Matteo Ricci : Le sage venu de l'Occident
de Vincent Cronin

critiqué par Saule, le 19 mai 2010
(Bruxelles - 59 ans)


La note:  étoiles
Un Jésuite en Chine
Matteo Ricci est né en 1552. Lorsqu'il est étudiant, très doué, il se sent appelé à rejoindre les jésuites, une compagnie récemment fondée. Il sera le premier européen à apprendre le Chinois, et à pénétrer dans l'empire du milieu. Grâce à sa science, - Ricci apporte avec lui les mathématiques modernes, l'astrologie, l'horlogerie,.. -, grâce à son profond respect de la culture Chinoise et son don à se faire des amis, Ricci va se lier d'amitié avec les plus grands lettrés Chinois et introduire ainsi le christianisme dans les hautes sphères du pays. Il sera aimé et respecté, et il sera même le premier européen à pénétrer dans la cité interdite.

Cet homme profondément intelligent avait compris le concept d'inculturation du Christianisme, qui ne sera exprimé officiellement que bien plus tard par le Vatican (bien trop tard en fait). Il faut dire que c'était la première fois qu'un évangélisateur était confronté à une société au moins aussi avancée que celle d'Occident. De plus, les Chinois, forts de leur science et de leur sagesse millénaire, n'avaient que le plus grand mépris pour les étrangers, assimilés à des "barbares". Imposer le christianisme par la force, comme ça avait été l'habitude jusqu'à présent, était donc hors de question. Surtout que les concepts étaient bien trop éloignés de l'entendement Chinois. Ricci va parvenir à relier le christianisme au confucianisme, qui est une sagesse (et pas une religion) en rien contradictoire avec le christianisme. Suite à son travail les conversions se chiffreront en centaines de milliers. Malheureusement, après sa mort, ce travail sera détruit par les franciscains et les dominicains, qui, à l'inverse de Ricci, refuseront les spécificités culturelles chinoises et tenteront d'imposer le rite occidental par la force (en particulier, ils convaincront Rome de déclarer le rite chinois du culte des ancêtres comme idolâtre). Suprême manque de respect, un évêque sera nommé qui ne parle que mal le Chinois et ignore la mentalité du pays.

Ce livre est passionnant, même si on peut peut-être regretter qu'il n'y ait pas plus de souffle (il manque un peu une âme, j'ai trouvé). Mais on découvre un homme formidable, qui est célèbre en Chine, beaucoup plus qu'en Europe. On découvre aussi un continent qui à cette époque était totalement inconnu de l'Occident : en fait, on croyait à l'existence d'un autre continent, le Cathay, et c'est Ricci qui va faire le lien entre ce continent mythique et l'empire du milieu. La culture Chinoise est incroyablement compliquée, avec des politesses et des courbettes à n'en plus finir, avec un rapport au temps complètement différent du nôtre, et une sagesse millénaire. Ce qui est très surprenant aussi, c'est de constater comment une culture aussi raffinée pouvait en même temps être tellement cruelle.