La Revanche de Bozambo
de Bertène Juminer

critiqué par CC.RIDER, le 13 novembre 2010
( - 66 ans)


La note:  étoiles
Une démonstration par l'absurde
Un jeune provençal, Anatole Dupont débarque à Bantouville (Paris) la capitale de l'Europe Occidentale Baoulienne pour y terminer ses études. Il se réjouit de découvrir le fleuve Sékouane, les Champs Baobabs et la butte Mozamba. Bantouville, comme toute l'Europe, a en effet été colonisé il y a environ deux siècles par les Noirs qui lui ont apporté vie intellectuelle, progrès, médecine et civilisation. Bien entendu, ils gouvernent et tiennent tous les postes clés de l'administration et de l'armée et les Blancs en sont réduits au rôle d'esclaves ou de serviteurs. Mais la révolte gronde parmi les Blancs opprimés et la répression organisée par l'inspecteur général Bozambo est d'autant plus cruelle qu'elle est aveugle. Comment le pauvre Anatole pourra-t-il sortir de cette galère ?
Bien entendu, toute cette histoire est une fable, une sorte de conte africain dans lequel toutes les situations sont inversées : le Blanc est devenu Noir et réciproquement. La France est devenue une colonie de l'Afrique. Le Noir a tout inventé et le Blanc rien du tout. Et ce renversement étrange devient le ressort comique de l'histoire. Le lecteur est projeté dans l'absurde le plus total ce qui permet à l'auteur de démontrer l'inanité, la sottise et l'outrecuidance du colonialisme. Ce livre édité pour la première fois en 1968 et réédité en 2000 par Présence Africaine est très marqué par son époque : esprit libertaire, dérision sur fond de décolonisation et de fin de la guerre d'Algérie. L'ensemble bien sûr, étant un pastiche de la réalité politique de l'époque, a un peu vieilli mais reste drôle surtout par son ironie grinçante et par son style fleuri de calembours, jeux de mots et autres clins d'œils stylistiques. L'intrigue est un peu légère, mais ce texte, relu aujourd'hui, permet une vision très second degré qui n'est pas désagréable non plus. Et peut donner à réfléchir.