Au pays
de Tahar Ben Jelloun

critiqué par Ddh, le 3 juillet 2009
(Mouscron - 83 ans)


La note:  étoiles
Un pays qu'il faut apprendre à connaître
Au Pays, comme retour au pays après une vie passée à l’étranger. Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage ? Pas vraiment, mais aucune plainte de la part du héros Mohamed.
Depuis 2008, Tahar Ben Jelloun est membre du jury du Prix Goncourt qu’il remporta en 1987 avec La nuit sacrée. De formation spécialiste en psychiatrie sociale, l’auteur publie de nombreux romans à succès mais aussi des essais et de la poésie. Ici, sa vision de la condition du musulman en France est décrite avec justesse, lucidité et impartialité.
Mohamed, immigré marocain, fonde une famille selon les bons principes du coran qu’il place au centre de sa vie. Une vie simple, tolérante mais pas toujours bien comprise par son entourage qui évolue, s’occidentalise. Mohamed ? un honnête homme du XXIème siècle, loin des outrances intégristes, mais imperméable aux us et coutumes de ce monde qu’il côtoie. Mohamed ? un père incompris de ses enfants intégrés : une fille qui épouse un chrétien et un fils qui change son prénom, Rachid devient Richard. Et voilà que Mohamed, à la vie bien réglée par son travail, se retrouve à l’entraite comme il dit. Que faire ? Un projet hors norme jaillit de son esprit. Retour général au pays !
Le lecteur peut se faire, à la lecture de ce roman, une idée de la complexité du dilemme entre intégration et rester fidèle à ses racines, à sa foi.
Tahar Ben Jelloun relate avec sobriété la complexité des problèmes d’immigration/intégration. Il adapte son niveau de langue tant aux personnages qu’il décrit qu’aux idées qu’il développe. Il apporte de la poésie au travers de rêves qui transportent le lecteur dans les mille et une nuits.
Au pays...de nulle part. 8 étoiles

Mohamed est immigré en France, il est ouvrier et aime son travail.
Lorsque l’heure de la retraite sonne, il ne trouve plus sa place et les questions l’envahissent ainsi qu’une sourde angoisse : qui est-il, à quoi va-t-il occuper ses journées maintenant.
L’idée lui vient de rentrer au « bled » et d’y faire construire une maison pour y passer ses derniers jours entouré de sa famille…

Chimère, fantasme.
« Au pays » est l’histoire d’un homme déraciné dont le seul repère est le monde du travail.
C’est aussi l’histoire d’une solitude, celle d’un homme qui vit en France en ayant gardé sa religion, ses pensées et qui n’est pas un lettré. Il n’est pas d’ici et il n’est plus de là-bas, où donc a-t-il sa place ?
C’est l’histoire d’un homme que la retraite fait chavirer parce qu’elle le prive de ses habitudes de travailleur, les seuls repères qui lui restent.
L’histoire d’un rêve qui, faute de se réaliser, déchire celui qui a osé le faire.
Une triste et belle histoire riche de multiples réflexions sur l’immigration, l’identité, la religion, la tolérance.
Une écriture ciselée qui laisse une large part à l’onirisme.
Un récit poignant qui suscite réflexion, compassion et change notre regard sur « l’autre ».

Bafie - - 62 ans - 16 janvier 2016


Et pourtant ! 4 étoiles

Le mot sobre est bien choisi pour qualifier la première partie de ce court roman. Le texte est brut, sans ambage et parvient à décrire avec juste "ce qu'il faut" la vie de tous les Mohamed venus chercher refuge et découvrant la solitude.
La seconde partie (le retour au bled) m'a beaucoup moins plu. (tout le contraire de la critique de Maylany)

Monocle - tournai - 64 ans - 25 janvier 2015


Une vie au fil des espoirs 8 étoiles

Après une évocation de son pèlerinage à la Mecque, cet ouvrier marocain qu'est le personnage principal raconte son envie de reconstruire une vie, pour ses enfants et petits-enfants, dans son pays d'origine, après de nombreuses années passées à travailler honnêtement et assez chichement en France.
D'un style sobre, presque oral, parfois franchement, au point d'en dérouter de temps en temps, il décrit la perception réciproque des deux communautés, française et marocaine, des appréhensions de la vie en France et de celle à reconstruire dans son village d'origine.

Ce livre met en scène une ambition toute de modestie et d'humilité, dans le respect d'une religion tolérante et ouverte, de partager son expérience et le fruit qu'elle lui a porté. Il s'agit d'un appel simple et sans détour à la tolérance, qui fait forcément du bien.

Veneziano - Paris - 46 ans - 16 octobre 2011


beaucoup d'émotion 9 étoiles

« Au pays »
roman de Tahar Ben Jelloum
collection Folio
Editions Gallimard
octobre 2010
5 €
Une retraite pourtant bien méritée....

Mohammed ouvrier marocain vivant en France a travaillé toute sa vie.
Il a élevé ses enfants selon la culture inculquée par sa famille. Il s'agit là d'un islam tranquille, loin du fanatisme.
Le jour de la retraite n'est pas très attendu...Il est même craint et ceci à juste titre.
Comment continuer à vivre avec des enfants qui ont pris un chemin qui leur est propre dans un pays où les nouveaux repères sont flous ?
L'auteur nous livre les réflexions d'ailleurs souvent judicieuses et teintes d'une pointe d'humour de ce nouveau retraité.
C'est ainsi que Mohammed rassure sa femme lorsque Le Pen se retrouve au deuxième tour des présidentielles . Ce n'est pas la peine qu'elle prépare ses valises, elle ne risque rien, oh non ! :
«  … Le Pen a besoin de nous, oui, imagine ce pays vidé de ses immigrés, il ne pourra plus dire que nous sommes à l'origine du mal, de l'insécurité, que nous profitons de la Sécurité sociale et des allocations pour les enfants, il sera bien embêté s'il n'a plus d'Arabes sous la main.... »
Le lecteur arrive à sourire mais pas longtemps car ce roman est noir.
Mohamed est quelque peu perdu...Ses enfants ont pris le chemin de l'intégration, sans lui. Comment les faire revenir ?
C'est ainsi qu'il décide très vite de retourner au pays pour construire une grande maison afin que tous ceux qu'il aime et pour qui il s'est dépensé sans compter, reviennent.

Jean-François Chalot

CHALOT - Vaux le Pénil - 76 ans - 5 janvier 2011


Récit un peu décousu 7 étoiles

Un récit sobre et simple sur un sujet compliqué et des sentiments complexes.

Malheureusement la construction du récit est assez décousue dans les deux premiers tiers du livre qui ressemblent plutôt à une énumération de faits et anecdotes sur toile de fond d'un futur départ à la retraite. La dernière partie du roman est quant à elle davantage claire car au rythme du temps qui passe.

Je m'attendais également à davantage de psychologie et d'élévation dans le récit.

J'ai donc été déçue sur quelques points mais la lecture est restée agréable et a suscité une certaine réflexion sur le sujet.

Maylany - - 44 ans - 29 décembre 2009