Nestor Burma contre CQFD
de Léo Malet

critiqué par Micharlemagne, le 28 octobre 2009
(Bruxelles - 72 ans)


La note:  étoiles
Un roman d'occupation
L’histoire commence le 17 mars 1942… Et si Nestor Burma n’avait pas manqué de tabac à cette date, le roman n’eût jamais existé.

Ce roman, le deuxième dans lequel apparaît Burma (après 120, rue de la Gare), fut sans doute entamé début 1943. Mais quand l’éditeur reçut le manuscrit, il fut un peu déçu. Il préféra attendre que le personnage du détective « qui met le mystère K.O. » se soit imposé au public pour le publier. On ne trouva donc le deuxième volume de la « saga » Nestor Burma dans les librairies qu’en juillet 1945. Les canons s’étaient tus en Europe depuis deux mois à peine et l’atmosphère dans laquelle évolue notre détective n’était plus qu’un mauvais souvenir. Néanmoins, ni Malet, ni son éditeur, ne crurent utile de modifier quoi que ce soit au texte du roman. Roman de guerre, roman d’occupation plutôt, « C.Q.F.D. » resterait un roman d’occupation.
Etonnant roman d’occupation, d’ailleurs. On ne rencontre jamais l’occupant, mais son ombre pèse lourdement sur l’histoire. Quelques allusions à sa présence, un bombardement allié et un avion de la Luftwaffe – dont la présence fugitive est déterminante – qui rase les toits « selon la plaisante habitude des pilotes allemands » sont les seules manifestations visibles de la guerre. Mais le rationnement, le couvre-feu, l’occultation, la ligne de démarcation et même les rafles de Juifs s’insinuent à toutes les pages : « Cet avocat pouvait être consulté utilement, mais il faudrait repasser. Il s’appelait Lévy. » Quant à l’épilogue, surprenant, il est infléchi à 180 degrés par un incident qui ne peut se produire qu’en temps de guerre.
L’intrigue est complexe et, parfois, un peu faiblarde. Ce deuxième polar de Malet se soutient parfois avec quelques « trucs » faciles. Et le style de Malet n’est pas encore arrivé à sa maturité. Il laisse pourtant apparaître quelques belles promesses : « Il y avait un flic sur le bord du trottoir. Il était de service ou attendait une bonniche, on n’aurait su dire. Il paraissait s’ennuyer ferme et avait l’air d’un bon bougre. Après tout, c’était peut-être un faux !... Les passages cloutés, polis comme des sous neufs, étincelaient sous le soleil… »
Un livre agréable à (re)lire d’une traite, comme tous les romans de Malet !...
R. A. S ; 4 étoiles

En mars 1942, sous l'occupation, Nestor Burma se met en quête d'un peu de tabac, est surpris par une alerte et se retrouve dans un abri anti-bombes en compagnie d'une jolie fille. Après l'alerte, il file la jeune femme qui parvient à le semer. Il croise peu après l'inspecteur Faroux qui l'invite à monter dans une chambre meublée où se trouve le cadavre du comédien Henri Briancourt. Puisque la victime, autrefois incarcérée au stalag, avait dans ses poches une carte de l'agence Fiat Lux, Burma devient un suspect. Pour se disculper, il doit retrouver la trace de la jeune fille de l'abri. En lisant, le journal des prisonniers rapatriés, il trouve une piste, se rend avenue Jean-Jaurès et découvre au no 32 la jeune inconnue prisonnière de deux malfrats. Il la libère, mais elle verse un narcotique dans son café et disparaît de nouveau.
Peu après, Faroux révèle à Burma que l'acteur Briancourt s'appelait en réalité Henri Barton, et qu'il a été mêlé en 1938, avec une certaine Lydia Verbois - qui n'est autre que la mystérieuse jeune fille -, à l'attaque d'un train qui convoyait des lingots d'or de la Banque de France. Sur ces entrefaites, Nestor Burma reçoit la visite d'Emmanuel Chabrot, le directeur du C.Q.F.D., un journal d'indiscrétions et de chantage qui intime au détective l'ordre de quitter Paris quelque temps. Burma le flanque à la porte, confie à sa secrétaire Hélène le soin de retrouver Mlle Verbois et poursuit son enquête qui connaît une conclusion tragique.

Ce sac d’embrouilles que j’ai eu grand peine à finir, s’est révélé pour moi du moins, d’une lecture à la mords-moi-le-nœud… Mais j’espère bien qu’un autre lecteur, loin d’y voir un sac de nœuds, y verra lui, un nœud cadeau…

Pierrot - Villeurbanne - 72 ans - 20 octobre 2017