Les montagnes hallucinées, suivi de Dans l'abîme du temps
de Howard Phillips Lovecraft

critiqué par Nance, le 19 octobre 2009
( - - ans)


La note:  étoiles
De la bonne science-fiction
Ce livre regroupe deux nouvelles du maître du fantastique.

Les montagnes hallucinées : « L'ambiance de mystère maléfique de ces montagnes arides, et l'appel de cette mer du ciel opalescent aperçue entre leurs sommets fut une chose si subtile et ténue qu'on ne saurait l'exprimer en mots de tous les jours. » Pourquoi un géologue tente d’empêcher la découverte d’étranges montagnes en Antarctique et de ce qu’il y a au-delà ? L’homme nous raconte son expérience. C’est un récit fait de descriptions. Ça commence lentement, mais après le premier chapitre, quand l’équipage commence à faire des découvertes, ça part à un rythme de croisière. Les descriptions sont écoeurantes, ça demande beaucoup d’imagination du lecteur, on doit se créer des images mentales pour entrer dans l’histoire. Étant visuelle, j’ai beaucoup aimé ça. Cette nouvelle fait partie de la liste des 1001 lectures à lire avant de mourir, ce qui m’a donné l’idée de la lire, et l’auteur prend ses sources entre autres dans ses autres écrits (La cité sans nom) et du roman unique d’Edgar Allan Poe, Les aventures d’Arthur Gordon Pym. Une nouvelle assez spéciale, Lovecraft a définitivement une griffe personnelle, mais ça comporte des mots savants incompréhensibles et quelques longueurs. 4.5/5

Dans l’abîme du temps : « Il me fallut beaucoup de temps pour établir un lien entre ces sentiments de frustration et les visions passagères qui commençaient à se manifester. Le premier rapprochement de ce genre concerna la sensation bizarre d'une contrainte extérieure, artificielle, sur ma mémoire. » Un homme raconte des expériences étranges qu’il a vécues. Il a été victime d’une amnésie temporaire qui a duré quelques années et après, il n’a plus jamais eu le sentiment d’être redevenu totalement soi-même, comme si quelqu’un/quelque chose a essayé d’usurper son corps, ses pensées. Toute sa vie durant après, il a été la proie à des rêves confus, qui semblent d’être d’une autre époque et à avoir des souvenirs qui ne sont pas siens. Comme à son habitude, l’auteur nous tient en haleine en nous faisant des révélations au compte-gouttes. Les deux nouvelles se ressemblent beaucoup, lues de suite, ça m’a donné l’impression de répétition, de redondance. Les montagnes hallucinées a plus d’aventure et j’ai trouvé Dans l’abîme du temps plus lourd. Une nouvelle intéressante pareil... 3/5
Les secrets de l'Antarctique 6 étoiles

J'étais assez impatient de commencer Les Montagnes hallucinées car je savais que cela faisait partie des œuvres les plus appréciées de Lovecraft mais je dois bien reconnaître que sa lecture a eu sur moi un résultat en demie-teinte. Cela partait pourtant assez bien, l'expédition au Pôle Sud, les étranges découvertes et cette mystérieuse et effrayante attaque envers l'un des camps mais à partir du moment où le narrateur s'aventure dans la cité des Grands Anciens le récit marque le pas. L'auteur privilégie en effet l'enrichissement de son univers et même si cela reste intéressant cela a pour conséquence une brutale chute de l'intensité dramatique qui ne se réveille que rapidement sur la fin. L'aspect horrifique est donc moins présent que ce à quoi je m'attendais et est noyé dans des descriptions parfois assez verbeuses. Sans être forcément mécontent de cette découverte j'avoue que j'ai tout de même été un peu déçu.

C'est à peu près la même chose pour Dans l'abîme du temps, l'idée de départ est très bonne mais le récit est raconté dans un style assez lourd, parfois répétitif et pas particulièrement palpitant. Il y avait pourtant de quoi faire et peut-être l'expédition en Australie aurait-elle mérité d'être un peu plus approfondie car l'excursion du personnage principal dans ces étranges ruines est trop brève à mon goût.

L'édition que j'ai lue comportait également la nouvelle intitulée La couleur tombée du ciel et bien qu'étant plus courte que les deux autres ce fut pourtant la partie que j'ai préférée. En effet cette histoire de famille maudite après la chute d'un météore sur leur propriété est particulièrement réussie avec une ambiance angoissante à souhait et m'a donné quelques bons petits frissons. Lovecraft pour le coup a très bien géré son rythme et les pages ont défilé sans que je m'en aperçoive.

Ainsi, malgré une certaine inventivité et de bons passages, j'ai quand même trouvé que ce recueil était dans l'ensemble légèrement décevant à l'exception notable de la dernière nouvelle. Il est possible que j'en attendais un peu trop au vu de sa réputation et il est vrai que la qualité des récits de l'auteur est parfois inégale mais sur ce coup là je m'attendais quand même à mieux, tant pis.

