Dernière nuit à Twisted River
de John Irving

critiqué par Silex, le 13 mars 2011
(dole - - ans)


La note:  étoiles
Les secrets de Maitre Irving
Chaque nouveau roman de John Irving est attendu avec une impatience fébrile frôlant souvent le découragement car ces perles littéraires sont délivrées avec parcimonie au rythme régulier mais immuable d'une tous les 4 ou 5 ans. La révélation est arrivée au tout début des années 80 avec "Le monde selon Garp" qui fut le roman de la reconnaissance internationale. Par bonheur, il ne s' agissait pas d' un premier roman et les amateurs inconditionnels ont pu se délecter de ses premières œuvres à un rythme plus soutenu. Puis, quand tout ce qui avait été écrit fut lu, la difficile attente commença avec une délivrance arrivant lentement mais régulièrement.

2011 voit l'arrivée du 12ème roman de John Irving "Dernière nuit à Twisted River" publié au Seuil et traduit, comme tout ses autres livres, par Josée Kamoun. Comme souvent Irving nous entraine dans une vaste aventure humaine, entre loufoquerie et drame, et qui constitue, de prime abord, la patte littéraire de cet écrivain américain. Cette fois-ci il nous invite à suivre les pérégrinations d' un fils et de son père à travers le Nord-est des Etats-Unis pendant ce dernier demi-siècle. Dominique, le père, est cuisinier dans des camps itinérants de bûcherons du New-Hampshire et il élève seul son fils Daniel âgé d'une douzaine d' années. Cette dernière nuit à Twisted River, croyant son père attaqué par un ours, Daniel tue sa maitresse d'un coup de poêle à frire en pleine tête et déclenche, à travers ce geste de défense paternelle, une fuite longue de 50 ans car cette femme était aussi la maitresse du sheriff ivrogne et violent du comté qui décide alors de vouer sa vie à sa vengeance. Grâce à l'aide indéfectible de Ketchum, un bûcheron issu, pourrait-on croire, du croisement d'un ours et d'un philosophe, Dominique et Daniel passent leur vie à fuir. Ils se retrouvent à Boston, au sein de la communauté italienne, puis dans le Vermont et l'Iowa, changeant de nom et de vie chaque fois que le vengeur, devenu sobre, retrouve leur trace. Dominique reste cuisinier et Daniel, dont le don littéraire se manifeste très tôt, devient un écrivain reconnu. Ces livres traitent, sous forme de fiction, de l'histoire rocambolesque de cette fuite éperdue et inutile. Chacun construit sa vie à sa façon, Daniel a un fils qu'il élève seul lui aussi et qu'il tente à son tour de protéger des dangers de la vie. Père, fils et petit-fils restent unis dans cette aventure dont la fin est connue d'avance sous l'œil et la vigilance tonitruante de Ketchum, protecteur indéfectible et véritable conscience morale de l' Amérique de la seconde moitié du XXème siècle.

Fidèle à son style littéraire, John Irving nous entraine, une fois encore, dans son monde si particulier, nous faisant passer, d'une page à l'autre, du rire aux larmes en maitrisant l' intrigue avec cette maestria qui fait sa marque. Nous retrouvons ses thèmes et figures favoris : la lutte, les ours, les femmes au physique fellinien et à la sexualité dévorante, l'angoisse existentielle du père pour ses enfants, l'absence ou la mort d'un parent. Autour de ce dernier roman, John Irving, nous livre quelques secrets de "fabrication" qui expliquent, par exemple, la longue durée de gestation de chaque livre. Il écrit toujours la fin en premier car l'histoire est déjà totalement maitrisée dans son esprit et, outre l'originalité de celle-ci, ce qui compte est l'intrigue, cette sorte de mystérieuse alchimie faisant que les choses arrivent, inexorablement. John Irving écrit sur ses peurs, sur ce qu'il ne veut pas qu'il arrive à ceux qu'il aime. Quelle meilleure façon d' exorciser ses angoisses que de commencer par la fin! Il s'agit d'une véritable antithèse de la vie: nous en connaissons tous la fin mais nous ne savons pas comment nous allons y parvenir. Irving a choisi le contrepied dans son œuvre : il connait d'abord la fin puis le cheminement et enfin le début, rien d'autre ne peut arriver qu'il n'avait prévu. Une fois encore, la magie opère, nous entrainant irrésistiblement dans ce roman-fleuve en nous laissant pantois, émerveillé et aussi perplexe, contemplant le monde si particulier des hommes. Comme le dit Irving: " On ne peut pas faire réfléchir le lecteur si on ne l'a pas diverti pendant les 300 premières pages." Merci Monsieur Irving de nous divertir de la sorte en nous faisant réfléchir au curieux destin qu'est notre vie.
Un roman particulièrement maîtrisé 8 étoiles

