Fakirs
de Antonin Varenne

critiqué par BMR & MAM, le 2 septembre 2009
(Paris - 64 ans)


La note:  étoiles
Un petit "crochet" côté polar
Les éditions Viviane Hamy pourraient bien nous refaire le coup de Fred Vargas ... avec Antonin Varenne et son roman Fakirs.

Avec comme nouveau héros, un flic tout à fait parisien et tout à fait impossible comme son collègue Adamsberg : Guérin , un flic de la PJ (celle du Quai des Orfèvres), relégué dans un placard (au sens propre comme au figuré) après une sombre histoire avec des collègues (des ripoux ?), désormais chargé des enquêtes sur les suicides (c'est gai !), l'esprit tourmenté à la recherche de connexions secrètes pour expliquer notre monde inexplicable, attifé d'un imper jaune (à côté duquel celui de Columbo aurait l'allure d'un smoking), toujours à se gratter le cuir chevelu jusqu'au sang quand il réfléchit, ...

Il est affublé au bureau d'un adjoint pas très futé qui vient bosser en survêtement de foot (c'est pour dire !) et, à la maison, d'un perroquet qui l'accueille de "encooore en retaaaard" avec la voix de sa regrettée maman (elle exerçait le plus vieux métier du monde).

Antonin Varenne excelle à rendre vivants ses personnages improbables, insolites : le duo de flics, des collègues nécrophiles, le gardien de nuit du Luxembourg et son chien Mesrine, un baba-cool qui se promène place de la Concorde avec un arc, une artiste peintre allemande qui se jette nue et recouverte de peinture contre les murs, la patronne homo d'un club sado-maso du quartier latin, quelques paysans du Lot, de gays américains à Paris, ...

Son écriture est propre et nette, avec du mordant et de l'incisif mais sans les agaçantes fioritures dont la sphère littéraire française est coutumière.

Dans cette ambiance un peu déjantée on imagine bien que l'intrigue policière gentiment emberlificotée se promène et nous égare, va et revient, nous balade de ci et de là, à l'insu de notre bon gré !

Comme le suggèrent titre et couverture, on a donc affaire à un américain sado-maso qui s'écorche et se perce sur scène, jusqu'à ce qui ressemble fort à un suicide en direct-live. Et qui dit suicide, dit Guérin qui sort de son placard de la PJ.

L'ami américain baba-cool sort de sa retraite du Lot et l'ambassade de sa réserve ...

Avouons que ce côté américain du bouquin semble bien décalé et qu'on serait bien resté cloîtré dans le grenier du Quai des Orfèvres avec Guérin et son collègue ahuri, à cogiter des "adamsbergueries" (cf. ici) sans queue ni tête sur les épidémies de suicides à Paris.

Comme si Varenne avait hésité entre un clone de Fred Vargas et un thriller branché actualité.

Reste une découverte sympathique : un nouvel auteur (c'est quand même son 2° ou 3° bouquin), un style et une écriture solides, un personnage, ... assurément un filon à suivre !
Rien d’indien, ces fakirs … 8 étoiles

Ca a déjà été évoqué, j’y souscris, nous sommes ici en présence d’un polar aux tendances nettement « Adamsbergiennes » façon Fred Vargas. Pas déjanté de la même manière mais sérieusement quand même. Antonin Varenne aurait voulu participer à l’élection de Mister « anti-héros » qu’il ne s’y serait pas pris autrement.
C’est qu’il est bizarre le père Guérin, relégué sous les toits qui fuient du 36 Quai des Orfèvres, relégué aux enquêtes sur les suicides comme un pestiféré qu’on aurait collé aux enquêtes sur les épidémies. Il a pour adjoint et compagnon de bureau Lambert, un jeune gars réputé simplet dont on ne savait pas trop quoi faire. Les deux font la paire, les deux se penchent sur chaque suicide parisien, les deux sont la risée et les souffre-douleurs de leurs collègues du 36. Et pourquoi me direz-vous ?
C’est qu’on comprend que Guérin a dû un jour dénoncer des flics véreux, des « ripoux » en d’autres termes, et qu’on lui fait encore payer.
On comprend aussi qu’il a des problèmes psychologiques qui n’ont jamais été réglés avec sa mère, ex péripatéticienne, et qu’il est trop tard maintenant, d’autant qu’il se fait harceler lorsqu‘il rentre chez lui par le perroquet ara de sa mère, recueilli par ses soins. La voix de sa mère morte le harcèle encore !
Suicides donc. Et l’un d’entre eux va faire « tilter » Guérin. Un « fakir » américain qui opérait dans un club sado-maso parisien meurt sur scène. Alan Mustgrave s’est-il suicidé ? Apparemment oui. Mais Guérin … Guérin et son ciré jaune, Guérin et Lambert …
Là-dessus déboule un autre drôle de numéro. Celui qui semblait le seul ami d’Alan, John Nichols, universitaire américain, psychologue en rupture de ban avec l’ordre officiel (et notamment de la CIA) et qui vit de l’air du temps avec un arc pour seule compagnie dans un lopin de terre du côté du Gers. Un frappadingue là encore. Qui monte à Paris dans le cadre de la mort de son ami. Qui rencontre Guérin et Lambert. Qui se ressemble s’assemble …
Finalement il n’y a pas que le suicide d’Alan Mustgrave qui fait lever un sourcil à Guérin. Pas bête le gars ! Enquêtes. Tendance Adamsberg donc.
Je ne vois pas l’équivalent de telles choses chez les auteurs de polars américains. Il y a bien des auteurs qui ne se prennent pas au sérieux, des Elmore Leonard ou Carl Hiaasen, mais ça n’atteint pas le mélange de sérieux et de dérision poussée à l’extrême d’une Vargas ou d’un Varenne ici présent.
C’est très plaisant. C’est « Super Dupont » au pays des enquêteurs.

Tistou - - 68 ans - 6 mars 2018


pas mal 6 étoiles

L'auteur a du style et des idées. Ses personnages sortent des sentiers battus et ne m'ont pas laissé indifférent. L'intrigue galope pas mal et c'est bien foutu. Faut pas avoir peur du noir, hein !
L'auteur a fait encore mieux avec le très très convaincant "Le mur, le marin et le berbère" (peut-être pas dans cet ordre), où on retrouve son style et une intrigue ciselée aux petits oignons.

A lire. Et auteur précieux et original à ne pas quitter des yeux !!

Ronanvousaime - - 49 ans - 7 mai 2014


Une aiguille dans une botte de foin ? 6 étoiles

Polar sympa dans la ligne d'un Grangé avec moins de talent pour tenir en haleine le lecteur. L'histoire de ces suicidés aurait pu être sympa mais la direction prise par l'auteur dans un cul de sac mène le lecteur à se désintéresser de sa lecture. De bonnes formules, un rythme soutenu, des personnages qui accrochent, mais pourquoi diable le polar français ne parvient pas à raconter des histoires qui tiennent la route avec un début, un milieu et une fin ?

Hexagone - - 53 ans - 22 juillet 2011