Carnets du jour et de la nuit
de Jean-Claude Walter

critiqué par Sahkti, le 30 janvier 2011
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Notre vie par les mots de l'autre
La prose poétique qui compose ce recueil marque par sa drôlerie (féroce souvent !) lorsqu'elle nous observe dans notre qualité d'hommes. Hommes, donc vulnérables. Et c'est là que c'est amusant, parce que tant qu'à faire, autant en rire un peu, autant mettre l'accent sur ce que cela peu avoir d'ironique, histoire aussi de nous faire redescendre de notre piédestal et cesser de penser que nous sommes les maîtres de nos destins. Parce que vivre, en soi, ce n'est déjà pas très facile. Et il semblerait que nous soyons doués pour rater formidablement cela, à l'inverse des animaux.
Quand on vous disait qu'il valait mieux en rire...

"Quand le ciel se ferme et que rien ne répond plus à mon attente, mon chien, par son regard et son attente, me dit que le néant n'est pas au goût du jour et qu'il faut tenter d'aller de l'avant." (page 91)

Déclinés en huit parties, ces carnets diurnes et nocturnes mettent en vedette le moyen essentiel qu'a le poète de dire ce qui est (et aussi qu'il est, lui), à savoir l'écriture. Le monde prend vie par ses lettres, par ses assemblages de mots, par ses fragments poétiques qui nous racontent l'enfance, le temps présent ou les instants à venir.
La restitution de l'enfance par Jean-Claude Walter m'a complètement charmée; cette période se veut tourmentée, certes, mais si chaleureuse, si douce, du genre qui construit les âmes et qu'on regrette amèrement une fois les années écoulées. Beaucoup d'amour et d'humour dans cette descriptions des émotions passées, beaucoup d'humanité aussi.
A travers des petits riens, des anodineries touchantes, l'auteur recrée un univers qui fait chaud au coeur et au ventre, c'est tout simplement sublime. D'autant plus qu'il redonne vigueur à des mots oubliés, à des détails que l'on pensait enfouis au creux d'un tiroir de la mémoire. C'est aussi une manière de rendre hommage aux mots, à l'écriture qui offre tant de merveilleuses possibilités.

L'enfance, c'est aussi la nostalgie, les espoirs déçus et les êtres disparus, autant d'éléments qui structurent notre présent à vivre et le marquent à jamais.
De cela, l'auteur en est conscients; nous sommes prisonniers de destinées. Ce qui ne nous empêche pas cependant de chercher à construire d'autres ponts, à ouvrir d'autres portes.

Ce recueil est superbe !