Koolasuchus - Laon - 35 ans - 21 octobre 2024


Deux nouvelles qui stimulent l'imagination 7 étoiles

"Les Montagnes hallucinées " et "Dans l'abîme du temps" sont deux nouvelles dont les structures semblent assez proches. Dans la première, le narrateur parti en expédition en Antarctique narre ce qui lui est arrivé et ce que les scientifiques et lui-même ont trouvé dans ce lieu peu connu pour l'époque. Dans la seconde nouvelle, un professeur d'université a des visions troublantes qui semblent être le témoignage d'une autre époque ... A son tour, il confie son ressenti et ses découvertes.

H.P.Lovecraft a un univers bien à lui, une empreinte qui fait que l'on reconnaît son style et sa façon de narrer si personnelle. En effet, les narrateurs ne cessent de nous informer que ce qu'ils ont découvert est impressionnant. L'auteur ne lésine pas sur les termes qui renvoient à l'angoisse et à la peur. Souvent ses personnages sont traumatisés par ce qu'ils ont vu ou appris et certains personnages secondaires sont plongés en plein mutisme, ne pouvant confesser ce qui a été vécu. Le narrateur, quant à lui, le fera. Les passages descriptifs sont riches et prennent le pas souvent sur l'action. Lovecraft invente des civilisations lointaines, provenant de l'espace, qui ont précédé notre humanité. Leur présentation passe par le déchiffrage de fresques qui permettent de narrer leur existence, leurs habitudes ainsi que leur histoire. L'écrivain a aussi tendance à suggérer plutôt qu'à montrer, ce qui est très efficace car le lecteur imagine toujours le pire. Afin de brouiller les pistes ou de donner un semblant de vérité à sa narration il s'appuie sur des termes scientifiques ou géologiques qui conféreraient une certaine crédibilité à ses descriptions.

H.P.Lovecraft a inventé toute une mythologie et tous ces textes semblent se nourrir les uns des autres. Le "Nécromicon" est nommé à plusieurs reprises, un texte de Poe aussi, ce qui donne l'impression que ces mondes fantastiques appartiennent au même univers et ont une mémoire commune. Il est fascinant de voir comment cet auteur tisse des liens entre ces divers textes afin d'engendrer sa propre cosmogonie. Lors d'une émission sur France culture, étaient évoqués certains lecteurs passionnés de Lovecraft qui s'intéressent au Nécronomicon, comme si cette oeuvre était devenue une réalité. Des auteurs proches de H.P.Lovecraft ont entretenu ce mystère aussi en faisant référence eux aussi à ce livre. Cela deviendrait presque effrayant en fait ...

Ces nouvelles permettent d'échapper quelque temps au quotidien. Elles proposent une autre humanité avec un autre passé. Il y a tout de même des longueurs qui n'empêchent pas pour autant le lecteur de s'intéresser à ces univers.

Pucksimberg - Toulon - 44 ans - 21 septembre 2020


L'une des nouvelles les plus réussies de Lovecraft 9 étoiles

Cela faisait longtemps que je n’avais pas lu du Lovecraft. À l’occasion de la sortie en BD de « Les montagnes hallucinées », j’ai eu envie d’en lire l’histoire originelle. Je l’ai donc acheté en librairie.

Je ne regrette pas de l’avoir lu, et… je regrette d’avoir laissé passer 20 ans entre ma dernière lecture lovecraftienne et « Les montagnes hallucinées » ! J’ai redécouvert avec ce dernier livre la fluidité d’écriture propre à Lovecraft, un style qui n’appartient qu’à lui, à la fois claire, complexe et entraînante. Par moments, cela confine à l’art d’une prose bien particulière aux beautés sombres et fulgurantes. Son sens de la construction du récit, tout en petites touches qui vont crescendo jusqu’à la chute n’est pas en reste. Si Lovecraft avait écrit des romans de littérature dite « blanche », nul doute qu’ils seraient devenus des classiques. Il a aussi ses défauts : redondance de termes et de mots qui parsèment ses écrits, récits sans dialogues au rythme monocorde, obsession des mêmes thèmes des monstres antédiluviens, les « Grand Anciens ». C’est d’ailleurs ces obsessions qui l’ont conduit à construire une cosmogonie qui lui est propre, unique et originale, dans laquelle il place tous ses récits.

Les 2 récits suivants que j’ai lu et qui font partie de l’ouvrage « Les montagnes hallucinées » n’en font pas exception :

Le premier donne son titre au livre : « Les montagnes hallucinées », 156 pages. C’est ma préférée. C’est pour moi, même la nouvelle la plus réussie de ce que j’ai lu de l’œuvre de Lovecraft (dont il me reste encore beaucoup à connaître), avec « L’affaire Charles Dexter Ward », autre chef d’œuvre typique. Un groupe d’hommes (pas de femmes !) partent explorer l’Antarctique pour prospecter des fossiles et fragments géologiques. Ils découvrent des montagnes énormes et sinistres, au pied desquelles ils tombent sur d’étranges découvertes qui modifient en profondeur leurs plans d’origine. Et de découverte en découverte, 2 d’entre eux iront jusqu’au bout de la terreur. Une nouvelle réellement intéressante, passionnante à suivre, très linéaire avec des descriptions très visuelles où est retranscrit un environnement sombre, gigantesque et effrayant particulièrement réussi, et une tension inquiétante qui va crescendo tout en prenant le temps de la développer. Top !

