Et qu'on n'en parle plus : autobiographie
de Michel Sardou

critiqué par Fabrice ROUDERIES, le 22 septembre 2009
( - 49 ans)


La note:  étoiles
Divertissant et plein d'humour...mais laisse un sentiment d'inachevé
Un ours !
Voilà l'image juste qu'a voulu donner de lui Michel SARDOU en couverture du livre censé être une autobiographie. Cette image est parfaitement choisie par l'auteur; presque un autoportrait. Il donne ainsi, dès la couverture, des indices sur ce que l'on va pouvoir découvrir de lui. L'ours a une image solitaire, sans doute gentil mais il peut mordre et attaquer quand on l'emmerde… comme lui.
Par ailleurs, le titre est aussi parfaitement choisi: "et qu'on n'en parle plus".
Il aurait pu aussi se décliner comme, "circulez, y'a rien à voir" ou plutôt, "rien à dire de plus". L'auteur prévient ainsi qu'il abordera sa vie sans palabres et sans introspection véritable.
Michel SARDOU a choisi d'écrire sous forme d'un dialogue imaginaire avec sa mère. L'auteur maintient ainsi Jackie vivante, parlant à son fils, le guidant et l'engueulant souvent, afin de l'aider dans son écriture.
Je pensais, en refermant ce livre, tout savoir de la vie de SARDOU, de ses amours, de ses amitiés et de ses inimitiés… raté, ce ne sera pas pour cette fois.
On a le sentiment que l'auteur se viole chaque fois qu'il doit aller au fond des choses. Du coup, il ne fait que survoler les évènements.
Se raconter "l'emmerde" si bien, qu'à la page 65 il dit à sa mère (dans le cadre de ce dialogue imaginaire) "…j'en ai marre d'un seul coup. Tu crois qu'on a le droit de sortir un bouquin de soixante cinq pages ?".
On comprend aussi qu'il ne dévoilera que ce qu'il veut bien dévoiler en page 85, "…je n'aime pas me déballer à cause de ça. On finit toujours à devoir expliquer des emmerdes dérisoires. Et puis ma vie, c'est autant celle des autres, je la trouve d'une banalité affligeante."
Le lecteur aura donc droit à une succession d'anecdotes, de tranches de vie avec l'éclairage particulier que veut bien lui donner l'auteur.
On y apprend que dans cette famille de saltimbanques, de grands parents en petits enfants, on a tous de sacrés caractères.
Il y révèle ce que l'on savait déjà: qu'il est devenu chanteur "un peu par hasard", puisqu'il se destinait plutôt au théâtre. Après tout, tant mieux pour nous.
Il tape sur la gauche, qui le traitait de "réac fascisant" autant que sur quelques "sous-fifres" de droite qui voulaient interdire "les ricains" ou "l'emmerdaient" régulièrement en espérant, via des contrôles fiscaux ou autres subterfuges, le faire taire. Il se définit allègrement comme un "anar de droite".
En réalité, il a toujours tranché avec la "bien-pensance" ambiante qui gouverne notre société, qu'elle soit d'un bord ou d'un autre. Il est "favorable à la peine de mort, pour l'IVG et le mariage des tantes…".
Son enfance, ses épouses, ses maîtresses, ses enfants, son service militaire, ses rencontres, le théâtre, la chanson… tout ceci est abordé dans le désordre, au gré des souvenirs qui lui reviennent.
J'ai particulièrement apprécié quelques confidences, quelques moments touchants de vérité en pages 125 à 127, sur le sentiment que la "nature prévient toujours et que la mort ne connaît pas l'embuscade"…
Dans les 20 dernières pages, le dialogue reprend avec son père et le livre se termine par une boucle sur le premier évènement cité, la mort de Fernand SARDOU.
Cette façon de revenir à son père me laisse penser qu'il y a beaucoup de non-dits.
Cette autobiographie, qui n'en est pas une, ouvre peut-être la voie à d'autres écrits…
En tous les cas, c'est un livre divertissant et plein d'humour.

Fabrice ROUDERIES