Le Grand Loin
de Pascal Garnier

critiqué par CC.RIDER, le 5 mars 2010
( - 65 ans)


La note:  étoiles
Pas plus loin que ce loin-là...
Marc est un quinquagénaire un peu dépressif ou désabusé qui décide, sur un coup de tête, de partir en week-end avec Anne, sa fille d'une vingtaine d'années, hospitalisée en psychiatrie. Il veut l'emmener au Touquet pour voir la mer. Mais assez vite, il abandonne l'idée de rentrer pour reprendre le fil d'une vie qui lui pèse et lui paraît insupportable. Alors la petite escapade tourne à la cavale et bascule dans l'horreur. Assassinats, incendie mortels jalonnent la route. Marc a des doutes. Sa fille ne serait-elle pas vraiment l'innocente qu'elle paraît ? Pour ne rien arranger, une piqure à son doigt s'infecte de plus en plus. Il risque la gangrène et envisage de demander à sa fille de lui couper le doigt. Et les ennuis ne font que commencer...
Une virée qui tourne mal racontée avec férocité, finesse et humour noir. Deux éclopés de la vie qui tentent de s'accrocher à des rêves naïfs ou dérisoires tout en cherchant désespérément à être aimés et presque toujours par des moyens d'une totale immoralité (amour tarifié, inceste). Un très beau texte, magnifiquement écrit, sans fioritures ni descriptions inutiles. Avec un minimum de mots, les faits et les dialogues arrivent, percutants, en pleine figure du lecteur qui termine ce court roman (158 pages) assez déstabilisé sur une fin particulièrement réussie en se demandant si cette histoire improbable a vraiment eu lieu ou s'il n'a pas rêvé ou plutôt cauchemardé.
Extraits :
« C'était un homme qui connaissait la vie mais qui, depuis longtemps, en avait perdu l'adresse. »
« A la naissance d'Anne, elle lui avait collé le bébé dans les bras, comme on se débarrasse d'un cadeau encombrant, d'une chose désirée mais qui ne convient plus, et s'était enfuie avec un poète chilien de nature exclusive. »
« On ne faisait pas plus loin que ce loin-là. La terre s'y achevait, le bec dans l'eau. »
Humour et poésie 9 étoiles

Fidèle à lui-même, Pascal Garnier nous emmène dans le voyage (la fuite?) de Marc, sexagénaire en plein questionnement.
Après toute une vie faite de rituels, d'habitudes, il se demande si l'absurdité est vraiment là où on pense la trouver.
Avec lui, il emmène sa fille, internée dans un hôpital psychiatrique et son chat, personnages hauts en couleurs.

Beaucoup d'humour dans ce "road movie" pourtant tragique.
Et des phrases comme des petits bijoux de poésie.
"Des cerfs-volants virgulaient dans un ciel si limpide qu'on pouvait en voir le fond....
Un jour, il faudrait bien inventer le ciseau à couper les ficelles, toutes les ficelles, celles qui nous lient étroitement les uns aux autres..."
"ça nous a amené ici, ton envie de voir ailleurs si tu y étais."

Pascal Garnier a coupé les ficelles mais il restera un auteur original mêlant amour, humour, secrets, et belle écriture pour le plus grand plaisir des ses lecteurs.

Marvic - Normandie - 65 ans - 18 mars 2010


Son grand loin 7 étoiles

Pascal Garnier vient de nous quitter alors que je termine son dernier né. Il restera pour moi, fan de l'auteur, un romancier à la plume cynique, parfois tranchante, toujours efficace de par l'économie de mots et les vérités qui s'en dégagent avec force. Ses romans courts, où le personnage principal, le plus souvent désabusé, un brin dépressif, combat ses démons sans savoir par quel bout commencer, ont toujours un côté touchant et intrigant. On ne déroge pas à la règle dans ce roman là, peut être pas le meilleur (mon chouchou étant la théorie du panda) faute à une fin un peu abrupte. Le genre de fin qui laisse un goût amer, un peu comme celle-ci...

El grillo - val d'oise - 50 ans - 12 mars 2010