L'argot est né de la haine !
de Louis-Ferdinand Céline, Raphaël Sorin

critiqué par Jules, le 18 juillet 2010
(Bruxelles - 80 ans)


La note:  étoiles
Littérature l'argot et l'homme Céline
Comme dans « Entretiens avec le professeur Y » Céline ici nous explique quel est l’objectif et l’utilité de sa langue et de son style d’écriture. Il le fait soit au travers de courts récits soit par des interviews.

Pourquoi l’usage de l’argot ? Tout simplement parce que, pour lui, avant le verbe il y avait l’émotion. Or, cette émotion ne peut pas, toujours selon lui, être transmise par l’écriture dite classique. Le français classique lui semble être une langue morte alors que grâce à l’argot elle peut retrouver la vie.

Selon lui, les écrivains d’aujourd’hui écrivent comme est écrit un journal, c’est plat, c’est morne ! Ils ont appris comme cela et cela ne demande donc que bien peu d’efforts de reproduire ce style.

Ce qu’il a apporté à la littérature, dit-il c’est un nouveau style essentiellement caractérisé par la transcription de l’émotion au travers d’une langue vivante.

Mais il nous dit aussi bien d’autres choses dans une interview donnée en 1961 soit un an environ avant sa mort.

Ce qu’il cherchait c’était aussi une petite musique.

Il n’aurait jamais écrit que pour gagner de l’argent et non pour une quelconque autre raison.

Après « Le voyage au bout de la nuit » et « Mort à crédit » il aurait dû s’arrêter n’ayant plus rien d’autre à dire.

S’il a eu une certaine commisération pour les hommes ce n’est en tout cas plus le cas. Ils sont ce qu’ils sont et qu’ils se débrouillent ainsi.

Il n’écrit que pour l’argent, ni par amour, ni par haine et se fout complètement de ses contemporains. Tout ce qu’il demande c’est qu’on le laisse dormir et qu’on lui foute la paix.

Rien de lui-même ne serait dans ses livres.

La seule chose peut-être vraie, pour lui, se trouve probablement dans le fait qu’il ne sait pas jouir de la vie. Il en est incapable et aurait hérité cela de sa mère.

La plupart des auteurs contemporains ne seraient pas fait pour écrire, ils en seraient incapables.

Il ne ferait pas partie de la vie, serait tout à fait en dehors d’elle. Il n’existerait pas !

Il nous déclare qu’il apprécie deux auteurs : Rabelais et Zola. Le premier pour la langue qu’il a utilisé et le second pour le courage qu’il avait d’écrire ce qu’il a écrit. Plus proches, Paul Morand, Barbusse et Ramuz.

Quand au reste de ses écrits il nous dit qu’il lui a suffit de raconter ce qu’il a vu.

Ce petit livre se termine par sa violente réponse aux accusations de Sartre à son égard.

A mes yeux, Céline est un des plus grands auteurs de son siècle. Par contre, l’homme Céline était véritablement un cas et ne devait certainement pas être très agréable à être fréquenté.