Nous, on n'aime pas lire
de Danièle Sallenave

critiqué par Soldatdeplomb4, le 27 janvier 2010
(Nancy - 35 ans)


La note:  étoiles
Chroniques et réflexion sur les collèges d'aujourd'hui
Danièle Sallenave s'est rendu, dans le cadre d'un projet avec l'Education nationale, dans un collège "ambition réussite" (sorte de ZEP dopé aux subventions), afin de leur donner "goût à la lecture" via la rencontre avec un auteur. En l'occurrence elle-même.

A travers le récit de ses quelques entrevues, elle nous livre ses réflexions sur ce projet, et surtout sur le collège en général, car cette expérience a soulevé chez elle, on s'en rend compte, une réflexion et une inquiétude profonde.

Cette chronique est plus un essai, extrêmement bien écrit, très intéressant, où l'auteur prend des positions, discutables, certes, c'est le propre d'une opinion, et très franches. C'est un des intérêts majeurs du livre: sa franchise. Par exemple, préconiser un retour aux enseignements classique: lire, écrire, compter parfaitement, est quelque chose de très bien, mais difficilement défendable aujourd'hui, où on estime que l'école doit évoluer à tout prix avec la société. Sallenave défend avec brio une autre thèse: l'école est une niche indispensable de culture et un havre de paix pour les collégiens, qui ont parfois une vie difficilement, en particulier en ZEP.
Face au bilan mitigé de l'Education Nationale, l'auteur aborde tous les sujets dans son livre: formation des professeurs, les problèmes parentaux, racisme, cloisonnement social... J'ai aimé cette hargne à vouloir niveler le niveau par le haut, et non par le bas en restreignant les exigences. J'ai aimé l'idée d'un retour à une école républicaine plus sérieuse, plus stricte peut être. j'ai aimé l'idée de se méfier de tout ce qui est trop techniques (ordinateurs, trucs numériques) car ce n'est pas ça qui va stimuler l'attention des élèves (je le vois moi en tant qu'étudiant, l'ordinateur est très nuisible à la concentration). Je ne dis pas que j'ai été d'accord avec tout, mais son livre a le mérite d'exposer des points de vue, et d'être une bonne base de réflexion.


Seulement, il y a quelques contradictions. La plus criante, la voici:

Elle commence très bien (dans le sens où je suis d'accord avec elle!!!) en écrivant "On n'a pas besoin pour aimer lire [...] de tout un embarras théorique qui accroit la distance avec les livres au lieu d'en rapprocher. Le professeur peut y être initié, pour maîtriser ce dont il parle. Mais ce qu'il doit enseigner, c'est la pratique, pas la théorie des livres. Un oenologue est autre chose qu'un amateur de vins. La preuve c'est qu'il recrache ce qu'il goûte...". SUPER, j'applaudis des deux mains.
Une trentaine de pages plus loin, que préconise-t-elle comme lectures? "C'est pour cela que je regrette deux choses: 1) qu'il y ait trop de textes de littérature jeunesse. 2° [qu'il y ait trop de littérature étrangère] [...] Allons plutôt droit aux textes, aux "grands textes" qui sont une méditation sur l'existence, la finitude, les conflits, l'expérience intérieure, le tragique de toute vie, [...] afin que derrière tout ça les élèves voient se profiler des personnalités non conformes, de Baudelaire à Villon, et de Socrate à ... - Je vous laisse le choix."

J'ai trouvé ce point de vu totalement aberrant. Les élèves n'ont pas une lecture fluide? N'aiment souvent pas lire? Solution pour leur donner ce goût et s'éloigner de toute théorie littéraire: Baudelaire, Villon, Socrate, et surtout pas de littérature jeunesse.



En tout cas un texte qui ne laisse pas indifférent, et qui développe de très nombreux points de vue. J'ai aimé!