L'émergence de l'homme: Essai sur l'évolution et l'unicité humaine
de Ian Tattersall

critiqué par Bolcho, le 31 mars 2002
(Bruxelles - 76 ans)


La note:  étoiles
D'où venons-nous ?
Où en sont nos connaissances sur les origines de l’Homme ? Cet « Essai sur l’évolution et l'unicité humaine » nous donnera moins de réponses qu'il ne posera de questions. Et c'est bien ainsi.
Disons d'emblée que ce n'est pas un roman et que la lecture se fait le crayon à la main, pour noter et pour réagir. Oui, réagir : étonnant de voir à quel point les hypothèses sur nos origines pré-hominiennes nous touchent.
Dans la mesure où il y a peu de chances pour que tout le monde se jette sur la lecture de la chose, je vais me permettre de signaler quelques-unes des questions débattues en me laissant aller à l’une ou l'autre de mes réactions personnelles.
L'auteur décrit en détail les principales formes d’évolution qui ont été envisagées : graduelle (avec un problème de limites) ou allopatrique (il faut qu'il y ait séparation physique entre deux populations pour que la spéciation ait lieu). Il nous rappelle comiquement que l’être humain à 98% de ses gènes qui sont les mêmes que ceux du chimpanzé. Surprenant ? Pas sûr lorsqu'on sait que 40% de nos gènes sont communs avec ceux de la banane…
Et puis cette idée centrale. Des premiers hominiens jusqu’à nous, ce n'est pas d'un arbre d’évolution qu'il faut parler mais d'un buisson très fourni, avec toutes sortes de branchettes qui s'interrompent. Et cette idée force : l'évolution n'a pas de projet.
Les questions continuent : homo habilis chasseur ou charognard ? les 12 000 ans de cohabitation entre Néandertaliens et Cro Magnon sont-ils compatibles avec l’idée d'une lutte entre eux ? Etc.
Dans un ensemble de très haute qualité, deux hypothèses me posent plus de problème, et elles sont liées aux tombes toutes deux.
1. Le fait qu'une population enterre ses morts est souvent associé à sa découverte de la pensée religieuse. Je ne vois pas cela comme une évidence. Peut-être n'est-ce qu'une simple mesure d'hygiène et/ou de rendre la perte supportable. C'est en vue de sa « vie après la mort » que vous enterrez votre petit chat ? Et si vous mettez à côté de lui, dans sa tombe du jardin, son coussin préféré et sa gamelle, c’est pour qu’il les utilise plus tard ? Nulle religion là-dedans, mais de l'amour et de la peine. Pourquoi d’ailleurs Cro Magnon aurait-il cru qu'on pouvait survivre à la mort ? Il avait tous les jours l'occasion de voir les cadavres d'animaux se putréfier et disparaître. Non, il a d’abord enterré ses morts (par hygiène et douleur), ce qui lui a permis d’oublier ce qu’ils devenaient et de construire alors des mythes de résurrection. L’enterrement
n'est pas un signe de religiosité, mais il crée les conditions (dissimulation des preuves.) pour que les mythes religieux s'élaborent.
Cela n’enlève rien à l’importance de l’enterrement que de dire qu'il n’a pas de contenu religieux. Au contraire. Car alors, c'est un pur acte d'amour pour son prochain et/ou de crainte face à sa propre mort. Et cela suffit pour fonder l’humanité dans ce qu’elle a d'unique.
2. L'auteur note à plusieurs reprises qu'il y a des tombes de riches et des tombes de pauvres (il y a déjà 40 000 ans), qui indiquent une « stratification sociale et une différenciation
entre les individus en matière de rôles économiques et sociaux, toutes caractéristiques typiques des sociétés humaines modernes ». Donc, pour lui, Cro Magnon est moderne dans la mesure où il vit dans une société qui organise l’inégalité comme nous le faisons aujourd’hui. L'auteur connote positivement l'idée d’une société inégalitaire (dans la mesure, je suppose où ce serait un indicateur de société complexe). Mais ce n’est plus de la science ! C'est de la politique. Et si Cro Magnon avait bu du Coca, joué au basket et porté sa casquette avec la visière vers l'arrière, il serait considéré comme encore plus moderne ?
Enfin (pardon d'être si long), je voudrais terminer sur la terrible histoire des macaques japonais. L'auteur se pose la question de savoir combien d’hommes la Terre pourra nourrir. Cinq milliards ? Vingt ? Mais il ne suffit pas de les nourrir. Il faut aussi leur donner de l’espace. C’est là qu’interviennent nos macaques. « Dans des régions du Japon où la terre est assez rare, des macaques qui vivaient antérieurement en liberté dans la nature ont été parqués (.) et ravitaillés par l’homme, de sorte qu'ils se sont multipliés pour atteindre d'extraordinaires densités de population. On peut les voir de nos jours, au moment de la distribution de nourriture, arriver en vaste nombre au poste de ravitaillement. Il n'y a pas d'interaction sociale entre eux, à part les querelles. Chaque singe se tient sur son minuscule morceau de territoire et avale goulûment
sa nourriture aussi vite qu’il le peut, fixant intensément des yeux le coin du sol où il se trouve et évitant de regarder les autres, car des interactions agressives pourraient en résulter. On est à des années-lumière de la riche vie sociale que mènent ces primates lorsque, dans les circonstances naturelles, ils sillonnent librement la forêt ! On ne les voit plus, dans les conditions artificielles décrites ci-dessus, recourir à ces complexes stratégies qu’ils utilisent à l’état sauvage pour réduire au minimum les conflits. Au lieu de cela, il n'y a plus que des individus vivant dans un isolement terrifiant, refermés sur eux-mêmes, inquiets. »
Si l'on se voit prochainement dans une foule urbaine, pardonnez-moi d’être prudent.
Apparition de la vie, évolution des espéces et émergence d e l'homme 4 étoiles

Nous évoluons dans un cyber monde et ce furent des développements fiables de capacités mémoire résultant de complexifications successives de molécules carbonées qui, conduisant à des accroissements substantiels de flux d'informations et de directives dans l’inerte, permirent l'apparition de l'animé.
Le phénomène de la vie est ainsi une potentialité du réel inexorablement actualisée dès que les conditions d'état d'une planète sont adéquates.
Quant aux individus des lignées marquantes, ils disposent d’un "potentiel génétique" non seulement caractéristique de leur niveau de complexité mais aussi susceptible de s'accroître par le biais d'incessantes activités créatrices, jusqu'à parfois atteindre des seuils critiques conduisant à de brusques sauts évolutifs.
Détail sur site : www.paulmoyne.com

Paulmoyne - - 92 ans - 19 avril 2005