Je renaîtrai
de Anise Koltz

critiqué par Sahkti, le 19 février 2011
(Genève - 49 ans)


La note:  étoiles
Vivre après la vie
Anise Koltz a 82 ans; les premiers vers de ce recueil sont à l'image du bilan qu'elle se refuse de dresser parce qu'il y a encore beaucoup à faire, mais la réalité de tout ce que l'on a derrière soi est bien présente.

"J'ai escorté mon nom
jusqu'à l'oubli

Demain je renaîtrai
surgissant de l'argile

Mon ombre gravite déjà
autour d'une nouvelle effigie"
(page 9)

Il y a des envies de renaissance, de redécouverte, d'aller de l'avant, autant d'éléments pourtant repoussés à d'autres moments, par peur, par lassitude. Renaître sans savoir peut-être vivifiant mais terriblement effrayant car comment faire justement abstraction de ce savoir ? Renaître vierge, tout recommencer sans tirer profit des expériences passés, est-ce réellement cela que nous désirons ?

"Souvent je me sens à l'étroit
dans ma peau
l'envie me prend
de m'évader
de faire bondir mes veines
dans ma chair
de quitter cette mémoire
qui ne m'aime plus"
(page 70)

Il n'est pas simple de vivre et la mort peut passer pour la porte ouverte vers d'autres vies, d'autres démarches existentielles. Lorsque l'on regarde en arrière, qu'on mène une plongée intérieure sans des souvenirs, les bons moments côtoient les souffrances, la cruauté se mêle à l'amour. Comment fuir cela ? Comment le vivre ?

"Je me suis habituée
aux loups
qui rôdent en moi."
(page 73)

Anise Koltz n'a pas de recette miracle, si ce n'est de nous offrir une vision inquiétante mais aussi pleine d'espoir. Celle qu'elle a de nous, d'elle, de ce monde qui nous accueille avec maladresse.
Sa démarche est touchante car emplie de sincérité et de tendresse. Elle est également obsédante car les nombreuses questions posées ont de profondes répercussions en nous.
Des textes porteurs d'espoir mais aussi de désillusion. Une forme de maturité en quelque sorte, de belle maturité, à l'image des mots d'Anise Koltz, une grande dame de la poésie et des lettres.