Tout d’abord pour commencer je dois dire que je suis surpris par la moyenne des notes pour ce roman qui malgré ses défauts n’en reste pas moins un livre agréable à lire, bien écrit et qui par ses personnages bien fouillés et son histoire constitue une lecture originale.
Pour reprendre certaines critiques il est vrai que dernière nuit à Twisted River tire parfois en longueur, cela est indéniable, que les nombreux détours et digressions rendent le suivi de l’histoire parfois épineux, néanmoins cela ne m’a pas gêné. Honnêtement j’ai déjà lu un tas de romans bien plus complexes dans leur construction que celui-ci.
Plusieurs qualités essentielles m’ont tout particulièrement fait apprécier ce roman, notamment son univers et l’ambiance qui en ressort. Les descriptions du Vermont, du New Hampshire, de Toronto, des grands espaces du Nord Est, l’esprit qui habite ces territoires. On sent tout le vécu d’un auteur qui connaît parfaitement ces lieux. Les personnages particulièrement soignés par le romancier, notamment le fameux Ketchum, collent parfaitement à l’ambiance général du roman. Il est vrai que certains ont un caractère quelque peu effacé mais finalement dans le ton de ces lieux désolés. A cela s’ajoute la construction du roman qui demeure pour moi LE point fort du roman. Que dire de cette fin…
Un bon roman.

Sundernono - Nice - 41 ans - 28 juin 2016


Le souffle frais des forêts nord-américaines 9 étoiles

On est entre Etats-Unis et Canada dans cette « saga » qui relate l’aboutissement d’une vengeance recuite via le récit de la vie d’un américain, enfant du côté de Twisted River, genre trou paumé de bûcherons en pleine forêt au Nord des Etats-Unis, où l’on pratique encore le convoyage sur l’eau. Et je dois dire qu’en effet on y est, qu’on ressent ce souffle vital de la nature nord-américaine, si puissante et impressionnante. Oui, John Irving n’a pas perdu la main. Il sait construire une histoire complexe, la secouer dans tous les sens pour nous la raconter en désynchronisé, à coups de flash-backs et d’avancées fulgurantes – on va passer en revue trois générations de la famille de même. Mais il sait aussi faire passer ce sentiment de petitesse que l’on ressent, confronté à cette magnifique nature.
Alors on ne va pas y rester dans ces forêts sauvages, à Twisted River. On va aussi évoluer en milieu urbain, vers Boston, dans le Vermont, l’Iowa et au Canada, à Toronto. Et John Irving parle en connaissance de cause puisque, outre le Canada où il passe une partie de sa vie, il y est question d’un écrivain.
Danny, jeune, est élevé par son père, cuisinier, au fin fond des forêts parmi les bûcherons, les « dravers » (ceux qui convoient les trains de troncs au fil de l’eau), à Twisted River. La vie là-bas est peuplée de personnages inénarrables – ou peut-être est-ce le cerveau de John Irving qui est particulièrement fécond ? – et Danny doit fuir tout à coup ce qu’il considérait comme son monde, en compagnie de son père, Dominic Baciagalupo. Il s’est passé quelque chose et le père a choisi, contre toute raison, la fuite. Exit Twisted River, ses troncs, ses ours et ses eaux, bonjour la clandestinité, la fuite toujours plus loin, les changements d’identité. Un ami leur est resté fidèle à Twisted River, Ketchum, un draver comme on n’en fait plus – et plus précisément un personnage comme on est incapable d’en imaginer en Europe, simplement parce que ça n’existe pas chez nous des individus de cette nature ! – qui va les renseigner sur le danger resté à Twisted River et veiller de loin sur eux. Après … c’est beaucoup, beaucoup plus complexe, et ceux qui connaissent et apprécient le style Irving comprendront ce que je veux dire. Les rétifs aussi, probablement. On marche ou ne marche pas mais l’intelligence du propos fondu dans une histoire au si long cours est proprement jouissive pour qui rentre dans le jeu. Le petit Danny devient écrivain – et on assiste ainsi à la naissance d’un … John Irving ? – il devient vieux et l’histoire court, court … Et moi avec !

