Absolution
de Ólafur Jóhann Ólafsson

critiqué par Sissi, le 22 décembre 2010
(Besançon - 54 ans)


La note:  étoiles
Vie gâchée, vie ratée, le mal être incarné..
« Mes péchés ne me seront pas pardonnés ; je ne demande pas le pardon, et ne me l’accorde pas non plus. »

Pétur Pétursson est vieux, malade, et il sait qu’il va mourir bientôt.
Hanté, obsédé par un « petit crime » qu’il a commis cinquante ans auparavant au Danemark, il n’a depuis jamais connu de trêve dans le tourment, pas même dans le sommeil duquel il est tiré inexorablement, avec violence, par ses souvenirs malveillants.
Le « petit crime », dont on ne connaîtra la teneur qu’à la fin du roman, a eu des incidences désastreuses sur l’existence de Pétrur : s’il a fait fortune après la guerre aux Etats-Unis, c’est au détriment de la morale et de l’éthique ; bien intégré dans la communauté islandaise de sa ville d’adoption, il a fini par renier tous ses concitoyens sans ménagement ; marié deux fois, il n’a jamais réussi à aimer ni l’une ni l’autre de ses épouses successives ; père de deux enfants, il a coupé les ponts avec eux, refuse de les voir, se réjouit à l’idée de les déshériter et les considère comme « la preuve vivante d’une erreur ».
Il se délecte de la tête effarée qu’ils feront au moment où, après sa mort, ils prendront connaissance de ce que contient « le coffre ».

Le contenu du coffre en question, c’est un traducteur américano/islandais qui va le découvrir en premier, et ce dès le début du roman :
Sollicité par le notaire chargé de la succession de Pétur, c’est lui qui va nous livrer l’histoire surprenante de cet islandais déroutant.
On la reconstitue à la manière d’un puzzle, cette vie (au gré des feuillets trouvés et traduits dans le désordre ?), avec des va-et-vient incessants dans le temps et l’espace.

Olafsson écrit de manière sobre, sans fioritures, mais nous offre une analyse psychologique fouillée et minutieuse du personnage, qui est tout à la fois cynique, pervers, manipulateur, obsessionnel et paranoïaque, sans être complètement inhumain (le passage au moment de la mort de son père est incroyablement émouvant, justement parce qu’il tranche avec la dureté omniprésente dans le livre.).
L’intériorité de Pétur est explicitement mise en exergue, de sorte qu’on ressent fortement avec lui les troubles qui le rongent, et qu’on comprend très précisément la requête qui l’obnubile : obtenir l’absolution.

« Accordez moi l’absolution de mon passé, de mes souvenirs, accordez moi la paix, pour que je puisse préparer mon départ. »

Pétur dégage quelque chose de malsain, mais on ressent pourtant un peu de pitié pour cet homme plein aux as, mais tellement vide de tout….

Du « petit crime » on ne saura la vérité qu’en fin de parcours (surprenante fin par ailleurs ! ! ! ! Quel gâchis…).
Auparavant on ne fait que s’égarer, croyant comprendre, faisant demi-tour pour repartir sur un chemin qui n’est toujours pas le bon, avant de bifurquer à nouveau sans beaucoup plus de certitudes.

Je vous invite en tout cas à commencer ce périple, la route est sinueuse mais tellement exaltante !