La Chute de la CIA : Les Mémoires d'un guerrier de l'ombre sur les fronts de l'islamisme
de Robert Baer

critiqué par CC.RIDER, le 15 janvier 2010
( - 67 ans)


La note: étoiles
Un témoignage accablant qui se lit comme un roman
De 1976 à 1997, Robert Baer, de la division des opérations clandestines (renseignement ou plutôt espionnage) a combattu l'islamisme sur tous les fronts : au Liban, au Soudan, en Libye, dans plusieurs états d'Asie Centrale et même en Irak. Homme de terrain n'ayant pas peur de mouiller sa chemise et de payer de sa personne, il a dû lutter contre la politique de l'autruche menée par la Maison Blanche, les hésitations et lâchetés des hommes politiques, la main-mise des technocrates, les manipulations du lobby pétrolier et surtout le règne sans partage du politiquement correct. Il a assisté impuissant à l'attentat sanglant contre l'ambassade des Etats-Unis à Beyrouth en 1987 et à toutes sortes d'actions meurtrières menées par les terroristes du Djihad islamique et autres groupuscules noyautés par les Iraniens et/ou par Ben Laden. Faits jamais vraiment élucidés et toujours impunis à l'heure actuelle.
Ce livre, tout à la fois témoignage vécu sur le terrain, chronique de l'actualité récente et leçon (amère) de géopolitique se lit comme un roman. La réalité dépasse la fiction et le lecteur en découvre de belles : les prises d'otages occidentaux et leur piteux dénouement, le scandale de l'Irangate, les révoltes kurdes et leur abandon en rase campagne faisant avorter toutes les tentatives autochtones de renverser Saddam Hussein, une politique américaine dirigée en sous-main par les gros trusts du pétrole, le financement des campagnes électorales par les Chinois ou les Russes par l'entremise d'un escroc libanais. Lâcheté, hypocrisie et corruption à tous les étages. D'abandons en renoncements, de technocratie en bureaucratie triomphante, la CIA a fini par se retrouver aveugle et sourde en dépit de tous les satellites et de toute la technologie possible. De telles conditions de fonctionnement amenèrent à la catastrophe du 11 septembre.
LA CIA VUE DE L’INTERIEUR 7 étoiles

Si quelqu’un n’a jamais lu un livre « visé » par la censure de la CIA… et bien c’est celui-ci qu’il faut lire… Des paragraphes entiers effacés, cachés par une ligne, un trait noir, mais aussi des noms, des dates, des lieux… Je dois avouer que je n’avais jamais lu un livre comme celui-là !...

Plus sérieusement ce livre est l’autobiographie de Robert BAER ex-agent de terrain de la CIA.
Ce n’est bien sûr pas de la grande littérature, mais un témoignage de « première main » sur la CIA par quelqu’un qui en a fait partie pendant de longues années, et je dois avouer que c’est et de loin l’aspect le plus intéressant de ce livre.
On découvrira ainsi p. ex. la formation des agents de terrain (Robert BAER ayant été recruté tout de suite à la fin de ses études universitaires.), comme l’apprentissage au tir, le montage et le démontage de plusieurs types d’armes (M16, AK 47…) y compris les yeux bandés, le saut en parachute, les différentes méthodes pour retourner des agents ennemis, ou les «trucs et astuces » pour convaincre un diplomate étranger d’espionner pour votre compte…

Comme déjà dit il n’y a pas de fioritures dans ce livre, l’auteur nous présentant son témoignage « brut de décoffrage » !...
Il ne manque toutefois pas d’humour, malgré le ton plutôt pessimiste et sérieux du livre, comme lorsque qu’il raconte l’épisode d’un détective de la CIA qui chargé d’enquêter sur ses relations avant son recrutement, vient un jour sonner à sa porte, pour lui demander des renseignements sur… lui-même!
Le détective avait en effet confondu son adresse avec celle d’un ami qu’il avait cité comme référence dans sa demande de candidature…

Un extrait : …Les employés devaient faire état d’une relation « intime et prolongée » avec tout ressortissant d’un pays étranger. Question : comment interpréter la notion de «relation intime et prolongée » ? Une nuit d’amour torride? L’envoi de poèmes fiévreux à une dame avec qui le lien était tout platonique ? La sécurité restait sécurité restait dans un flou équivoque. Ce fut mon patron à Khartoum, Milt BEARDEN, qui me fournit la définition la plus sensée : « Si vous rangez vos pantoufles sous le lit de votre « relation », c’est qu’elle est « intime et prolongée»…

Voilà le ton est donné. Un bon livre que je recommande pour ceux qui veulent comprendre pourquoi la CIA n'a rien vu venir le 11 septembre 2001...


Septularisen - - - ans - 8 décembre 2012