Tistou - - 68 ans - 21 septembre 2014


petit plat un peu noyé dans la sauce... 6 étoiles

J'ai passé certes un agréable moment de lecture... des personnages attachants (avec néanmoins un bémol pour le personnage de Daniel adulte), un art de conter, des situations surprenantes et pittoresques...
Je ne reviendrai pas sur le fond du roman qui outre d'un discours sur la paternité explore l'art du roman selon Irving... d'où parfois des jugements un peu abrupts... ni sur les thèmes qui transparaissent vu qu'on retrouve les éléments d'un roman irvingien, soit la paternité, le parent absent, les morts brutales, le New Hampshire, Exeter, les ours, la lutte...
Ni sur cette maitrise de conteur qu'a Irving, qui sait nous saisir et nous amener dans un style fluide, avec un langage savoureux là où il le désire...
Mais voilà, justement, j'avais l'impression d'avoir déjà lu ce livre de John Irving... un goût un peu passé... et puis certes Irving n'aime pas l'art de la concision comme il le dit... “I thought, I surely don’t want to become a writer to write sentences as simplistic and short as this guy does … If you want to be an ad writer and write ad copy, OK, short sentences are appealing. But it seemed to me to be a dictum and dulling.” Mais parfois il délaie un peu trop et le plat perd de sa saveur... des digressions parfois un peu longues et ennuyeuses qui sont comme des grincements dysharmonieux sur la mélodie tissée... et puis une sensation de répétitions de faits...

Et je dois l'avouer, au delà de la page 471, je me suis un peu lassé de cette lecture qui s'étirait inutilement et où je me disais que la patte d'Hemingway n'aurait pas été inutile...

donc un roman plaisant mais parfois un peu fade...

Deinos - - 62 ans - 29 juillet 2014


Cuisine sans saveur 4 étoiles

Dominic Baciagalupo, cuisinier, et son fils Danny, futur puis écrivain, quittent un lieu étrange après un meurtre. Ils vont de ville en ville, de restaurant en restaurant, de livre en livre, de femme en femme, poursuivis par une vengeance. Il s'en suit une galerie de personnages qu'ils rencontrent, de lieux qu'ils décrivent, d'actions qu'ils mènent ou que d'autres entreprennent. Tout cela n'est pas inintéressant, mais finit par procurer un ennui certain. Le procédé littéraire d'Irving, si prégnant dans "Garp", consiste à mêler les époques du récit, à faire ressortir un fait initial bien après ses conséquences. Ceci relève du travail d'un véritable écrivain. D'où vient-il que ce soit finalement si lassant? Probablement du fait que, sur le tard, Irving n'a plus grand chose à dire à ses lecteurs. Ce ne sont pas des considérations sur l'adoption d'un nom de plume par un écrivain ou l'évocation de Bush ou du 11 septembre qui changeront ce constat sévère. La banalité, hélas, l'emporte.

Falgo - Lentilly - 85 ans - 8 juin 2014


A déguster 8 étoiles

Roman à déguster, dans tous les sens du terme.
Roman culinaire et littéraire.
Le père cuisinier , le fils écrivain.
La vie de cette famille sur trois générations.
J'ai bien aimé, mais j'ai pris le temps de le lire (plus d'un mois), par petite dose.
C'est du pur John Irving, je recommande.

Free_s4 - Dans le Sud-Ouest - 50 ans - 12 août 2013


Un plaisir attendu 7 étoiles

Quel plaisir de replonger dans un roman de John Irving, de suivre ses personnages hauts en couleurs sur plusieurs générations, personnages auxquels, une fois de plus, rien n'est épargné. Si le début est un peu poussif, le talent du narrateur prend le dessus et nous emmène dans une tension constante jusqu'au terme de l'aventure. La construction du récit, chacun des 4 grands chapitres correspondant à 4 époques séparées de 10-20 ans avec de nombreux flashbacks pour faire le lien, peut également surprendre, puisque que l'issue des évènements est connue avant leur déroulement. Mais cela propose une gymnastique qui ne manque pas d'intérêt. Ce romancier reste pour moi une valeur sûre.

