François Mitterrand et la guerre d'Algérie
de François Malye, Benjamin Stora

critiqué par CHALOT, le 21 décembre 2010
(Vaux le Pénil - 76 ans)


La note:  étoiles
la part de vérité relevée
« François Mitterrand
et la guerre d’Algérie »
de François Malye
et de Benjamin Stora

Une faute majeure

François Mitterrand n’aurait pas aimé ce livre.
Les auteurs, sans se laisser aller à la caricature, sans dresser un réquisitoire s’attellent à lever le voile sur la politique algérienne de François Mitterrand….
Ils réussissent à bien expliquer les raisons qui ont poussé le futur président de la République
à couvrir de son silence, voire de son autorité les exactions des forces armées en Algérie.
Aurait-il pu agir autrement ?
Comment a t-il pu passer d’une analyse pertinente de la situation en Algérie à une politique répressive soutenue officiellement ?
Très vite Mitterrand glisse à Pierre Mendès France que la situation en Algérie est très malsaine, il n’hésite pas d’ailleurs à ajouter : « Il se passe des choses graves en profondeur. Il faut agir vite aux Algériens que nous voulons en finir avec le scandale dont ils souffrent depuis un siècle »
Ces déclarations ne l’empêchent pas de se transformer en faucon.
Il est vrai qu’il veut gérer le mieux possible sa carrière politique et quand on rêve de devenir président du Conseil, on est prêt à tout, ou presque.
Ce livre co-écrit par un grand reporter et un historien, spécialiste de l’histoire de l’Algérie nous offre un dossier consistant.
Dire que le président de la République qui fera voter la loi d’abolition de la peine de mort fut un ministre de la « justice » implacable, n’hésitant pas à voter pour l’exécution capitale lors des réunions du Conseil supérieur de la Magistrature !
La « veuve » fonctionnait à un rythme soutenu.
Fernand Iveton, militant communiste sera le seul européen exécuté durant cette guerre.
Il sera guillotiné le 11 février 1957.
Les deux auteurs consacrent un chapitre entier à cette page noire du mouvement ouvrier…
C’est effectivement une page noire.
La direction du PCF, non contente d’avoir votée les pleins pouvoirs à Guy Mollet en 1956 dissuadera les « rares avocats du PC qui se sont proposés » à défendre le camarade Iveton.
Quant à la « gauche » gouvernementale, François Mitterrand en tête, elle sacrifiera sur l’autel de l’union sacrée le militant communiste, pourtant innocent de toute violence meurtrière.
« Une chape de plomb est tombée sur cette période »…
Il est temps que les bouches s’ouvrent et que l’ouverture de toutes les archives contribue à lever tous les tabous.
François Mitterrand, homme politique expérimenté , « n’a-t-il pas raté le grand rendez-vous de la décolonisation algérienne ? »et à quel prix ?!

Jean-François Chalot