Sherman, tome 1 : La promesse. New York
de Stephen Desberg (Scénario), Griffo (Dessin)

critiqué par Nothingman, le 3 février 2011
(Marche-en- Famenne - 44 ans)


La note:  étoiles
Sherman, le self-made man
Avec le dessinateur Griffo, qui avait activement participé à Empire USA, Desberg (IRS, le Scorpion,...) nous raconte l’histoire de Jay Sherman, self-made man à l’américaine, parti de rien pour arriver au sommet et qui « doit payer pour ce qu’il a fait ». Tout comme Empire USA, six albums sont prévus avec les deux premiers tomes dès ce mois de janvier 2011. Viendront, ensuite, les deux tomes suivants en mai et novembre 2011 et les deux derniers en février et juin 2012.

Robert, le fils de Jay Sherman, est en campagne pour devenir président des Etats-Unis d’Amérique, et tout s’annonce très bien. Pourtant, à la sortie d'un meeting électoral, un homme lui tire dessus, le blessant mortellement. Et pendant que les médecins tentent de sauver son fils, Jay reçoit un mystérieux coup de téléphone lui annonçant que ses ennuis ne font que commencer. Qu'après s'être attaqué à son fils, ils s''en prendront à sa fortune et à sa fille....

Au début de cette histoire, on ne peut s’empêcher de tisser des liens à l’histoire de la famille Kennedy – les fils assassinés dont un président, une fortune faite pendant la prohibition – d’autres comparaisons plus cinématographiques nous viennent à l’esprit: Il était une fois l’Amérique, bien évidemment avec cette histoire de vengeance et d’ascension à l’américaine; Charlot avec les quelques pages consacrées au père de Jay, clochard dans les rues de New-York.

Le dessin est réellement somptueux et nous restitue le New-York des années 30 et 60, avec des couleurs sépia très chaleureuses quand Jay évoque les souvenirs de son passé, qu'il est obligé de raconter à l'inspectrice Eva Cruz, chargée de sa protection. Les couleurs sont en revanche plus dures quand on revient dans la réalité où Jay n'en finit plus d'être menacé. Les dessins de couverture sont vraiment exceptionnels, de vraies affiches de cinéma des années 30. Et puis, le scénario est tout aussi prenant. Qui peut bien en vouloir autant à ce monsieur, qui a prospéré dans le domaine bancaire? Je me rue sur le deuxième tome pour en savoir plus ...
Du très solide !!! 9 étoiles

Deux grands auteurs se donnent rendez-vous autour d’un grand projet : raconter une histoire en six volumes sans laisser le temps au lecteur de s’impatienter et se lasser. Plus qu’une histoire banale, c’est un véritable destin symbolique que les auteurs veulent nous livrer : le rêve américain, mais à l’envers.

En effet, jusqu’à maintenant, il existait les chants à la gloire de l’American Dream, c’est à dire des hommes qui arrivaient pauvres et qui faisaient fortune aux States en travaillant et faisant preuve de courage et obstination. Là, c’est un peu le contraire. Nous avons un homme riche, fort, célèbre, qui est en train d’assister à l’ascension finale de son fils qui a de bonnes chances d’accéder à la fonction suprême des USA, Président !

Tout est sur la bonne voie et, soudain, tout va s’effondrer. Ce ne sera pas le fruit du hasard, mais bien une œuvre de destruction savamment orchestrée qui ne s’arrêtera devant rien, du moins sommes-nous sensés le penser en lisant ce premier opus de la série.

Dans ce premier volet nous allons faire la connaissance du maître de la construction car avant de tomber de haut, il est bien monté, il s’est construit. En effet, Jay Sherman est parti de tout en bas et son père était une petite frappe des bas-fonds de New York. Lorsqu’il meurt, bêtement comme tout le reste de sa vie, il fait promettre à son très jeune fils, de réussir ! Réussir ? Oui, la réussite absolue, c’est à dire qu’il devra, lui le fils non instruit et mal éduqué, devenir président des Etats-Unis, ou, à défaut, pousser son fils vers la Maison Blanche.

C’est au moment où les vœux et promesses semblent se réaliser que la machine s’enraye et que nous allons, progressivement, comprendre comment Jay s’est construit, les haines et désirs de vengeance qu’il a laissés derrière lui… Bref, les auteurs nous invitent à passer de l’autre côté du miroir, là où tout n’est pas rose…

Une très belle bande dessinée avec un scénario ciselé au millimètre, une narration graphique d’une efficacité diabolique et qui ne peut que réjouir un très grand nombre de lecteurs. Les dessins de Griffo sont exceptionnels, d’un réalisme impressionnant et d’une force expressive que l’on ne rencontre pas dans les albums habituels des séries « aventures ». Là, aventures se met à rimer avec art, tout simplement… j’insiste particulièrement sur la qualité des dessins de visages qui laissent passer toute la palette des sentiments humains et participent ainsi à la narration elle-même. Du très beau et bon travail !

Tout au long de cette histoire – qui ne fait que commencer et qui va s’échelonner sur six albums – le personnage d’Eva – garde du corps détaché par la police auprès de Jay – va jouer un rôle important et on le sent bien dès cet album, « La promesse. New York ».

Shelton - Chalon-sur-Saône - 68 ans - 11 septembre 2011