Elko - Niort - 48 ans - 3 octobre 2012


Je n'ai pas mordu... 5 étoiles

Peut-être l'ai-je lu à un mauvais moment mais je dois bien avouer aussi que cet auteur ne m'a jamais attiré.

Ici les pages défilent et les choses qu'elles m’apprennent c'est comment on prenait et transportait le bois.

Ces descriptions étaient d'une longueur assommante et je ne voyais rien dans toute cette histoire où il voulait nous mener. Pas un personnage pour nous attirer et nous donner envie de poursuivre un livre qui plus est est bien épais.

Peut-être un bon auteur mais je n'y retournerai pas.

Jules - Bruxelles - 80 ans - 1 septembre 2012


Je n'ai pas aimé. 2 étoiles

Fan depuis des années de J. Irving, je me suis malheureusement ennuyée à la lecture de ce dernier roman : c'est long, long, long...

Isabulle - Lille - 59 ans - 29 août 2012


J'adore Irving 8 étoiles

Je suis une inconditionnelle de l'univers de John Irving, comme beaucoup, depuis Le monde selon Garp. Et il ne m'a jamais déçue depuis. Je ne me lasse pas de ces personnages loufoques, drôles, émouvants, qui traversent les tourments de la vie avec plus ou moins d'adresse, et j'ai été servie encore une fois avec ce livre!

Saabj - - 48 ans - 27 juillet 2012


Dernière nuit à Twisted River 4 étoiles

C'est copieux, trop copieux. Les situations les plus invraisemblables (poétiques ?) se succèdent, minutieusement narrées, comme si le but ultime était d'atteindre les 680 pages promises à l'éditeur. Le roman gagnerait en vigueur et en intérêt avec 200 pages de moins.

Irving/ophille historique - - 74 ans - 30 mai 2012


Interrogation 3 étoiles

J'aime beaucoup John Irving. J'ai adoré lire "Hôtel New Hampshire", plus encore "l'oeuvre de Dieu, la part du diable". J'étais donc impatient et enthousiaste à l'idée de plonger dans ce vaste roman. La thématique initiale, l'environnement aventureux, le caractère original et profondément humain des personnages principaux, constituaient autant d'ingrédients prometteurs.
Et pourtant j'ai calé, me suis perdu dans les dédales de cette histoire, n'ai pas réussi à m'attacher à la destinée pourtant exceptionnelle des protagonistes. J'en étais très inquiet. Etait-ce moi qui perdais la patience de la lecture, la concentration ? Il faut parfois se forcer un peu pour "entrer" dans un bouquin. J'en ai bien lu 200 pages. Je me suis demandé si le traducteur n'était pas nouveau, si ce n'était pas lui qui trahissait le style de John Irving. J'avais le sentiment d'une lecture laborieuse. Et pourtant non, le traducteur était bien le même que pour ces derniers romans. La lecture des critiques dans ce forum me rassure un peu. Elle ne sont pas encourageantes à terminer la lecture du livre. Pourtant je le ferai: trop de travail, d'efforts accumulés par John Irving pour ne pas respectueusement aller au terme de son roman. Je suis pourtant déçu et m'interroge. Une histoire peut ne pas plaire, on peut être en désaccord avec des idées, mais quand c'est le style qui semble être à l'origine du déplaisir à lire, c'est étonnant de la part d'un écrivain dont on a pu tant aimer les oeuvres précédentes.

Manouche - - 57 ans - 29 avril 2012


Déception : la première 4 étoiles

Tout commence en effet plutôt bien avec l'univers des montagnes, des bûcherons et des personnages bien trempés et campés. Des histoires plus ou moins avouables sur le passé des protagonistes et comment souvent avec Irving : l'acte répréhensible qui fait basculer le quotidien (ici meurtres et noyades). Mais l'humanité des personnages et leurs implications émotionnelles sont ici contestables. Et sans ça comment s'attacher à eux, comment les suivre dans leur (longue) épopée sans cet attachement tenace à ses héros imparfaits et iconoclastes qui sont la marque de fabrique de cet auteur. Nous n'avons pas cette fameuse alchimie qui fait passer du rire aux larmes dans une même page. Pas cette équilibre fragile. Les ingrédients sont là mais la savoir faire savoir faire ou l'attention absentes.