Le second : « Dans l’abîme du temps », 94 pages. Alors là, c’est un récit plus étrange que le précédent. Malgré une prose toute aussi belle, j’ai moins accroché. J’ai trouvé que l’auteur en faisait trop dans l’évocation des différents êtres antiques antérieurs aux humains. Ça en devenait grotesque et beaucoup moins vraisemblable. Il reste que l’idée de départ était excellente et que l’histoire de cet homme soumis à des rêves étranges est quand même intéressante à suivre jusqu’au bout. Pas la meilleure des histoires de Lovecraft toutefois. Je lui donne une note de 3,5.

La note de 4,5 que je donne à cet ouvrage correspond à la première nouvelle, celle qui lui donne son titre, « Les montagnes hallucinées ».

Cédelor - Paris - 52 ans - 18 juin 2020


Se perdre mentalement 7 étoiles

Lente montée en horreur, basée sur la découverte d'une race antérieure, Les Montagnes hallucinées s'appuient avant tout sur un cadre naturellement angoissant et anxiogène : l'Antarctique. Vaste désert de glace où les vents violents et soudains peuvent provoquer les pires avaries, cet environnement belliqueux oblige les membres d'une expédition de découverte et d'étude à une grande préparation et à une grande prudence, mettant en alerte le lecteur autant que les protagonistes, les installant dans un climat de nervosité et de doute.
Ce décor est aussi propice à la plume à la fois poétique et scientifique de Lovecraft, lui permettant de décrire avec brio la moindre parcelle d’architecture ou de nature mais aussi de rapporter consciencieusement les évènements liés à l'étude scientifique des roches et découvertes biologiques. Parfois magnifique de poésie, toujours rigoureux et précis lorsqu'il relate les faits, l'auteur montre aussi les limites de sa méthodologie, ou tout du moins de son style.

Car cette méticulosité pourra, une minute après avoir accroché le lecteur, le perdre et l'ennuyer suite à l'abondance de jargon scientifique et à l'emploi d'un vocabulaire construit autour de la création d'une cosmogonie intéressante mais inconnue du lecteur avant cela.
Et puis Lovecraft se répète, rabâche parfois lorsqu'il évoque le travail de Roerich, faisant durer de manière artificielle un récit qui aurait pu être une nouvelle bien plus courte.
C'est bien dans la narration que l'auteur échoue là où il réussit dans la description et la création d'un environnement effrayant ainsi que dans l'écriture même, magnifique et unique.

Ces petits défauts n'empêchent toutefois pas totalement le récit d'atteindre son but et l'on ressent parfaitement l'inquiétude croissante du protagoniste principal, on s'interroge comme lui et l'on se perd avec lui dans ce qui apparaît comme des dédales anciens, ruines de cités ancestrales qui nous effraient et nous perdent aussi mentalement.

Relativement similaire dans sa construction au récit des Montagnes hallucinées, Dans l'Abîme du temps se montre toutefois plus original dans la nature même de la race venue d'outre-espace tout comme leur influence sur l'Homme voir leur contrôle. De ce point de vue là l'histoire est peut-être plus réussie et plus captivante que dans l’œuvre citée ci-dessus et la tension est une nouvelle fois de mise, toujours croissante. Malheureusement les défauts de Lovecraft sont aussi toujours là et l'on baillera parfois devant l'étalage d'un vocabulaire abscons et répétitif.
Le cadre est aussi moins marquant que l'Antarctique et ses vents glaçants mais sait quand même se montrer original et suffisamment anxiogène.

La comparaison inévitable entre les deux histoires révèle finalement à peu près les même qualités et défauts si ce n'est les points évoqués plus haut.

Ngc111 - - 38 ans - 29 décembre 2014


Sublime et effrayant 10 étoiles

Des deux nouvelles, je n'ai lu que Dans l'abîme du temps. Une vraie merveille de l'art lovecraftien. Le suspense s'installe lentement à travers ce voyage temporel stupéfiant et grandiose. La folie du maître de Providence est ici retranscrite dans l'immense perspective de cette traversée temporelle au principe tortueux.
La découverte progressive des lieux, l'explication des mystères nous vient progressivement à travers les impressions du personnages et les descriptions horrifiantes de Lovecraft rendent l'attente encore plus étrange. On est propulsé dans l'histoire comme à travers une galeries d'images surréalistes mais prenantes.
Plus qu'extraordinaire...

Orea - - 30 ans - 6 décembre 2009