Les clefs du royaume
de Archibald Joseph Cronin

critiqué par Antinea, le 6 mars 2010
(anefera@laposte.net - 45 ans)


La note:  étoiles
Au risque de se perdre
Francis Chisholm est très tôt confronté, et de manière brutale, aux problèmes religieux : il perd ses parents suite à une rixe entre catholiques et anglicans. Il est élevé par une tante pingre et méchante et un oncle prédicateur caricatural. Il connaît la faim, la moquerie, avant d’être libéré par une autre tante, Polly, chez qui il trouve une famille soudée et de meilleures conditions de vie. Il grandit auprès de sa cousine Nora, pour laquelle il développe de tendres sentiments, mais doit rejoindre le séminaire, suivant le souhait des siens. Il se rapproche de la religion, sans vraiment l’envisager comme l’essentiel de sa future vie, malgré l’affection et les espoirs du directeur de l'école, le curé McNabb, dit Mac Le Rouge. L’esprit toujours habité par Nora, il poursuit ses études, ponctuées par les vacances d’été au cours desquelles il revient chez lui et retrouve la jeune fille. Mais un printemps, il reçoit une lettre de tante Polly, l’exhortant à ne pas venir cette année. Inquiet, il brave l’interdiction et malgré la blessure faite à son amour, il est loin de penser qu’il est devant les prémices d’un drame bien plus terrible qui le poussera vers la prêtrise.

En Espagne pour ses années de noviciat, jusqu’en chine où se déroulera sa vie de missionnaire, le curé Chilsholm œuvre avec conviction pour aider, conforter, apaiser, servir les autres, un don de soi qu’il fait au plus profond de lui-même et en marge de la politique du chiffre et des règles de la Sainte Eglise. Ses manières font de lui un excentrique désavoué, puis aimé, mais surtout incompris, un prêtre presque « malgré lui » qui accomplira pourtant de grandes choses au bout du monde et en son jardin.

L’écriture de Cronin est splendide et rend hommage aux paysages de la Chine. L’aventure est au rendez-vous dans ce roman, mais la passion n’y est pas, pour qui s’attendait à retrouver l’exaltation de La citadelle. Peut-être est-ce parce que Cronin, médecin, est plus à l’aise pour conter des histoires de docteurs ? Ce roman offre tout de même une réflexion intéressante sur le rapport des curés avec l’Eglise, un lien dur à maintenir pour l’homme qui ne cautionne pas la rigidité de cette Institution et sa vision quelque peu restreinte de l’esprit humain. Un livre qui pose les bases d’une discussion toujours plus d’actualité.