Voyage de quatre officiers au Montenegro
de Pierre Loti

critiqué par Tistou, le 11 octobre 2010
( - 68 ans)


La note:  étoiles
De Cattaro à Cettigne
Pierre Loti a écrit quantité de nouvelles ou d’articles au fil de ses voyages et pérégrinations. Parus dans des journaux, des revues, elles témoignent de l’intérêt du voyageur et de l’humaniste Pierre Loti, notamment pour les civilisations africaines, orientales, asiatiques. Celle-ci a paru en feuilleton pour la première fois dans « Le monde illustré » entre novembre 1880 et février 1881.
Dans le cadre de l’escadre internationale européenne venue mouiller devant Cattaro (Kotor, au Monténégro) pour faire fléchir l’Empereur ottoman sur l’affaire de la rétrocession de la ville d’Ulcinj, quatre officiers de marine ont fait le projet de se rendre à Cettigne, la capitale.

« A cinq heures du matin, les timoniers viennent éveiller dans leurs chambres les quatre officiers qui ont projeté de se rendre à Cettigne, capitale du prince Nikita.
En les éveillant, ils leur annoncent qu’il fait un temps affreux. – En effet, au-dehors, on entend le bruit du vent qui souffle : c’est le Borée. – De plus, le ciel couvert, il fait nuit noire. – Les quatre officiers font, sans conviction, leurs préparatifs de départ. »

La nouvelle est d’autant plus intéressante pour qui connait cette route, partant du niveau de l’Adriatique, Kotor, pour monter au bout de lacets interminables, sur le plateau désolé qui surplombe ce « fjord », le Monténégro, et cette ville : Cettigne.
Fin XIXème siècle, ceci se fait à cheval et c’est essentiellement la relation de ce voyage que nous fait Pierre Loti. Explorateur convaincu et curieux de tout, c’est un vrai plaisir que de lire ses impressions sur un tel voyage terrestre, ses impressions d’officier de marine davantage habitué aux ports de mouillage. D’ailleurs il s’exprime clairement là-dessus :

« C’est pourquoi les voyages en courant ont du bon ; - quand on a déjà beaucoup circulé par le monde, on s’est habitué à se former d’un seul coup une idée de toute une contrée. – Du pêle-mêle des choses qui vous sont apparues en quelques heures, on dégage une vue d’ensemble, - vue bizarre, esquissée à grands traits, - mais souvent juste.
C’est ce pêle-mêle qui va suivre. – Il y aura dans ce chapitre des choses incohérentes et des choses futiles, notées au hasard de la course. – La vue d’ensemble s’en dégagera-t-elle pour le lecteur ? – Il est fort à craindre que non : celui qui écrit n’a pas pour cela le talent qu’il faudrait. »

Une mine inépuisable de sensations et d’images.