Pire encore par moment, Irving nous réchauffe des recettes connues : un bout d'ours, un écrivain en devenir, la relation père-fils. Le père qui n'assume pas, le fils qui n’assume pas non plus d'être père...

Bref, grosse première déception concernant cet auteur mais de taille.

Julio - - 46 ans - 2 novembre 2011


Une nouvelle épopée de John Irving 9 étoiles

Un excellent roman avec un début original et comme à son habitude de multiples personnages qui traversent l'histoire.
Le déroulement est très fluide et on suit avec plaisir l'épopée des 3 personnages centraux. Quelques longueurs qui n'altèrent en rien le déroulement de l'histoire et qui apportent un peu de répit aux personnages.
John Irving intègre sa vision de l'écriture et se transcrit dans un des personnages (tout du moins c'est l'idée que l'on s'en fait).
Un livre qui se lit rapidement et de façon plaisante avec une fin qui ma fois m'a plu.

MattC7391 - cela a-t-il une importance ? - 51 ans - 6 octobre 2011


Les broderies de Maître Irving 3 étoiles

Les ingrédients traditionnels de John Irving y sont mais les innombrables digressions laissent souvent le lecteur sur le côté des sentiers boueux que ne manquent pas d’emprunter une myriade de personnages, secondaires voire tertiaires, dont on se demande incessamment ce qu’ils apportent à un récit dont la lecture est déjà bien fatigante. On a l’occasion de croiser deux ou trois femmes vietnamiennes et coréennes, deux ou trois cuisiniers italiens mais tout ce peuple indistinct reste au rang de figurants. Leur nombre fait qu’ils sont oubliés aussi vite qu’ils sont apparus. Au bout de quelques pages, on sait qu’il n’est même pas nécessaire de faire l’effort de s’en souvenir.
Après un démarrage poussif et interminable, le récit s’accélère brusquement avec les décès de deux protagonistes. On va alors suivre le parcours de deux témoins directs de ces deux décès. Ces personnages, dont l’un est le meurtrier par accident, s’attellent à fuir et à se débarrasser du corps d’une femme dont l’autre personnage était l’amant. Ils n’éprouvent aucune compassion. Irving ne démontre aucune émotion, aucune humanité de la part de ses personnages, pas plus que s’ils enterraient un rat crevé. Ces scènes sont irréelles. Un décès aurait dû suffire mais la probabilité déjà faible d’un deuxième décès, sans lien d’ailleurs avec le premier, laisse la suspicion sur la vraisemblance de l’histoire et éveille la perplexité sur le comportement lisse des personnages qui sont confrontés à ces drames.
Quant aux nombreuses parenthèses désenchantées, elles entraînent le lecteur vers des plages infinies d’ennui à moins qu’il ne s’intéresse aux travaux d’aménagement d’une cabane au fond des bois, à un chien qui pète ou aux débits de boisson sur la route 69. Il reste quelques ours – et les traces des éléments autobiographiques de l’auteur - et quelques historiettes abracadabrantes dans la veine des précédents comme si John Irving, roman après roman, se jetait dans une surenchère névrotique consistant à bourrer ses écrits de scènes de plus en plus extravagantes. On retiendra pour illustration l’histoire de la parachutiste nue qui atterrit au milieu d’une bauge à cochons.
Peut-être le pavé de trop.

Bidoulet - - 56 ans - 24 mars 2011


Une grande maîtrise, quelques longueurs... 9 étoiles

J'ai toujours apprécié les romans de John Irving, il en est de même cette fois et le début de l'histoire promettait le meilleur. Ces personnages hauts en couleurs perdus dans une nature sauvage, rassemblés dans la forêt à débiter et convoyer des grumes imposantes, voilà qui était original et magnifiquement ordonnancé grâce au talent de l'écrivain.

Les épisodes successifs de cette grande saga, qui concernent tous Ketchum, le bûcheron, Dominic, le cuistot et Danny le fils de ce dernier qui deviendra écrivain (l'ombre d'Irving ?) sont de qualité et d'intérêt inégaux, mais toujours passionnants.

J'ai moins aimé les trop longues considérations sur la fabrication d'un roman et les banales réflexions sur la politique américaine aujourd'hui. Irving est meilleur lorsqu'il analyse et commente les moeurs et les comportements de ses personnages. Surtout quand ils se mettent aux fourneaux.

Un excellent roman !

Tanneguy - Paris - 85 ans - 14 mars 2011