Saya
de Richard Collasse

critiqué par FranBlan, le 8 décembre 2009
(Montréal, Québec - 83 ans)


La note:  étoiles
Agréable lecture...
Une amie m'a prêté ce livre que je n'aurais sans aucun doute jamais acheté, ayant très peu d'attirance personnelle pour la société et la culture japonaise en général, celles-ci nous étant presque toujours offertes sous leur aspect folklorique peu intéressant.
Parce que cette lecture m'a agréablement surprise par l'élégance et la sobriété de son écriture je cite d'abord le résumé de la quatrième page de couverture qui résume parfaitement la trame de l'histoire et reflète tout aussi parfaitement les qualités de l'écriture: «Japon, années 2000.
A 45 ans, Jinwaki est un cadre surdiplômé, qui poursuit une brillante carrière dans un grand magasin japonais. Mais une restructuration économique met brutalement fin à ce parcours sans accrocs : du jour au lendemain, Jinwaki se retrouve au chômage, privé d’avenir, dans une société extrêmement hierarchisée. Vécue comme une catastrophe, cette sortie de piste le pousse à s’accrocher à la première bouée qui passe à sa portée : Saya, une lycéenne rencontrée par hasard dans un bar de Tokyo. Inscrite dans une des plus prestigieuses écoles du pays, Saya se livre à la prostitution, ou « Enjo Kosai », avec des hommes bien plus âgés qu’elle. Entre Saya et Jinwaki, les rapports "subventionnés" vont bientôt céder la place à un véritable amour.
Il y a aussi Kaori, l’épouse de Jinwaki : ignorante des difficultés rencontrées par son mari, elle passe son temps entre sa belle-mère, qu’elle déteste, et son petit chien, auquel elle voue un amour immodéré et malsain...»
La grande qualité de cet ouvrage est de nous montrer la vie au Japon sans en rajouter, par petites touches, racontée par les personnages eux-mêmes. En effet, les trois protagonistes sont les narrateurs à tour de rôle, et il n’aurait pas été crédible qu’ils rentrent dans des descriptions sans fin de leur vie de tous les jours. L’écriture est très littéraire, comme si on lisait trois journaux intimes (ce qui est le cas). On a donc très peu de dialogues, très peu de personnages secondaires, très peu de détails psychologiques. Les villes ou les paysages ne sont décrits que si les personnages en ressentent le besoin, s’ils veulent nous faire partager leurs sentiments. L’autre aspect de ce livre est le décalage entre le besoin de liberté des personnages et le carcan de la société japonaise.
J’ai parfois regretté que cela soit un peu plat, mais il y a des moments extrêmement touchants, et l’auteur ne juge pas ces personnes, ne les encourage pas non plus..., le ton est très libertaire, érotique parfois, il n’y a pas de descente en enfer, juste une fin inéluctable pour deux amoureux à l’amour impossible qui ne peut que mal se terminer. Et au bout du compte, on ressort de ce livre en ayant l’impression d’avoir passé un bon moment, un très bon moment!
Richard Collasse, l'auteur, vit et travaille au Japon depuis plus de trente ans...