Une histoire des parents d'écrivains : De Balzac à Marguerite Duras
de Anne Boquel, Étienne Kern

critiqué par Killeur.extreme, le 11 octobre 2010
(Genève - 42 ans)


La note:  étoiles
Après les haines de leurs confrères le jugement de leurs parents
Après les haines d'écrivains, les deux auteurs Etienne Kern et Anne Boquel poursuivent leur histoire littéraire avec les parents d'écrivains et comme dans les "haines d'écrivains" la plupart de leurs révélations sont inattendues.

En effet si les Eric NaulleauX et ZemmourS regrettent souvent que les écrivains qu'ils critiquent ne soient pas le "nouveau Balzac" quand on voit comment celui-ci a été traité par sa mère !!!! les auteurs citent même le testament de sa mère qui n'a été ouvert qu'en 1960 où Honoré est traité comme le second fils (sa mère lui préférant son fils adultérin) sans oublier ses critiques sur les romans de son fils alors que celui-ci est un écrivain reconnu sont un revers d'une médaille bien lourde à porter.

Ce qui frappe c'est que les parents d'écrivains quand ils ne méprisent pas l'œuvre de leur fils, ne la comprennent pas et quand ils sont enthousiastes, ils le sont presque trop (la mère de Sartre demandant à ce que la légion d'honneur soit remise à son fils) et un paradoxe de plus quand les critiques critiquent l'œuvre de leur fils les parents (les mères surtout) mordent, plus fortement si eux même détestent les livres de leur fils !!!!!

Le livre nous parle aussi des parents qui voient avec regret leur fils s'engager dans la littérature et ne pas reprendre le commerce familial ou le métier paternel, on voit à l'inverse aussi des écrivains qui poussent leur fils à leur succéder (Dumas et Mauriac).

On assiste aussi aux réactions des parents quand leur fils les croque dans les romans autobiographiques (La mère d'Hervé Bazin qui lors d'une dédicace de son fils dans leur village, la mère et le fils étant brouillés, se rend à la séance et dédicace elle aussi le livre puisque elle est la Folcoche décrite par son fils !!!!).

On en apprend plus sur les parents des plus célèbres écrivains et c'est insolite de voir que des écrivains traités comme des génies de nos jours (avec ou sans raison) ont eu un juge plus sévère que les critiques : leurs parents.

Avec les mêmes qualités que "les haines d'écrivains" drôle et instructif ce livre arrive à rendre aussi ces génies littéraires plus humains car ils ont dû pour la plupart convaincre leurs parents avant de convaincre le public et si beaucoup ont convaincu le public, certains n'ont jamais réussi à convaincre leurs parents.
Dur, dur d’être parents d’écrivains …. 8 étoiles

Contrairement à UNE HISTOIRE DE HAINES D’ECRIVAINS, des mêmes auteurs, UNE HISTOIRE DES PARENTS D’ECRIVAINS ne se présente pas comme un catalogue passant en revue par ordre chronologique des histoires de famille d’hommes de lettres du 19e et 20e siècle.

Les auteurs ont adopté ici un plan thématique qui favorise l’analyse du « modus vivendi » entre parents et enfants, basé sur une typologie des rapports entres ces « deux mondes à la perméabilité problématique, celui de la famille et celui de la littérature ». Plutôt qu’une série d’anecdotes, une réflexion qui mène sans souci de chronologie d’une famille à une autre. Chaque famille y est mentionnée à plusieurs reprises soit que les rapports parents-enfants ont évolué au cours des années, soit que chacun des parents appartient à un type différent .

Une recherche approfondie, sans prétention psychanalytique, érudite mais toujours claire et accessible, se référant constamment à la correspondance ou à des ouvrages biographiques antérieurs et qui se termine par une série de notices bienvenues récapitulant la biographie des ascendants cités .

Une plongée dans l’intimité familiale de nos auteurs célèbres, en même temps qu’une réflexion sur le travail d’écriture, le métier d’écrivain, et surtout, sur la difficulté, pour les parents, de privilégier le jugement littéraire au détriment du jugement moral, d’éviter « la myopie parentale » pour adopter un certain recul et considérer avec un « regard neutre » l’œuvre de celui auquel on a donné la vie .

Alma - - - ans - 13 août 2011