L'album de ma jeunesse 40-50
de Laurent Chollet, Armelle Leroy

critiqué par Numanuma, le 7 février 2010
(Tours - 51 ans)


La note:  étoiles
De Pétain à Elvis
Les circonstances qui amènent à la lecture d’un livre sont parfois bien étranges. Dans le cas présent, j’ai acheté ce livre pour l’offrir mais, allant trop vite, je n’ai pas pris la bonne décennie ; je n’avais donc plus personne à qui le donner. Je l’ai donc gardé, bien rangé dans une bibliothèque. Et oublié pendant environ un an. J’ai remis la main dessus en cherchant autre chose et me suis résolu à le lire.
Ce bouquin de plutôt grand format fait partie d’une série parue chez Hors Collection et narre l’enfance et l’adolescence française dans les années 40 et 50, c’est-à-dire de 1941 à 1959.
Je dois bien l’avouer, j’ai une tendance naturelle à trouver plus exaltante la vie des années 45 à 69 ; au-delà, on entre dans l’ère de la consommation de masse, de la récupération de toutes les tentatives de rébellion, du conformisme plus ou moins déguisé. Cela vient probablement du fait que l’après-guerre est une période de reconstruction, de nouveau départ, avec tous les espoirs que cela engendre. La révolution du rock’ n roll arrive juste ensuite avec son cortège de drogue, de mauvais alcool, de sexe débridé, de lutte incessante contre l’autorité sous toutes ses formes. La suite n’est qu’une longue perte d’illusion jusqu’à notre époque où tous les interdits tombent les uns après les autres et où il est de bon ton d’aller guerroyer contre l’intégrisme en Afghanistan et de tenter d’y apporter la démocratie tout en se demandant ce que c’est d’être français et en développant une pensée passablement nauséabonde autour de l’identité nationale…
Mais je m’éloigne…
Ce livre est surtout un album à la riche iconographie et à la mise en page assez agréable. Les sujets sont traités sont la forme d’une double page, par exemple, la chambre d’une jeune fille sur deux pages puis la chambre d’un jeune garçon sur les deux pages qui suivent. Cela assure un certain confort de lecture. D’autres thèmes sont plus développés, ainsi les sports ou la BD. Ce dernier sujet est d’ailleurs le plus développé de tout l’album et le plus intéressant. Cela m’a rappelé cet album de Mickey qui a appartenu à ma mère et que j’ai lu et relu durant toute mon enfance malgré son état de délabrement avancé, les pages manquantes ou déchirées et surtout, malgré la totale impossibilité de connaître la suite des histoires qui y étaient racontées. Je ne sais pas ce qui est arrivé à cet album…
Les auteurs ont choisi une voie très consensuelle : la guerre n’est évoquée qu’à demi-mot, quasiment rien sur la vie des Juifs sinon l’évocation du Vel d’Hiv dans les pages consacrées au sport et les américains sont trop sympas avec leurs Coca Cola et leurs chewing gum.
De plus, certaines pages sont d’une niaiserie assez déconcertantes tant elles paraissent sorties tout droit d’un recueil d’histoires pour enfant sage des années 50 justement ! Voici ce que l’on peut lire pages 24-25, La classe d’un enfant : « Au fond de lui, monsieur Bernard croit encore que tout est possible, il n’a pas rejoint son frère dans le Vercors car il pense que sa place à lui, elle est ici, pour installer Martin près du poêle les jours de grand froid, pour partager ses maigres provisions avec des gamins qui en ont encore moins que lui, et surtout, pour instruire ses élèves le plus possible et les préparer à construire la France de demain. Et même si parfois il a la main leste, monsieur Bernard, sa résistance, il l’a fait tous les jours, dans la salle de classe ».
Affligeant…
Heureusement, tout n’est pas de cet acabit, mais ce genre de littérature, si elle a du charme dans un livre d’époque, me hérisse dans un ouvrage moderne. Ca sent un peu trop les colonies et la droite bien pensante !
A côté de ça, le bouquin est plutôt sympa dans sa simplicité d’accès et la quantité des photos présentes ; les thèmes abordés sont nombreux et variés et donnent un aperçu complet de la période proposée. Ne reste plus qu’à ouvrir un livre d’histoire plus complet plus pointu ou qu’à aller fouiner dans le grenier des grands parents, je suis sûr qu’on y trouvera de quoi faire travailler son imagination.
Zut, voila que je me mets à écrire comme un instituteur de la IIIème république à la punition facile et au fouet rapide…