincérité, l’intégrité pour éviter toute confrontation » et chercher le regard des autres. L’ironie est atténuée, comme souvent chez lui, par l’humour mais « Une touche d’amour" reste un livre très noir.

Ce n’est pas, reconnaissons le, son meilleur roman car il est un peu confus, les personnages n’ont pas assez d’épaisseur, l’insertion dans l’histoire des quatre récits de Robin n’est pas sans artifice sur une trame un peu ténue.

Néanmoins il se lit agréablement.

Jlc - - 81 ans - 8 mai 2012


Un premier Coe un peu sombre... 8 étoiles

Ce roman est assez différent de la production habituelle de Jonathan Coe, c'est un roman antérieur à ses grands succès d'ailleurs. Le ton est léger mais le sujet est grave, même déprimant: l'incommunication, l'hypocrisie, la dépression.

Le personnage principal, Robin, est un étudiant embourbé dans une thèse qu'il ne semble pas vouloir terminer. Il est coupé du monde, il a été amoureux mais n'a pas pu se déclarer et ne s'est pas remis. Le procédé de Coe est de nous montrer le vrai Robin, pour lequel l'auteur éprouve une sympathie évidente, mais en même temps de présenter son personnage à travers les yeux de ses "amis". Aussi en intercalant des nouvelles que ce Robin a écrites. J'ai trouvé ce procédé très habile.

Un livre finalement assez triste, mais qui se lit facilement et avec plaisir grâce à l'humour très pince-sans-rire. Comme le mentionne Bolcho, les mesquineries du monde universitaire sont décrites avec beaucoup d'humour. Jonathan Coe est amusant à lire, comme le dit un critiqueur, c'est le genre d'auteur idéal pour convertir des non-lecteurs. Pour les lecteurs plus assidus, c'est un livre à intercaler entre deux essais plus sérieux, ou pour quand on est fatigué et qu'on cherche une lecture facile et distrayante.

Saule - Bruxelles - 59 ans - 5 septembre 2009


Une toute petite alors... 4 étoiles

Mouais… Moi qui avait adoré Bienvenue au Club, je suis un peu déçu par cette œuvre antérieure dans laquelle je n’ai pas vraiment réussir à rentrer.
L’histoire est plutôt courte et pour cause, la trame est quasi inexistante et n’est là que pour permettre à l’auteur une prospection sur la nature des sentiments des êtres humains. Passons donc sur le fait que l’un des personnages, Robin Grant, étudiant à Conventry est accusé d’outrage à la pudeur.
A partir de cet événement, Coe nous prend par la main pour un voyage peu ragoutant dans les méandres des sentiments de nos semblables. On se demande même où est la touche d’amour du titre. Personnellement, je la cherche encore…
Il m’a semblé qu’aucun des intervenants de ce roman ne connaît le bonheur ; on nage dans le pessimisme, l’impasse sentimentale, l’impossibilité de ce comprendre… L’auteur semble prendre un certain plaisir à balader ses personnages dans leurs angoisses et leurs errances. Je n’ai pas trouvé la tendresse habituelle qu’un auteur a pour ses personnages. Peut-être que ce roman est une sorte de thérapie cachée, une catharsis, une tentative de faire sérieux, je ne sais.
De plus, la trame est alourdie par des insertions de romans dans le romans, procédé assez courant qui me gène toujours tant je le trouve artificiel et prétentieux. Ici, ce sont les écrits de Robin Grant qui forment des chapitres à part entière et qui sont donc destinés à éclairer le texte d’une autre lumière.
Bref, je n’ai pas été emballé. Je reste dubitatif quant-à la véritable portée de ce roman. Je suis à peu près certain d’être passé à côté de quelque-chose d’important pour la compréhension des intentions de Jonathan Coe mais, en même temps, cela ne me pose pas de problème. C’est rare.

Numanuma - Tours - 51 ans - 20 août 2006


Un moins bon Coe, c’est du plaisir quand même 6 étoiles

Effectivement, il y a une belle colère contre l’attitude des anglo-américains lors des bombardements de la Libye en 1986 : non-consultation de l’ONU, preuves affirmées de l’implication du pays dans des attentats (mais jamais montrées), et de toute façon, riposte totalement démesurée, etc. Les mêmes ingrédients que lors de l’agression contre l’Irak. On y trouve ceci par exemple :
« Les Etats-Unis font du foin parce que les Occidentaux ont été tués. Que dire alors des centaines et des centaines de Palestiniens assassinés l’année dernière dans les camps de Sabra et Chatila (…) ».
Mais ce n’est pas ce genre de propos qui constitue le cœur du livre. Plutôt le mal de vivre me semble-t-il, l’indifférence, la fausseté, non seulement au niveau des Etats mais à celui des individus. Je fais un peu la même lecture que Torton.
Quant à la structure du livre, c’est vrai qu’elle est originale par certains côtés, sans être révolutionnaire, loin de là. Le récit principal est interrompu à plusieurs reprises par des nouvelles qu’un des personnages aurait écrites. En tant que lecteur, on est un peu désorienté dans la mesure où ces « récits dans le récit » ne s’autonomisent pas complètement, ce qui fait d’ailleurs leur intérêt.
Fiction donc. Tout est fiction.
Les révoltes politiques de l’un des personnages (la Libye, la régression sociale en Angleterre, voulue par le gouvernement de l’époque) sont perçues comme celles de l’auteur lui-même (ce qui apparaît assez clairement dans la lecture qu’en fait ci-dessous Féline par exemple). Ainsi, nous percevons ces diatribes comme de la « réalité » portée par de la fiction. Alors ? Réalité ou fiction ?
Cela dit, je n’ai pas eu l’impression d’une œuvre qui se situerait au même niveau que les autres du même auteur. Des intentions sans doute, des personnages esquissés mais un peu caricaturaux, trop visiblement porteurs des intentions de l’auteur.
N’empêche, reste de l’humour, notamment dans le portrait de quelques profs d’université parfaitement médiocres, et reste aussi cette « humanité » de Coe, cette « touche d’amour » en quelque sorte.

Bolcho - Bruxelles - 76 ans - 30 mars 2006


Une touche de déception 5 étoiles

Je suis une fidèle lectrice de Jonathan et jusqu’à ce que je lise cet ouvrage, je n’avais jamais été déçue. « Une touche d’amour » m’a semblé creux, sans véritable trame romanesque ni récit mais plutôt un prétexte à l’écrivain pour nous faire partager sa vision de la politique, des sentiments, de la famille et des relations humaines. Il critique de manière virulente la politique américaine de Reagan en Lybie et l’attitude anglaise face à ce conflit. L’histoire en elle-même ne sert qu’à relier entre elles les différentes opinions de Coe pour essayer d’en faire un tout cohérent. Les personnages sont peu consistants et creux. Seul l’originalité de la construction me semble sauver un peu le roman. On est loin des chefs d’œuvre de l’auteur.

Féline - Binche - 46 ans - 5 août 2005


un anglais pour convertir... 8 étoiles

okay avec Torton, ajoutons que la structure du livre est une belle réussite (allez voir), que Coe est décidemment un écrivain qui donne du plaisir à lire (on pourrait le conseiller aux gens qui n'aiment pas lire, histoire de convertir...) et que, l'air de rien, on est fort loin de quoi que ce soit de léger : Simone Weill peut être heureuse de l'utilisation de que l'inventif Coe fait de ses propos.

Jeparo - Bruxelles - 60 ans - 15 avril 2004