Le Coeur de Gemme, tome 1 : L'Héritier de l'Automne
de Giles Carwyn, Todd Fahnestock

critiqué par Belial, le 6 juillet 2010
(Anvers - 45 ans)


La note:  étoiles
Sex and the City
Bingo! Un message du facteur dans ma boîte aux lettres et quelques heures plus tard mes doigts grassouillets palpent le premier tome d'une trilogie qui, au vu de la quatrième de couverture, s'annonce épique.
Le bouquin est écrit à quatre mains par deux illustres inconnus (inconnus par moi en tout cas) sur lesquels je me suis empressé de faire une recherche. Nada, de la bleusaille visiblement. Tant mieux, je partirai sans aucun a priori.
Au bout de quelques pages le ton est donné. L'univers est très vite posé et oscille entre l'antique et le moyenâgeux tout en fleurant bon l'Orient. Il est décrit dans les (très) grandes lignes et on sent bien que les personnages et l'intrigue se taillent la part du lion. Ohndarien: une ville gigantesque entourée de murailles imprenables et dirigée par un Conseil dont la succession est héréditaire mais conditionnée par le passage d'une épreuve terrible. Ohndarien, ses voisins hostiles mais toujours repoussés, son multi-culturalisme, sa prospérité mais surtout son pouvoir déstabilisé.
Le roman mêle avec un certain brio complots politiques, romance, mysticisme, aventure avec quand même un peu d'action pour les warriors que vous êtes. Ce côté "à boire et à manger" m'a paru très plaisant parce que le récit est plus complexe qu'il n'y paraît et que le lecteur se laisse régulièrement désarçonner (en douceur) au fil de la lecture. Mais comment les auteurs font-ils pour développer un roman avec autant de facettes mais au final parfaitement digeste? Réponse: l'histoire. La mécanique du scénario est très bien maîtrisée, avec rebondissements et révélations qui tombent toujours à point nommé et vous amènent à lancer le fameux "allez, encore un chapitre" plutôt deux fois qu'une.
Je mentionnerai également la couche de mystère et de mysticisme qui recouvre l'ensemble. Disparition d'anciens membres du Conseil, un enfant qui ne se réveille pas... Je n'en dirai pas plus mais c'est de mon point de vue un excellent ressort dramatique utilisé avec ce qu'il faut de parcimonie et tire le roman vers le haut.
Si le pitch est complexe et multi-dimensionnel, l'écriture est en revanche très très fluide. Un style simple et efficace - où les dialogues sont légions - qui sert une intrigue palpitante sans être retorse. En fait c'est de la High Fantasy écrite comme un thriller, même si la comparaison se limite essentiellement au style. On sent les auteurs décomplexés et laissant de côté tous les artifices inutiles, et ça j'aime.
Des regrets? Pas de gros regret mais des remarques plutôt. Tout d'abord sur le plan esthétique l'Héritier de l'Automne a la coquetterie qu'on trouve souvent dans la fantasy ricaine. Les personnages principaux donnent l'impression d'être tous des êtres d'exception en puissance: cheveux au vent, pectoraux bien dessinés et seins fermes qui pointent vers les cieux. Rien de réellement pénible mais de ce côté-ci de l'Atlantique ça peut faire sourire.
Ensuite j'avoue que je continue de m'interroger sur la pertinence de saupoudrer l'histoire de sexe. Rassurez-vous ça n'a pas choqué le gaillard que je suis mais je n'ai pas trouvé que ça bonifiait toujours le récit. La sensualité de certaines pages développe et prolonge bien le thème de la romance, qui tient une place relativement importante. Par-contre dans d'autres cas on a un peu le sentiment que cela est un peu gratuit. Alors? Facteur distinctif? Argument marketing? Lecteur prude ou insensible? Faites-vous votre propre avis!
Conclusion?
Coeur de Gemme ne semble pas être de ces oeuvres qui renouvellent ou transfigurent un genre, mais là n'est pas l'ambition. Ce premier tome annonce une fresque héroïque où moments de bravoure et d'abandon se heurtent aux règles cruelles des jeux de pouvoir. Le pur plaisir de lire une bonne histoire où les auteurs sortent le grand jeu pour vous embarquer dans presque 700 pages que vous lirez à toute vitesse.