Plus que l’exploration des Terres de l'extrême sud, qui semble être une motivation secondaire pour les protagonistes, Le sphinx des glaces pourrait se résumer comme l’histoire d’une expédition de secours destinée à retrouver les survivants d’un navire qui s’est perdu corps et biens dans les profondeurs glacées de l’Antarctique.

Mais bien sûr, tout ce qui fait l’intérêt du livre, et son originalité dans l’œuvre de Jules Verne, c’est sa mise en résonance avec les aventures de Gordon Pym, un roman d’Edgar Poe. Dans un jeu de miroir assez troublant je dois dire, dans un dialogue permanent avec le récit de l'auteur américain, Jules Verne commet un bien bel hommage, le plus beau qu’il soit peut-être, à un auteur qu’il admire profondément, de toute évidence: écrire un texte qui « part à la poursuite », littéralement, du personnage de Gordon Pym.

La grande habileté de Jules Verne, qui fait le sel d’une bonne partie du roman, est de mettre en doute la véracité même du récit des aventures de Gordon Pym, que Poe présentait comme étant un récit authentique. Dans un chapitre absolument savoureux, Jeorling résume les aventures de Gordon Pym (ce qui est très pratique pour ceux comme moi, ne l’ayant pas lu) et surtout démonte ce roman, en montrant ses élucubrations et ses incohérences. Je dis savoureux, car le ton de ce chapitre, donne vite à penser que Jeorling va devoir revoir ses moqueries…Magnifique mise en abyme littéraire d’un livre par un autre ! Les indices récoltés par la goélette l'Halbrane, avec à sa tête le taciturne capitaine Len Guy, accompagné du minéralogiste Jeorling, le narrateur (qui se décrit lui-même comme « sérieux, pratique, peu imaginatif ») sont destinés à mettre le trouble sur la réalité d’une œuvre de fiction alors que Le sphinx des glaces en est elle-même une !

Pourtant, et ce n’est pas le moindre des paradoxes, Le sphinx des glaces, à l’image aussi des personnages principaux s’avère presque aussi rigoureux et austère que les paysages de l’Antarctique. Il y a finalement bien peu de fantaisie dans ce livre, voir pour tout dire il ne se passe pas grand-chose, la navigation est monotone, routinière, pendant une bonne partie du récit en tout cas. Mais la magie opère. En tout cas pour moi elle a opéré (mise à part un début peut-être un peu long). Dans les immensités perdues de l’Antarctique on se demande, chapitre après chapitre, pris par l’obsession, devenue dévorante, de Jeorling: rencontrerons-nous Gordon Pym tout au bout du chemin ? Jusqu’où ira Jules Verne pour « réincarner » le personnage d’Edgar Poe ? Vous l'avez compris, j'ai beaucoup aimé Le sphinx des glaces que j’ai trouvé fascinant et fort bien construit: je le classe personnellement dans les très bons crus verniens !

Fanou03 - * - 49 ans - 15 décembre 2017

Ce roman, au même titre que l'ensemble de l'oeuvre du grand visionnaire Jules Verne, est vraiment passionnant. En effet, cette histoire est une grande aventure marine dans les glaces de l'Antarctique, avec des personnages plus qu'attachants. On ne peut que s'apparenter à Joerling qui s'embarque à bord d'un bateau commandé par un capitaine obnubilé par un roman d'Edgar Poe.
On saura plus tard pourquoi, je ne révèlerai rien!
Cependant, le récit est pour ma part un peu poussif, répétitif et un peu long pour le peu d'action constatée. Mais peut-être que cela était voulu afin d'obtenir un rythme lent, englué ou pour démontrer que les recherches sont laborieuses et pénibles.
Bref, un roman intéressant mais qui aurait mérité quelques coupes franches!

POOKIES - MONTPELLIER - 47 ans - 22 septembre 2011