Un hiver de glace
de Daniel Woodrell

critiqué par CC.RIDER, le 17 mars 2011
( - 66 ans)


La note: étoiles
Une Cosette moderne des Ozark Moutains
Jessup, un père de famille, fabricant et trafiquant de cocaïne à peine sorti de prison est parti précipitamment avec sa Ford Capri, abandonnant une épouse qui n'a plus toute sa tête et trois enfants. Il a promis de revenir très vite avec plein de bonbons et de billets de banque, mais en attendant, la vie est dure dans la maison glaciale. Plus grand chose à manger et toute la charge de la famille qui retombe sur les épaules de Ree la fille aînée de seize ans qui se sent responsable de sa maman et de ses deux petits frères. Quand elle apprend que son père a bénéficié d'une mise en liberté sous caution avec hypothèque sur la maison et le bois attenant, ce qui signifie que s'il ne se présente pas à l'audience, toute la famille se retrouvera à la rue en plein hiver, elle se lance à la recherche du disparu...
Un roman noir plus intéressant par son volet social que par son arrière-plan policier. En effet Woodrell nous décrit la vie quotidienne misérable des petits blancs des Ozark Mountains d'aujourd'hui (les rednecks, les hillbillies, des bouseux en quelque sorte), leur environnement hostile et leurs moeurs plus que frustes (consanguinité, violence, alcool, drogue). Dans cette cambrousse perdue, tout le monde se connait et pour cause, ces gens sont tous plus ou moins apparentés. Ils n'en demeurent pas moins égoïstes, agressifs et peu compatissants aux malheurs des Dolly. Pour eux, Jessup a trahi. Il a « balancé » et a donc transgressé une des lois les plus fondamentales du clan. La honte doit retomber sur sa fille, un magnifique personnage plein de courage et d'abnégation, sorte de Cosette moderne ou d'Olivier Twist au féminin. Une très belle écriture. Woodrell se situe dans la lignée des grands auteurs naturalistes américains comme Steinbeck, Caldwell, Dos Passos ou Hemingway. Une histoire émouvante qui ne laisse pas indifférent et qui a même été récemment adaptée au cinéma sous le titre « Winter's Bone ».